L’action publique mise en mouvement contre moi pour détournement de deniers publics, prétendument mis à jour par les Vérificateurs du Contrôle Supérieur de l’État, vient de connaître son aboutissement avec le verdict rendu le 18 juin 2015 par le Tribunal Criminel Spécial à savoir : (i) une condamnation à vie par contumace, (2) une condamnation à verser à l’Etat du Cameroun la somme de 5,8 milliards de francs CFA au titre de dommages et intérêts et, (3) la déchéance de mes droits civiques à vie. Ce lourd verdict dont l’objectif inavoué est m’éliminer de la scène politique camerounaise voire m’éliminer tout court était attendu après les réquisitions du Ministère Public lors de l’audience du 28 avril 2015.
L’action publique qui vient d’être conduite à son terme a été mise en mouvement à la suite d’une lettre début 2009 de l’Ex- Ministre Délégué à la Présidence chargé du Contrôle Supérieur de l’État (Mr ETAME MASSOMA) au Ministre de la Justice et dans laquelle il demandait formellement interpellation. Au regard du droit positif camerounais, la saisine du Ministre de la Justice par Mr ETAME MASSOMA constituait un grave vice de procédure en ce sens que, sauf cas de flagrant délit, les Ordonnateurs et Gestionnaires de Crédits Publics sont justiciables devant le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière. C’est à cette instance qu’il revient de saisir la Justice pour les faits qualifiés à l’examen crimes ou délits et seule cette saisine vaut plainte au nom l’État. Faut-il le relever, le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière n’a jamais statué sur mon cas, nonobstant les hautes directives de Monsieur le Président de la République par lettre B135/SG/PR du 26 juillet 2012. Et, très paradoxalement, je me suis retrouvé poursuivi concomitamment devant le TCS et le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière, une situation totalement inédite.
Avant de rendre le verdict, Mr YAP ABDOU, Président du TCS m’a accusé de m’être livré à des « diatribes dans les journaux ». Tout en me refusant de rentrer dans une polémique sans objet contre l’intéressé que je classais hier encore parmi mes amis, je voudrais souligner que ces propos montrent bien à quel point ce Haut Magistrat est soumis aux influences extérieures, en violation des dispositions de l’article 310 N°2005/007 27 Juillet 2005 portant Code de Procédure Pénale prescrivant aux Juges de faire preuve d’indépendance et d’impartialité. Je voudrais tout simplement attirer son attention sur le fait que, aux termes de l’article 10 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, « Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ». Or, il se trouve que le Code de Procédure Pénale Camerounais, très peu soucieux des droits de la défense et de la manifestation de la vérité, n’autorise pas l’Avocat du prévenu absent à prendre la parole (article 349). C’est la raison pour laquelle j’ai jugé opportun voire vital d’adresser au Président du TCS, par exploit d’Huissier, une note datée du 09 juin 2015. Largement motivée et accompagnée de trois documents dont la sentence rendue par la Cour Arbitrale (CCI de Paris) dans l’affaire État du Cameroun c/ UDECTO, cette note de récusation ne saurait être qualifiée de « diatribes ». À aucun moment, dans cette note par ailleurs rendue publique, je ne me suis livré à des insultes et/ou des attaques personnelles contre les Magistrats ou le Procureur du TCS. J’ai tout simplement usé de mon droit en soulevant l’exception d’incompétence et en motivant ma position.
Dans le fond, le verdict du le TCS, défie toute logique, le droit et les faits. Pour un Cameroun qui se proclame État de droit, c’est une véritable catastrophe. En effet, le jugement du TCS piétine les Résolutions pertinentes de l’Union Interparlementaire qui a dépêché déjà au Cameroun deux missions pour mon cas et, en même temps, il conforte les critiques des partenaires de notre pays au sujet de l’insécurité juridique et judiciaire au Cameroun. Enfin, ce jugement inique rendu par la Collégialité enlève toute crédibilité au TCS en ce sens qu’il constitue un déni de justice flagrant. Il ne peut s’analyser que comme la mise en forme judiciaire d’une décision politique tant la vacuité des accusations mises à ma charge est manifeste. Je voudrais donc pouvoir continuer à compter sur le soutien de toutes les personnes éprises de paix et de justice, qu’elles soient de nationalité camerounaise ou non pour mener à bien, et malgré de nombreux écueils, le combat vital dont l’objectif principal est de de pouvoir être rétabli à terme dans mes droits, ma dignité et mon honorabilité.
L’'indépendance de la Magistrature est garante de l'État de droit, du respect des droits fondamentaux de l'Homme, de la cohésion sociale et de la paix, toutes choses qui sont des préalables pour le développement durable auquel aspire légitimement notre pays, le Cameroun. Dans cette perspective, s’il est un chantier qui se présente comme une priorité pour l’émergence voulue en 2035, c’est bien le secteur judiciaire sans lequel toute gouvernance est congénitalement vouée à l’échec. /-
Dieudonné Ambassa Zang
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