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BOKO HARAM,DÉSTABILISATION POLITIQUE ENDOGÈNE, EXOGÈNE OU ACTES TERRORISTES DJIHADISTES ? par David Ekambi Dibonguè

Au-delà de ses perceptions politiques qui auraient été à l’origine de sa création dans sa terre natale du Nigéria, pays frère avec lequel le Kamerun entretient des relations multiformes, Boko Haram est bel et bien aujourd’hui un mouvement djihadiste. Le Djihad a été jusqu’à présent, une mouvance islamique n’ayant aucune prise dans notre nation. Et les fidèles musulmans kamerunais le répudient officiellement. D’où provient-il alors qu’un mouvement djihadiste dans son déroulement de violence, de meurtres et de sa volonté radicale de briser tout Etat laïc, une institution dans laquelle les Kamerunais dans leur majorité se reconnaissent, tout au moins, que ses actes sanguinaires et nihilistes puissent être assimilés ou confondus à des menées de déstabilisation politique endogène de certains de nos compatriotes ou exogène de l’impérialisme ?

Aujourd’hui et clairement, parfois avec ostentation : « Boko Haram représente des menaces sérieuses, non seulement pour la République fédérale du Nigéria mais également pour les pays voisins comme le Cameroun et le Niger. L’implantation de ce groupe pourrait en outre susciter des soutiens locaux, ce qui aurait pour effet de déstabiliser le contrôle politique que les Etats exercent sur leurs populations. Ensuite Boko Haram pourrait renforcer non seulement l’islamisme radical mais surtout les partisans de l’action armée au sein de l’islamisme radical. Et dans un pays comme le Cameroun, où il existe beaucoup de religions, çà pourrait entraîner des tensions interconfessionnelles, alors que le Cameroun est parvenu jusqu’ici à une gestion relativement satisfaisante des relations entre les confessions.» (1).
Ensuite, au-delà de ce fondamentalisme religieux insurrectionnel, Boko Haram affiche politiquement son farouche mépris pour l’Etat laïc. Ainsi par l’islamisation forcée, tout Etat doit être sous la charia. Concrètement Boko Haram, autant qu’Acqmi, le Mojao, Al-Shabbaab ou d’autres s’allient, tous, avec leur représentation faîtière, Al-Qaida, dirigée par les héritiers de Ben Laden. Le décor étant nettement planté, Boko Haram doit être combattu. Ainsi comme le dit Jean-Jacques Ekindi : « Cette guerre est une guerre totale. Boko Haram attaque les populations, les hommes, les femmes, les enfants, les institutions, les villages, les chefferies, les églises, les mosquées, les
commissariats, les gendarmeries, l’armée, les chrétiens, les musulmans, les Nigérians, les Nigériens, les Tchadiens, les Camerounais, les étrangers, le Nord du Cameroun, et si la secte le peut un jour, elle attaquera également le Sud. C’est la raison pour laquelle tous ceux qui sont attaqués doivent se défendre et s’organiser pour livrer une guerre totale à Boko Haram. Ce n’est pas la guerre du chef de l’Etat Paul Biya, ce n’est pas la guerre du gouvernement, ce n’est pas la guerre de l’armée, ce n’est pas la guerre des nordistes, ce n’est pas la guerre des chrétiens ou des musulmans, c’est la guerre de tous contre Boko Haram.» (2).
Luttes politiques et déstabilisation djihadiste.
C’est malheureusement à Paris que Paul Biya a officiellement déclaré la guerre à Boko Haram. Et récemment, il vient de réorganiser notre dispositif de défense et de lutte contre Boko Haram. Mais avant la ratification de ces nouvelles dispositions militaires, la voix de Paul Biya était largement attendue, surtout après l’attaque de Kolofata. Lorsqu’il s’exprima, enfin, Paul Biya déclara : « le Cameroun a eu à traverser beaucoup d’épreuves. On a eu à lutter contre ce même Nigéria pour Bakassi et avant, on a éradiqué les maquis (des mouvements révolutionnaires), on est venu à bout des villes mortes ; ce n’est pas le Boko Haram qui va dépasser le Cameroun. Nous continuons le combat et nous vaincrons. » Aussitôt de sérieux compatriotes ont fait largement des analyses de ces propos. Sûrement pour calmer le jeu, face à l’adversité que le peuple kamerunais, tout entier, devrait affronter, ils ont vu dans ces propos autre chose.
Woungly Massaga estime que : «voulant présenter son régime en régime stable tel un rocher contre lequel toutes les vagues se sont brisées, la « langue de bois » de son parti l’a conduit à des maladresses.» (3). Ou pour le Pr. Claude Abe : « ça fait désordre parce que ce sont des assimilations abjectes qui n’auraient pas dû avoir lieu si le président avait été véritablement bien conseillé. A mon avis, cela traduit un déficit d’expertise de la part de ceux qui sont des conseillers en communication du président.» (4). Effectivement dans le livre « Pour le libéralisme communautaire », Paul Biya a déclaré : « Je tiens à le rappeler ici : l’Histoire du Cameroun ne commence pas en 1960, avec l’Indépendance. Et comment fut-elle donc acquise, cette indépendance ? Elle ne fut point ni « donnée » ni « octroyée » aux Camerounais. L’indépendance de notre pays fut conquise de haute lutte par de nombreux et dignes enfants issus de ce terroir et dont les noms sont, hélas, restés tabous pendant le quart de siècle qui vient de s’écouler.
L’Indépendance de notre pays fut arrachée au colonisateur à travers des luttes acharnées, menées par toutes sortes de moyens et de stratégies imaginées par des combattants qui avaient tous comme dénominateur commun la nationalité camerounaise.»(5). Et il va reprendre, à l’occasion du cinquantenaire de l’indépendance un discours similaire où, il rappellera que : « souvenons-nous qu’avant l’indépendance certains en avaient rêvé, ont combattu pour l’obtenir et y ont sacrifié leur vie. Notre peuple devra leur être reconnaissant ». (6).
Non, Paul Biya n’exprime aucune maladresse, plutôt, il confirme, effectivement que le fameux livre « Pour le libéralisme communautaire », n’est pas son œuvre. Ce qui a été pendant longtemps murmuré dans les chaumières. Et que même ces discours, il en demeure si étranger. Par contre ce n’est point son entourage qui le conseille mal, et heureusement que cela été dit en mondo vision, c’est plutôt un réactionnaire notoire et un antipatriote sanguinaire qui n’a exprimé que sa réelle nature.
Même les « mains tendues » et les multiples déclarations des politiques kamerunais pour s’associer à lui pour une réflexion nationale de la lutte contre Boko Haram, Paul Biya va les ignorer royalement, comme à son habitude. Néanmoins, pour nous, progressistes ou révolutionnaires kamerunais, la direction et l’orientation judicieuse de la lutte contre Boko Haram ne se dispute pas avec Paul Biya. Et à l’occasion de cette guerre contre Boko Haram, nous tous, devrions demeurer véritablement patriotes. Mais, cette guerre ne sera jamais confondue avec notre combat inébranlable pour la libération totale du Kamerun contre tout despotisme, le pillage et la corruption d’un potentat local et ses affidés ou l’exploitation éhontée de nos richesses par l’impérialisme.
La volonté de la domination du Monde est un vieux souci des Nations à travers des idéologies ou des religions. Après la chute du Mur de Berlin, l’ancienne bipolarité du Monde brisée a laissé entre les Nations du Monde, l’unicité arrogante du capitalisme américano-occidental. Seule l’émergence de Ben Laden et Al-Qaïda a tenté de remettre en cause cet état de fait. Qu’Al-Qaïda soit, peut-être, l’émanation des forces obscures occidentales ou américaines, ne change en rien, le caractère de l’irruption dans les relations politiques internationales, de cette nouvelle force orientale qui remet en question la violence de la volonté de la pensée unique américano-occidentale. Pendant un moment, Ben Laden et Al Qaïda apparaissaient pour les damnés de la terre - le Tiers-Monde- qui subissaient le monde capitaliste sauvage américano-
occidental, sans résistance particulière, comme un Zorro… Mais, aussitôt, la même volonté séculaire dominatrice du Monde refait surface : l’islamisation forcée du Monde par le djihad. Ainsi à l’orée d’Al-Qaïda d’autres émules vont apparaitre, parfois avec plus de violence. Aujourd’hui, les djihadistes deviennent une menace pour plusieurs Etats laïcs et même les Etats musulmans du Monde. Et même ceux qui n’ont rien à voir dans l’affrontement Occident-Orient.
En Afrique, l’éradication des djihadistes algériens, l’assassinat de Mouammar Kadhafi et l’éparpillement de son lourd arsenal militaire ont permis d’armer facilement de nombreux groupes djihadistes jadis inconnus en Afrique sub-saharienne. Ces groupes djihadistes essaiment et menacent plusieurs Etats sub-sahariens aujourd’hui : la Somalie, l’Egypte, la Tunisie, le Kenya, la Libye, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Nigéria, le Tchad, la République Centre Africaine et enfin le Kamerun. En attendant, peut-être, de pénétrer dans l’Afrique équatoriale (Congo, RDC, etc.) et en Afrique australe (Angola, Mozambique, Zimbabwe, Afrique du Sud etc.).
Il est vrai, hier et aujourd’hui encore plus, que partout où existent d’importantes réserves de minerais, leur « odeur » attire, comme des fauves, divers mercenaires impérialistes, à l’instar du golfe de Guinée. Certes, les adeptes du djihadisme en Afrique peuvent aussi être de collusion avec les dangereuses visées des impérialistes. Mais reconnaissons le, en Afrique le meilleur terreau des adeptes du djihadisme est une répartition très inégalitaire de la richesse nationale, la misère endémique, les pillages et la corruption, la violence politique d’Etat, la mauvaise gouvernance, etc…
Alors, il est ahurissant de la part de certains patriotes de penser, sûrement pour d’autres motivations, aux ennemis intérieurs, ou bien aux « élites » du Rdpc qui veulent affaiblir Paul Biya ou permettre à l’impérialisme de pouvoir facilement remplacer le potentat kamerunais. Personne n’ignore les luttes féroces souterraines qui minent le Rdpc. Situation par ailleurs ensemencée par le potentat lui-même, qui a résolument cadenassé la démocratie au Kamerun. Même son départ par n’importe quelle méthode, loin de préoccuper les patriotes progressistes ou révolutionnaires, doit plutôt nous questionner sur l’état actuel de notre organisation ainsi que sur les conditions devant nous permettre de capitaliser une telle opportunité.
Néanmoins, les kamerunais anti patriotes qui serviront objectivement ou subjectivement Boko Haram dans sa guerre injuste et archaïque contre notre pays, chaque citoyen au besoin et au moment opportun rendra compte à la nation.
Même en reconnaissant Paul Biya, de par la Constitution, comme le garant de l’intégrité du territoire kamerunais, aucune lutte socio-politique saine pour la conquête ou le contrôle du pouvoir politique d’Etat et pour l’instauration de meilleures conditions d’existence pour nos compatriotes ne saurait être mise en veilleuse au Kamerun.
1- Anthony Lattier, Mathias Owona Nguini : « Boko Haram représente des menaces sérieuses ». In Le Messager n° 4082. Mercredi 21 mai 2014. P, 7. Source RFI
2- Jean-Jacques Ekindi, La guerre contre Bokom Haram, l’escalade. L’œil du Sahel. N° 624 du lundi 4 août 2014. P-P, 10 et 11
3- Ngouo Woungly Massaga, Nouvelle lettre aux Camerounais. Le Messager n° 4144. Mercredi 20 août 2014. P, 8
4- Joseph Flavien Kankeu, Pr. Claude Abe : « Le régime en place est en déficit de confiance ». Le Messager n° 4139. P, 9
5- Paul Biya, Pour le libéralisme communautaire. Pierre Marcel. ABC. P-P, 151 et 152
6-Paul Biya, « L’année 2010 sera pour le Cameroun du cinquantenaire de l’indépendance». In Cameroon Tribune du 04 janvier 2010. P, 2
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