Ils sont de plus en plus nombreux dans les pays d´accueil, les frères et sœurs, qui ont réussi à créer des structures viables dans le secteur tertiaire, après un parcours et une expérience migratoire pas toujours propices. A côté de ces réussites, il reste cependant à noter une kyrielle de structures et de business qui font vite long feu. Pour de jeunes Africains qui s´évertuent à mettre sur pied une affaire dans le contexte européen où il est difficile de fonctionner dans l´informel, les problèmes d´accès au crédit sont primordiaux. À ceci s´ajoute le fait que beaucoup doivent combiner leur gagne-pain principal avec le business. Ce qui affecte négativement la rentabilité. Avec une faible rentabilité, vient la difficulté d´engager une main d´œuvre, même seulement à temps partiel. Un autre problème reste la cible qui est généralement africaine mais retrouve souvent son compte chez les concurrents asiatiques, à cause des prix ou des heures d´ouverture qu´ils jugent plus favorables.
Portons ici un regard sur un domaine commercial important qui nous lie aux sources et permet parfois de surmonter la nostalgie, loin de la terre natale: les Afro-shops, les call-centers et les restaurants. Lorsqu´on observe la réception à ce niveau, on se rend compte que la notion de service reste encore très vague pour bon nombre de gestionnaires. C´est ainsi qu´ils font attendre souvent sans raison fiable le client, faisant montre d´un comportement condescendant. Les heures d´ouverture sont rarement respectées, certaines règles élémentaires d´hygiène et de propreté bafouées. Quand bien même ils ouvrent à l´heure indiquée à l´entrée, la politesse semble ne pas être la chose la mieux partagée. Lorsque vous avancez les arrhes pour un service, c´est avec la détermination de combattant que vous réussissez à obtenir une confirmation par écrit. Vous insistez trop, le gestionnaire vous répond qu´«on est entre nous». Si vous revenez des semaines après et on vous livre un service bâclé ou un article aux antipodes du produit ordonné, vous vous retrouvez sans aucune défense et sans témoin.
Au moment où ceux-ci refusent de se soumettre aux règles élémentaires du commerce et du service, les opérateurs économiques d´origine asiatique ont vite identifié le vide, investissant dans les afro-shops, comme à Château-Rouge à Paris où la clientèle est africaine mais une partie pas la moins importante des propriétaires des salons de coiffure, des restaurants et des supermarchés offrant les produits africains, est constituée des Asiatiques.
Nous sommes dans un Afro-call-center. Le monsieur à la caisse ignore notre présence et continue la conversation avec son ami scotché au comptoir depuis des heures. Lorsque nous exprimons notre épuisement et notre impatience, il se montre méprisant comme si notre présence l´agaçait. Après le coup de fil dans l´une de ses cabines, nous revenons vers la caisse. Il regarde l´écran de son ordinateur, continue la conversation avec son ami, envoie entre temps un texto. Sans nous regarder, il nous communique la somme à payer, laquelle nous semble exorbitante. Nous préférons payer et abandonner les lieux, tout en promettant ne plus y revenir. «Parce que vous pensez que sans vous, mon business ne marche pas? » lance-t-il avec défi. Et voilà que notre cher monsieur vient de perdre deux clients mais cela le laisse indifférent. Deux clients, un nombre de prime abord insignifiant. Mais imaginez qu´il perde chaque jour un client, alors, il ne faut pas être mathématicien pour comprendre qu´il finira, au bout de 365 jours, par perdre presque tous ses clients et faire couler le business.
Il est vrai qu´on «est entre nous» et qu´une telle familiarité utilisée de façon sage et non abusive, contribue à renforcer le climat de confiance et de solidarité au sein de nos communautés. Si les affaires requièrent une certaine confiance, un tel code de familiarité ne devrait pourtant pas servir d´alibi pour l´imperfection, la médiocrité, la duperie, le moindre effort. La mise sur pied des plateformes de commerce et de service exige de la part des frères et sœurs de la diaspora beaucoup de courage et de sacrifice dans un contexte où les banques croient peu à notre réussite. D´où la nécessité de définir un cadre de fonctionnement très rigoureux. D´ailleurs justifier son manque de sérieux avec la doit-disant "mentalité africaine" comme si l´africanité était synonyme de l´absence de sérieux, c´est piétiner les piliers de nos cultures tels que la solidarité, l´hospitalité, le sérieux, l´esprit de groupe, la propreté, le respect mutuel qui doivent nous servir de maximes pour aspirer à l´excellence afin de faire briller nos structures et de créer les ressources et les emplois.
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