Depuis la déferlante des Appels des militants et des élites du Rdpc, au nom du " peuple ", exhortant Paul Biya à accepter de se porter candidat pour un énième mandat présidentiel et à procéder à une élection présidentielle anticipée, avec à la clé une modification de la constitution, d'autres voix s'élèvent dans la nation pour s'y opposer.Clairement, Paul Biya est au centre de toute cette animation (1) ; puisqu'il avait trouvé un Kamerun qui se portait bien, selon ses déclarations. On assiste aujourd'hui au spectacle d'un pays calamiteux. Dès lors, pour Biya, il vaut mieux mourir au pouvoir, plutôt que de se voir subir, la vindicte populaire à l'instar de certains de ses congénères. Ainsi ceux qui interpellent la lucidité (2) de Biya, se moquent d'eux-mêmes. Seule une modification, très significative, des rapports de forces socio politiques, à leur défaveur, peut faire reculer Paul Biya et ses créatures.
Néanmoins, aujourd'hui ou demain, Paul Biya et ses affidés, auront à rendre compte aux kamerunais. Qu'ils s'inspirent du destin sinistre des Généraux chefs d'Etat tortionnaires, criminels et pillards latino-américains et même de quelques dirigeants africains déchus !
Au Kamerun, les " Appels " pour une candidature d'un président en exercice de ne point délaisser le pouvoir ne sont pas nouveaux. Au temps du dictateur-sanguinaire Ahmadou Ahidjo, ceux qui ont un certain âge aujourd'hui se rappellent du fameux : " J'accepte ". Et en politique, dans une vraie démocratie, ces " appels " passeraient pratiquement inaperçus. Mais : " Ce parti (Rdpc), dont les militants sont les auteurs, même par procuration des appels et des motions à Paul Biya, a entamé au lendemain de sa création en 1985, sa réorganisation lente mais continue en parti unique, à l'instar de l'Union Camerounaise, son grand-père et de l'Union Nationale Camerounaise, son père. Paul Biya qui est passé par ces deux moules idéologiques, n'a pas su se muer en habile démocrate, en dépit de l'environnement mondial ouvert une pluralité réelle et non de façade. Il a au contraire, reconstitué progressivement le Rdpc en parti unique, fragilisant les autres formations, ou les appelant à se fondre dans le sien avant de les aider à disparaitre. " (3).
Ainsi, réellement les Kamerunais nationalistes ou progressistes après avoir lutté pendant plus de deux décennies, après l'indépendance nominale contre la dictature d'Ahidjo, se sont retrouvés dans une autre dictature molle, mais très perverse.
Hier la peur d'une disparition subite par la police politique secrète de M. Fochivé, faisait taire les velléités des derniers " subversifs ". Ainsi, certains s'enrôlaient dans les rangs de l'Unc, d'autres compatriotes choisissaient l'exil et quelques rares se muraient dans la clandestinité politique. Aujourd'hui, où : " on n'a plus besoin d'aller au maquis pour exprimer ses opinions ", le bâton d'hier a, malheureusement, muté. Aidé par toutes les précarités possibles engendrées par le pillage massif et éhonté et une démocratisation politique
fausse, Paul Biya a fait d'une grande partie d'une génération de Kamerunais des eunuques. A telle enseigne que, malgré la répression socio politique brutale et meurtrière d'hier, Ahidjo a laissé un pays florissant où les citoyens étaient fiers d'être Kamerunais. Aujourd'hui la majorité des compatriotes veulent se vendre eux-mêmes, par opportunisme matériel, j'allais dire montrent volontairement " leur derrière ". Excusez l'expression. A telle enseigne que : " vous (Paul Biya) n'avez mis en place que ces " créatures " qui chantent vos louanges en longueur de journée ; Toutes ces " créatures " disent qu'aucune d'elle n'est capable de gouverner le Cameroun. Né pour être Chef d'Etat ; elles pensent que si vous n'êtes plus Président de la République, le soleil ne se lèvera plus au Cameroun, l'air que nous respirons ne rentrera plus dans nos poumons, le ciel tombera sur le Cameroun " (4).
Il n'y a qu'à écouter, certains concitoyens, disons matures, nantis de diplômes et même, pétris d'expérience, c'est ahurissant. Parmi ceux-ci, le Pr Messanga Nyamding dit : " L'appel à candidature est donc une forme d'allégeance et de reconnaissance tournée vers le chef que nous voulons voir rempiler parce que quelque part nous avons peur. N'avons-nous pas le droit d'avoir peur ? Quand vous voyez les manipulations qui existent, les clans qui sont visibles, on ne se fait plus confiance entre ceux qui sont dans les loges et les homosexuels. Les réseaux se sont accaparés l' Etat à tous les niveaux. Certains parlent abusivement de la fin d'un régime. Quand vous voyez la neutralisation du projet présidentiel : pas d'eau, pas d'électricité et tous ces problèmes d'énergie, vous vous rendez compte qu'on a besoin de Paul Biya pour régler tout cela. Quand on est biyaïste, quand on voit que certains aux côtés du président défendent d'abord leurs intérêts, toutes les personnes qui s'agitent-là ne sont pas forcément pour le président " Et M. Messanga conclut : " Si Paul Biya dit non ce sera une catastrophe pour nous les biyaistes. Il nous mettrait en difficulté avec les grands méchants loups qui ont déjà tout organisé pour eux. " (5)
C'est dommage pour cette génération de compatriotes, des créatures de Paul Biya et enfin des eunuques. Hier Ahmadou Ahidjo devint président de la néo colonie à 36 ans. Paul Biya lui-même accède à la magistrature suprême à 49 ans Comment se fait-il, qu'aujourd'hui la plupart de ces créatures, bien matures et bien diplômés ne peuvent que se cacher derrière un vieil homme, pour se sentir en sécurité. Et ils se cachent de qui et de quoi ? Des grands loups méchants! Dixit M. Messanga. Mais qui a laissé prospérer ces grands loups méchants, ces homosexuels, ces prévaricateurs de la fortune publique ? M. Biya.
En vérité, tous ces compatriotes par pur opportunisme, ne supportent Biya que pour attendre leur tour pour s'agripper à la mangeoire, en délaissant comme ces grands loups méchants, l'intérêt des masses populaires. Puisque lui-même Biya ne s'en soucie guère
Pourquoi Paul Biya dira : "J'accepte" !
Aujourd'hui le Kamerun est un large fleuve de larmes et de misère charrié par le régime Biya., où le taux de pauvreté atteint 40 % de la population. La corruption généralisée n'a plus de rang dans l'alignement des Institutions nationales et étrangères spécialisées. Le climat des affaires demeure plombé. Le Conseil constitutionnel annoncé depuis 19 ans, n'est toujours pas mis en place. Le budget d'investissement public est toujours sous-utilisé. Même l'émergence en 2035 sera comme le fameux slogan : "santé pour tous en l'an 2000 ".
Sur la question des droits et des libertés démocratiques, le sociologue Claude Abé concluait sur : " un constat d'un recul énorme de l'ouverture des Camerounais de ce qu'ils avaient acquis de haute lutte en 1990 : les lois sur les libertés publiques. Selon que vous êtes avec ou contre le pouvoir, on vous donnera ou on vous refusera la possibilité de jouir de ces libertés. Il me semble que c'est un recul énorme de la démocratie et du processus de libéralisation dans notre pays." (6). Et Jean Michel Nintcheu enfin s'interrogeait : " On voit mal comment l'inversion de la situation désespérante des Camerounais pourrait être atteinte durant le reste du bail de M. Biya à la tête de l'Etat, puisqu'il va continuer ce qui n'a pas marché en 33 ans de règne. " (7)
M. Paul Biya sait tout cela mieux que quiconque. Son discours de fin d'année 2013 en était la meilleure illustration. Et M. Biya connait, mieux, ce qui l'attend si jamais il perdait le pouvoir d'Etat. Suivez notre regard... Car, de son vivant, surtout au Kamerun, Paul Biya ne pourra survivre qu'en s'agrippant au pouvoir.
Ainsi, Paul Biya est le chef d'orchestre de cette malheureuse et triste symphonie des " Appels ". N'en déplaise à ces créatures ou aux naïfs.
A cela, Jean Michel Nintcheu, conclut : " En cherchant à faire du forcing à la tête de l'Etat et en refusant obstinément que soit mis sur pied le Conseil constitutionnel, (...), qui est extrêmement important dans les mécanismes de dévolution du pouvoir politique, M. Biya souhaite que cette impasse dégénère en chaos pour assouvir ses dessins inavoués. Et c'est en cela qu'il sera le principal comptable de la désintégration de notre unité nationale, de son vivant ou à titre posthume. " (8)
Alors, Paul Biya dira : " J'accepte ".
QUELLE REPONSE POUR L'OPPOSITION ?
La grande interrogation est ce que peut l'Opposition politique au-delà des mises en garde ? Nous savons que la menace de M. John Fru Ndi contre une élection présidentielle anticipée(9), fait rigoler plus d'un Kamerunais ! Mais ceux qui, comme Maurice kamto veut affronter Biya (10) , même dans une élection anticipée se leurrent. A moins que cela soit dit à dessein, pour l'accompagner et se targuer d'être 2ème ou 3ème d'une élection où des chiffres sont manipulés. On s'en sortira avec 2% ou 5%. Et de se proclamer, plus tard être la 2ème ou 3ème personnalité politique de la République, avec
des chiffres fabriqués et médiocres. Et Paul Biya se glorifiera de demeurer au pouvoir autant d'années, comme : " celui qui peut et non celui qui veut".
Par contre, il est mieux de continuer à réclamer un code électoral digne d'une nation engagée dans la modernité politique. Car comme le reconnaissait, le transfuge du Rdpc, Albert Dzongang, qui voudrait encore repartir au parti des flammes : " En l'état actuel des choses, je le redis, quel que soit le candidat du Rdpc, il est assuré de gagner avec le concours d'Elecam, de l'administration, des hommes d'affaires, des forces de l'ordre et , surtout du code électoral. " (11)
En l'état actuel, entre le Rdpc, ses alliés et l'Opposition, le rapport de forces est largement défavorable aux forces de l'Opposition. Car en l'absence d'un retour significatif des masses populaires dans la scène politique, l'opposition aura trop de difficultés à affronter avec succès "l'Homme lion". Alice Sadio, présidente de l'Alliance des Forces Progressistes (Afp) résume clairement, cela : " La seule arme qui nous reste c'est le peuple souverain. Nous n'avons ni la soldatesque ni les institutions avec nous. Mais rien ne peut arrêter un peuple qui exprime son ras-le-bol (...) "(12). Sinon, cette Opposition s'arrêtera, seulement, aux mises en garde !
En fait pour le Kamerun de demain ; ce qui importe n'est plus Paul Biya, mais comment s'assurer qu'après Biya, le pouvoir politique d'Etat n'échappe plus aux Nationalistes et aux Progressistes !
1- Georges Alain Boyomo, Présidentielle anticipée. Mbombo Njoya, messager de Paul Biya. Mutations. No 4103. Vendredi 11 mars 2016. P, 4
2- Objectif Changement. Déclaration du Front Progressiste Panafricaniste et le Collectif des Patriotes panafricanistes. No 23 février 2016
3- Xavier Messe, Nous sommes en parti unique. Mutation. No 4080. Lundi 08 février 2016. P, 3
4-Prosper Nkou Mvondo, Contre-appel. A Paul Biya, président de la République. Mutations. No 4097. Jeudi 03 mars 2016. P, 15
5- Linus Pascal Fouda, Pr Ch. Messanga Nyamding : " S'il nous dit non... il nous met en difficultés avec les méchants loups ". Signatures no04. Du mardi 23 février 2016. P, 6
6- Guy Hyacinthe Owona, Claude Abé : " Un recul énorme de la démocratie ". Mutations. No 4055. Lundi 04 janvier 2016. P, 8
7- Jean Michel Nintcheu, " Un Président pris en étau entre l'anxiété, le désespoir et l'aveu d'échec ". le jour no 2094 du lundi 04 janvier 2016. P, 11
- Jean Michel Nintcheu, Ibd
9- Donat Suffo, Appel à l'élection présidentielle anticipée. John Fru Ndi brandit une menace à Paul Biya. Le Messager no4512. Mercredi 10 février 2016. P,6
10 - Théodore Tchopa, Maurice kamto candidat en 2018. Le jour no 2118 du vendredi 05 février 2016. P, 8
11- Alain Njipou, Albert Dzongang, " N'importe quel candidat du Rdpc est sûr de gagner une présidentielle ". Le Messager no 4523. Vendredi 28 janvier 2016. P-P, 5, 6, 7.
12- Assongmo Necdem, Les états-majors se préparent contre la présidentielle anticipée. Le jour no 2139 du mardi 08 mars 2016. P, 2
Par David EKAMBI DIBONGUE
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