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LE REGNE DU FAUX MAQUIS: A PROPOS DE LAPIRO ET ATEBA EYENE par Patrice Nganang

Je suis à Yaoundé et je vois la même chose. Eh oui, il parait que ces 28 et 29 mars, les restes de Lapiro de Mbanga sont (aussi) en train d'être remis aux cieux quelque part. Dans la tyrannie la plus vieille d'Afrique, le Cameroun, 'le peuple', on nous dira, 'spontanément s'est choisi un héro national', et c'est Charles Ateba Eyene celui-là. Aux dernières nouvelles dans ce pays nommé Cameroun, Lapiro faisait plutôt la une des journaux qui l'accusaient d'avoir couché avec sa propre fille mineure, ces journaux l'accusaient d'avoir, je ne sais plus trop fait quoi, Lapiro qui, avait pourtant passé toutes les instances juridiques de la terre qui avaient déclaré son incarcération sans objet. Excellente que cette vie sienne qui était calquée sur celle de Fela à qui à sa mort des funérailles nationales avaient été données au Nigeria - au stade! Dans ce pays dans lequel lors de son discours de fin d'années, et lors de tous ses discours, le tyran parle comme s'il était Ni John Fru Ndi à propos de son propre bilan catastrophique, accuse le RDPC, accuse les Camerounais, accuse les gens au pouvoir, accuse tout le monde sauf bien sur lui-même (pour cause d’article 53 qui le recouvre d’immunité absolue), le règne du faux maquis s'est installé. Il consiste en ceci: détruire systématiquement le caractère de ceux qui sont justement les critiques du régime, et élever à leur place les clones de la tyrannie c'est-à-dire ceux qui n'accusent jamais le 'chef de l'Etat', qui accusent plutôt ses collaborateurs de tous les mots, qui trouvent des exutoires au 'président de la république' pour ses incapacités mais vouent aux gémonies 'les sectes' (alors que lui-même est dans plusieurs), ou alors bien sûr, 'les pédés.'

J'ai lu que lorsque les gens (ils n'étaient bien évidemment pas des 'casseurs', noooon, mais 'le peuple'!) qui marchaient derrière le convoi d'Ateba Eyene passaient devant le ministère de Moukoko Mbonjo, ils criaient: 'pédé! pédé! pédé!' Bref, il s'agit d'accuser toute autre personne que le président, et surtout ses collaborateurs, mais bien sûr d'anéantir toute figure critique afin de donner l'illusion que devant le tyran il n'y a rien - nihil, nichts - puis, de substituer à ceux figures néantisées des clones du tyran. Double geste dont l'un est d'anéantissement, et le second de triangulation. Voila résumé ce qui se passe au Cameroun de nos jours avec l'élévation d'un scribe et la vaporation d'un chanteur critique, et que quiconque a des yeux pour voir voit - les medias de ce pays sont très faibles, parce que justement ils n'ont pas d'argent (de publicitaires), et parce que les voix critiques ont été chassées du pays depuis belles lurettes - les Achille Mbembe, les Célestin Monga, bien sûr les... Lapiro. Cette fabrication du néant critique a trouvé son visage dans la triangulation de medias comme 'Le Messager', devenu l'ombre de lui-même, car voyez-vous, même le prix Njawe n'existe plus, et son dernier récipiendaire c'était... Paul Biya. Et nous nous rappelons encore les funérailles de Njawe justement au cours desquelles pratiquement une bagarre eut lieu et Célestin Monga fut chassé de la scène publique camerounaise avec son oraison funèbre en poche. Le règne du faux maquis a une bien vieille histoire dans notre pays - datant de ces moments au cours desquels la Guerre civile était chaude. Eh bien, de 1960-1970, des groupes de jeunes étaient montés pour jouer au maquis, habillés comme tel, arme au poing, arrêtés, et présentés aux medias comme des... maquisards. Ils faisaient comme des maquisards, infiltraient le maquis, mais n'étaient pas des maquisards.
Tactique nazie, bien évidemment, dont le maitre penseurs derrière un sinistre Kame, étaient les Français, comme on dit, et le maitre d’oeuvre surtout un certain Semengué. Car la manipulation de l'opinion est un art qui a sa fabrique la plus vieille dans notre pays. Devant nos yeux, elle vient d'avoir lieu avec la néantisation de Lapiro de Mbanga. Evidemment on dira que c'est lui qui 'a choisi de s'exiler' (quand les Charles Ateba Eyene 'se battaient sur le terrain'); on dira que c'est lui qui a choisi de se faire incinérer (quand 'le peuple' se passait le cadavre de Charles Ateba Eyene de main en main et l'élevait au rang de 'héros national'), on l'accusera même d'être lui-même la cause de son cancer quand 'regardez Charles Ateba Eyene, il a été tué parce qu'il critiquait Biya' qui ‘n’a pas pu lui trouver 2 millions !’ Evidemment on dira que publier une vingtaine d'albums à succès planétaire, et passer trois quatre ans en prison pour rien, n'est rien devant éditer ses livres à compte d'auteur, livres lus seulement au Cameroun, être membre du comité central du RDPC et bavarder dans des radios et télés. On dira que trente ans de carrière à partir de la rue de battant n'est rien devant 'critiquer le pouvoir en étant de la tribu du président'. On dira que Lapiro était déjà vieux, à 56 ans, quand l'autre était un jeune a 46 ans ou quelques. On dira que d'ailleurs même, Lapiro avait 'vendu le peuple', quand l'autre n'a 'jamais trahi le peuple', lui qui était bien ancien de l’auto-défense sanguinaire, membre du comité central du RDPC et ami intime du général Semengué qui, lui, de son propre aveu coupait les têtes aux Camerounais de 1960-1970 et a présidé ses funérailles. On dira beaucoup de choses, mais le faux maquis se sera révélé dans sa double tactique: néantisation de la critique et triangulation des voix qui pensent justement l'alternative à la tyrannie. Mais surtout le pinacle: substituer le peuple par des clones.
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