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Pour l’abolition de la justice militaire au Cameroun par ENOH MEYOMESSE

L’inculpation tout récemment de trois journalistes par un juge d’ins-truction du tribunal militaire est venue reposer la question du maintien de cette justice - à savoir la justice militaire - d’un autre temps au Cameroun.
 
La justice militaire, il importe de le rappeler, est utilisée au Cameroun comme justice politique, qui dit la politique, et non le droit. C’est à celle-ci que sont dirigés, depuis l’indépendance, tous les procès politiques qu’a connus le Cameroun :
1/- le procès du député upéciste Owono Mimboé en 1960, tribunal militaire ;

2/-le procès des quatre députés en 1962, Okala Charles, Eyidi Bebey, Mayi Matip et Mbida André-Marie, tribunal militaire ;

3/- le procès de Mgr Ndongmo et Ouandié Ernest en 1970, tribunal militaire ;


4/- le procès d’Abel Eyinga, la même année, pour s’être porté candidat à l’élection présidentielle contre Ahidjo, tribunal militaire ;

5/- le procès d’Ahidjo, lui-même, en 1983, tribunal militaire ;

6/- le procès des putschistes de 1984, tribunal militaire ;

7/- le procès d’Ekané Anicet, Yondo Black, Ekwé Henriette, Jean Michel Tekam, en 1990, tribunal militaire ;

8/- le procès Enoh Meyomesse, en 2012, tribunal militaire ;

9/- actuellement, le procès des trois journalistes qui n’auraient pas communiqué des informations dont ils disposeraient et qui se rapporteraient à la « sécurité de l’Etat ». Quelle grosse expression !!! Délit de « non délation ». Voilà ce dont ils sont accusés.

Bref, on se retrouve en plein dans le régime d’Ahidjo qui avait transformé les citoyens camerounais en zélés délateurs. Il fallait dénoncer son voisin pour des choses vraies comme fausses, afin d’obtenir des promotions dans l’administration publique et la politique …

Il faut abolir cette justice d’un autre temps.
Faudrait-il rappeler que le Cameroun est actuellement l’un des derniers pays au monde à recourir aux tribunaux militaires pour juger ses citoyens ? Quelle honteuse distinction que celle-là, qui ne fait nullement honneur à notre pays. En France, en Angleterre, en Espagne, en Italie, au Portugal, en Suisse, etc., il y a longtemps que ces tribunaux ont été abolis. Les tribunaux normaux, c’est-à-dire civils, sont les seuls à rendre des jugements, y compris pour les questions de violations, par les soldats, de leur règlement. Mieux encore, d’où vient-il que des militaires se mettent à juger des civils, alors que nous ne nous trouvons guère dans un régime militaire ? Est-ce normal ?

Cette justice pose du reste un problème anachronique de taille. Dès lors qu’il existe des tribunaux militaires, une cour d’appel militaire - où, sur les quatre juges déjà, il n’y a plus que deux militaires, le procureur, qui prend ici le nom de « commissaire du gouvernement », et un assesseur, à savoir un colonel qui vient faire de la figuration -, pourquoi dans le même temps il n’existe guère de Cour suprême militaire ni un Conseil supérieur de la magistrature militaire ? Cela n’a pas de sens ? De même, pourquoi des magistrats militaires et pas des avocats et des huissiers militaires ? Anachronisme.


En 1960, c’est Jean-Baptiste Mabaya, ministre des Forces Armées, qui avait obtenu la condamnation du député Owono Mimboé. En 1962, ce fut Sadou Daoudou, pour les quatre députés. En 1970, ce fut encore lui pour Ernest Ouandié et Mgr Ngongmo, puis Abel Eyinga. En 1983, ce fut Gilbert Andzé Tsoungui, pour Ahmadou Ahidjo, puis en 1984, pour les putschistes. En 1990, ce fut Meva’a m’Eboutou, pour Ekané Anicet. En 2012, ce fut Mebe Ngo’o pour Enoh Meyomesse. C’est lui qui vient d’obtenir également l’inculpation des trois journalistes. De Mabaya Jean-Baptiste à Mebe Ngo’o, en passant par Andze Tsoungui et Meva’a m’Eboutou, qui parmi eux est simplement magistrat de formation ? (A suivre)
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