Chers frères et
soeurs, Ce petit mot m’a été inspiré par la recrudescence des débats à
connotation ethnique sur les fora de la diaspora camerounaise, et le rôle délètere
que jouent certains intellectuels camerounais dans l’exaspération de la fibre
tribale; et ce, sans considération aucune des conséquences potentielles sur construction de la jeune nation qui est la nôtre. Le but de mon propos est d’essayer
sur ces lignes de recentrer le débat autour de cette hydre - le tribalisme -
qui a fini par régenter pratiquement tous les aspects de notre quotidien.
A force de tout
expliquer, l’alibi ‘‘ tribal ‘‘ a fini par défier toute explication et réduit
les discours politique, économique et social a un ramassis de formules dont le
seul but est de plaire, soi aux ressortissants d’une aire géographique spécifique,
ou alors à ceux qui détiennent les rênes du pouvoir. A force de tout expliquer,
l’alibi ‘‘ tribal ‘‘ a réussi à asservir et à pousser l’intellectuel
camerounais à des compromis bancals pour des raisons de survie; l’a rendu
incapable de porter la contradiction au régime en place. à force de tout
expliquer, l’alibi ‘‘ tribal ‘‘ a réussi à détourner l’attention de tout un
pays des véritables problèmes qui le minent. Et cette deviation lorsqu’elle n’a
pas été orchestrée par le système en place a été tacitement acceptée par des
instances politiques qui ells-mêmes surfent sur l’exacerbation de la fibre ‘‘
ethnique ‘‘ pour conserver les rênes du pouvoir. Force est de constater que les
objectifs du pouvoir sont largement atteints, voire dépassés, étant donné que
la partie la plus vocale de notre intelligentsia fonctionne avec la certitude
de défendre la tribu contre des supposés ennemis; défense au nom de laquelle
tous les dérapages sont permis, identité tribale oblige. Ce genre de
comportement met en relief le fait que les dimensions éthiques et morales de
leurs actions sont en totale contradiction avec la casquette d’intellectuels qu’ils
‘‘revendiquent’‘.
Dans un des
fora de la diaspora auquel je contribue, en l’occurrence ‘‘Cameroon Politics’‘,
j’ai eu le déplaisir de lire des sorties de personnes pourtant éduquées qui,
dans la défense de leurs communautés respectives, ou dans l’analyse de la
situation politique et sociale du Cameroun, refusent catégoriquement à d’autres
leur humanité et leur dignité. J’interpelle ici M. Patrice Nganang et ceux qui
comme lui, font de la surenchère du tribal leur fond de commerce.
M. Patrice
Nganang. L’intellectuel est supposé oeuvrer à l’avènement d’une société plus
juste et plus humaine. Une humanité qui doit être respectée et protégée quelque
soit l’environnement et les conditions dans lesquelles il - l’intellectuel -
est appelé à intervenir. Je me sens malheureusement dans l’obligation, cher frère,
de vous dire la peine que j’éprouve à vous lire dans les réseaux sociaux. Vos
prises de positions ne devraient pas être en contradiction avec d’autres
exigences essentielles concernant le bien-être de ceux que vous prétendez défendre,
telles que, leur sécurité et leur épanouissement quelque soit l’endroit où ils
sont établis. La lecture de vos écrits sur les réseaux sociaux nous met face à
des contradiction très inquiétantes, contradictions qui remettent en question
la pertinence même de votre oeuvre littéraire, et l’efficacité de vos actions
de militant des droits humains et civiques.
M. Nganang,
vouz avez souvent fait un magnifique travail d’éveilleur de conscience. Mais vous
êtes parfois aussi le premier à pourfendre vos propres positions de part vos
inconsistences. Il est très facile d’allumer la mèche de la critique, mais tres
difficile d’en contrôler les flammes. Je m’identifie au groupe ethinique Beti,
et au groupe ethnique Bamoun. Mon épouse est Bamoun, d’ascendence Bamiléké. Mon
feu père a fait la prefectorale et de ce fait, a eu à exercer dans différentes
régions du Cameroun. Ma petite expérience de la vie au contact des différentes
peuplades que j’ai eu l’honneur de rencontrer m’a enseigné à apprécier la
diversité et la richesse que regorge notre pays. Il nous revient d’en profiter
pour construire une nation forte et prospère, fondée sur le respect des uns et
des autres; l’appropriation de nos différences, non pas pour stigmatiser
certains groupes ethniques pour leur accointance supposée à la mauvaise gestion
de la chose publique au Cameroun, mais plutôt pour valoriser ce qui fait de
chaque groupe et individu une entité et un être unique, enrichissant ainsi
qualitativement nos vies, et surtout élevant l’art discursif dans nos échanges.
M. Nganang.
Comment se fait-il qu’un jeune homme aussi talentieux que vous verse dans la
fange et en devient même la personnification? L’exemplarité de la tragédie
rwandaise ou l’Allemagne de Goebbels - ou incidemment vous avez étudié - n’ont
apparemment pas marqué de façon profonde et durable votre conscience.
Permettez-moi de vous dire, cher frère, que vous êtes politiquement incorrect.
Si votre but était de jeter la lumière sur l’ethinicisation/tribalisation à
outrance de notre société, alors, je pense que vous avez raté le coche parce
que vous faites desormais partie du problème. Vous êtes devenu un intellectuel
pyromane. Ne soyez donc pas étonné que vous attirez les foudres des critiques
pour avoir offert une justification intellectuelle aux éructations de certains
frères camerounais incapables d’analyse critique sur les réseaux sociaux. Les
agissements de ces derniers seront un jour mis à votre compte. Si votre
approche de la satire de la société camerounaise consiste à faire scandale en
choisissant de mettre en scène des situations potentiellement explosives comme
le procès et l’exécution sur la place publique de ceux que vous considérez
comme étant responsables des malheurs du Cameroun, et leurs épouses et enfants,
alors je vous conseille de faire très attention car vous risquez d’être surpris
par ceux qui seront assis aux premières loges, et vous risquerez vous-même d’être
jugé par les mêmes instances car, l’incitation à la haine tribale n’est pas
moins hideuse que les détournements de deniers publics.
Mr. Nganang.
Quiconque se dit intellectuel doit accepter les responsabilités qui vont avec l’aura
d’intellectuel. Vous vous définissez vous-même comme un écrivain. A ce titre,
vous êtes un éducateur de masse. Vous n’êtes donc pas sans savoir que l’esprit
est un objet à la fois beau et fragile. Que l’esprit est un ressort propre à
augmenter la force de la vertu comme celle du vice. Les idées et concepts,
contrairement aux objets physiques sont très difficiles à tuer ou a déconstruire.
C’est sur des idées que sont construites les sociétés dans lesquelles vous
vivez et avez vécu pendant au moins les quinze dernières années - si je me refère
à vos propres écrits - sociétés que vous admirez au demeurant. De ce fait,
empoisonner les esprits avec des idées cancéreuses et cancérigènes comme l’apologie
du tribalisme sème la confusion dans les esprits des plus faibles, et aliènent
ceux qui ne sont pas dotés des mêmes capacités d’analyse et cognitives que
vous; et pour lesquels l’interprétation à la lettre de vos écrits, contruits
sur votre rhétorique tribale, pourrait déboucher sur des situations
potentiellement explosives voire dramatiques. Ce qui constitue un frein dans
nos efforts de développement et d’intégration, a moins que vous ne prôniiez la
séparation pure et simple de votre communauté du reste du Cameroun.
Mr. Nganang.
Vous vous comportez comme si vous étiez le seul Camerounais à avoir des griefs
contre le régime en place à Yaoundé; comme si vous étiez le seul à pouvoir décrire
ou décrypter les maux dont souffre notre pays le Cameroun. Personnellement, je
m’inscris en faux contre ce genre d’inepties! On peut être un auteur aux points
de vue tranchés sans pour autant être irresponsable et inconséquent. L’écrivain
que vous êtes devrait faire très attention car il risque de déclencher une révolution
qui à terme lui échappera lorsque la surenchère du tribal montrera son hideux
visage.
M. Nganang.
Relever les maux dont souffre la société est une chose. Construire une société ‘‘fonctionelle’‘,
une société meilleure sur la base d’une construction idéologique en est une
autre. Les deux éléments cités plus haut participent de la construction de ce
Cameroun apaisé et fraternel que nous appelons tous de nos voeux. Je dois vous
reconnaître la volonté et l’audace d’attaquer le premier point, celui de la dénonciation,
bien que je ne partage pas vos méthodes. Ceci parce que vous remettez en
question la volonté de vivre-ensemble qui pourtant fait la force et la fierté
de nos compatriotes, toutes ethnies confondues, et participe de la construction
de cette société idéale vers laquelle nous voulons aller. Malheureusement, en
posant mal les termes de l’équation que collectivement nous sommes appelés à résoudre,
vous faussez le débat à la base. Dans le cas d’espèce, M. Nganang, vous
reveillez les instincts primaires qui sommeillent en chacun d’entre nous.
Tapisser toute votre argumentation d’attaques tribales, et très souvent ad
hominem ne fait qu’aggraver les maux que nous voulons tous combattre. Il
revient donc à ceux d’entre nous qui peuvent lire l’implicite, voir l’invisible;
ceux d’entre nous comme M. Nganang qui sont habiles dans l’art de l’écriture,
de penser une nouvelle société et disséminer ces idées autour d’eux au lieu de
devenir des chantres de la haine ethnique et tribale.
Le problème du
tribalisme peut être approché de façon moins conflictuelle que certains ne le
font. Je n’insinue pas que l’on doive éviter le sujet. Un proverbe Beti dit
fort opportunément: ‘‘ O buri, ya man bè u yani, ya man kot (si vous cachez, ça
pourrit ; si vous exposez, ça sèche). ‘‘ Le pourri renvoyant à la mort; le sec à
la longévité. La force et l’habileté de l’homme de sciences ou de l’écrivain
que vous êtes M. Nganang se mesurent par conséquent dans son habileté à
conserver les acquis et à poser les problèmes sociétaux de manière à inciter à
la réflexion, et au bout du compte à la résolution de ces problèmes. L’intellectuel
devrait être la voix des sans-voix. L’intellectuel devrait porter la contradiction
à ceux qui considèrent que les tribus/ethnies sont vouées aux conflits et que
les ressortissants d’aires géographiques différentes sont incapables de vivre
et de travailler ensemble, ou d’échanger avec leurs compatriotes porteurs de
points de vue et d’opinons différents et parlant des idiomes différents; au
lieu de porter aux extrêmes la contradiction et finalement rompre le consensus
social. C’est ici que nos hommes de lettres et spécialistes en sciences
sociales et juridiques devraient jouer le rôle qui leur échoit: guider et aider
la société à panser ses blessures et à se re-inventer au lieu de jouer les
intellectuels organiques, de réserve, ou encore des intellectuels pyromanes.
M. Nganang.
Utiliser la haine tribale comme fond de commerce peut être bénéfique sur le
court terme. Mais, dans le long terme, vous aurez à répondre de vos actes. Je
me demande comment vous entrevoyez une société camerounaise post-Biya
construite sur la haine du groupe ethnique Beti ou Fang-Bulu comme aime à le
dire le doyen Nouk Bassomb, avec Yaoundé pour capitale. Vous qui êtes écrivain,
pourriez-vous nous pondre un opuscule nous narrant le fonctionnement d’une
telle société. Je serai le premier à en acheter copie.
Merci de me
lire.
Alain Gaetan
Njimoluh Anyouzoa, PhD.Redmond, WA – USA
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