Les anciens Bëti et plus particulièrement les Ewondo constituaient une
communauté acéphale , d’hommes libres ;que certains Seigneurs de guerre, tels
Mbida Mengue ou Simekoa un ezoum(yezoum en boulou) de la tribu de Biya se
soient imposés auprès des leurs est une évidence ; mais d’une manière générale
les Bëti n’acceptaient pas de Chefs, pour la bonne raison qu’un Bëti,
c’est-à-dire un Seigneur ne pouvait avoir d’autres Seigneur que lui-même ;c’est
ainsi que qu’ils soient Mvog-Tchoungui Mballa, Mvog-Atangana Mballa, Mvog-Fouda
Mballa ou Mvog-Essomba Ndana tous les notables de ces grandes familles ewondo
étaient des pairs ,même si leur influence et leur prestige étaient fort
inégales en fonction, d’exploits de guerre, de leur richesse,qui s’évaluaient en
nombre de femmes, d’enfants, de mintobo (vassaux)et d’esclaves.
Le terme de nkukuma qui aujourd’hui désigne un Chef signifiait tout
simplement chez les anciens Bëti, celui qui dispose des richesses (akuma
)
L’absence d’un leader, clairement identifié disposant d’une autorité
suprême en pays bëti sera à l’arrivée des Allemands un des points faibles de
leur système d’administration ; aussi peineront-ils à contrôler le pays
bëti.
Pour ne pas avoir à multiplier à l’infini le nombre d’interlocuteurs sur des
sujets délicats, les Allemands décident donc de créer chez les Ewondo un
Oberhaüptling ,c’est-à-dire un Chef Suprême, chargé de représenter les Ewondo
auprès de leur administration ; il est difficile de ne pas y voir une décision
politique, car la dépendance de ce délégué à envers les autorités coloniales
sera de nature à assurer sa fidélité à l’égard des Allemands.
Ceux-ci chargent donc Karl Atangana qui n’est alors qu’interprète et commis
aux écritures de prendre contact avec les Ewondo afin qu’ils se choisissent un
représentant auprès d’eux ;c’est une fonction sans pareille que personne n’avait
jamais occupée auparavant et donc les Ewondo ignoraient l’existence.
Atangana qui aspire à cette fonction sait qu’il n’est pas le plus qualifié
pour occuper ce poste, non seulement, il n’a subi aucune des épreuves du Tso’o
grâce auquel on acquiert ses lettres de noblesse dans la société traditionnelle
bëti, mais il se susurre qu’il n’est pas le fils génétique du notable Atangana
Essomba, qui aurait épousé sa mère,alors qu’elle était déjà enceinte de lui,
mais par quelqu’un d’autre.
Mais Atangana a un atout majeur; dans ses fonctions d’interprète, il a un
statut spécial dont il va tirer parti : il est le seul à pouvoir avoir un
contact direct avec l’administration coloniale : il filtre soigneusement tout
ce qui doit être communiquer aux Allemands par les Bëti et se garde bien de
répercuter fidèlement tous les ordres et tous les souhaits que les Allemands
adressent aux Bëti ; il ne court aucun risque d’être contredit : peu de Bëti
s’expriment alors en allemand.
Atangana décide donc d’occuper lui-même cette place de Chef Supérieur qui lui
permettra de jouir d’un super-privilège, car il ne sera pas seulement le Chef
Suprême des Ewondo,mais celui de tous les Kolo-Bëti c’est-à-dire des Bënë,des
Enoah et bien évidemment des Ewondo
Encore faut-il faire avaler cela aux Kolo-Bëti.
Mais Atangana a plus d’une corde dans son arc ;il sait prendre les Beti au
sentiment quand son intérêt est en jeu ; il réunit les représentants des
familles ewondo ; sachant qu’il n’avait aucun titre à tenir la dragée haute à
ces notables, le jeune Atangana se mit à pleurer en disant aux Ewondo que les
Allemands lui demandaient de les représenter auprès d’eux alors que lui,
n’avait pas cette qualité.
Emus, les Ewondo nullement intéressés par cette nouvelle fonction dont ils
ignoraient les privilèges lui dirent : « qui voudrais-tu d’autre pour le faire ?
c’est toi qui parles leur langue c’est toi qui travailles avec eux , et c’est
toi qui dois continuer à le faire » . C’est ainsi qu’Atangana devint le
« nkukuma ntangan »,littéralement « chef selon les Blancs »
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