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Le franc CFA en toute franchise par Engelbert Essomba Bengono

La vieille monnaie de 77 ans semble se porter comme un sou neuf dans le coeur des africains pour qui elle a été créée. Pourtant, des voix s'élèvent qui affirment que même pour un sou rouillé, les populations africaines n'en voudraient plus. Et pour cause : le CFA coute cher, il est rare, il est trop rigide et ne permet pas de développer les Etats africains qui l'ont pourtant adopté sans hésiter dès les indépendances.

Au demeurant, ajoutent-ils, il y a trois CFA : celui d'Afrique de l'ouest géré par la banque centrale des Etats de l'Afrique de l'ouest (BCEAO), celui de l'Afrique centrale géré par la banque des Etats de l'Afrique centrale (BEAC) et le CFA de la banque de France dont les soldes sont enregistrés dans les livres du Trésor français pour garantir la convertibilité des deux premiers sur les marchés de change. Pire ! Les deux CFA africains ne sont pas interchangeables.

Malgré les assurances données la semaine dernière par le Gouverneur de la BEAC, l'arrimage égal des deux CFA n'est pas pour demain. Pourtant, les raisons avancées sont valables : lutte contre le blanchiment, lutte contre la contrefaçon monétaire et assèchement des réseaux criminels. Les raisons économiques semblent plus fortes. En effet, qui peut accepter en zone UEMOA de jouer la solidarité monétaire avec la RCA où il n'y a plus d'Etat depuis plus de cinq ans ?

La RCA qui atteint les basfonds de la décroissance avec des taux de PIB atteignant des niveaux démentiels de -33% ? La RCA, le seul boulet économique de la zone franc.

Des solutions sont donc avancées ici et là, pour faire face au problème monétaire qui serait, selon certains, la source du sous développement de nos Etats. Mis à part la lecture idéologique du CFA actuel qui n'est que la fille du franc des colonies françaises d'Afrique, nous pouvons constater qu'aucun des experts qui recommandent la sortie de la zone franc n'a encore dit exactement ce qui arrivera le jour où on sort. Autant aucun Etat n'a tenté la sortie, autant les experts sont formels sur l'incertitude du lendemain.

De telle sorte que sortir de la zone franc apparait comme un saut vers l'inconnue monétaire pour ceux qui ont la charge de gouverner nos états. Tous s'en accommodent donc, jeunes ou vieux chefs d'Etats par pur pragmatisme, par juste et compréhensible prudence. La sagesse même.

Parmi les solutions les plus hardies au problème monétaire, il y a celle de ceux qui suggèrent une expérience monétaire hybride et qui proposent de développer à côté du CFA actuel, des monnaies secondaires n'ayant cours légal qu'à l'intérieur des Etats, pour acheter et vendre des produits et des services estampillés d'origine nationale. Dans un contexte national marqué par la contrefaçon, la falsification et la malfaçon, on voit d'ici, le ghetto monétaire et matériel dans lequel on veut confiner nos concitoyens.

Si cette solution était adoptée, il y aurait deux univers marchands : un univers pour les produits importés ou étrangers où le CFA serait en vigueur, puis un deuxième univers de produits locaux où la monnaie secondaire serait en vigueur. Connaissant notre grande capacité d'organisation, nous pouvons garantir d'ici, un beau charivari monétaire qui posera plus de problèmes et ne développera pas davantage le pays. Je passe, à tort, sur les problèmes d'harmonisation fiscale qu'un tel système va créer. Je passe également sur le fait que cette monnaie secondaire ne tirera existence et valeur que du CFA par ailleurs critiqué. Ironie du sort !

Integration.org : Engelbert Essomba Bengono, Suppléant De Député RDPC
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