Si ailleurs, le pouvoir a pour finalité la faculté de se mettre au service de son peuple, en Afrique la notion de pouvoir est très curieuse. Le pouvoir est avant tout un instrument au service d’un individu ou d’un clan. Les dirigeants s’y s’accrochent même s’ils n’ont plus les capacités physiques et intellectuelles pour son exercice effectif. Plusieurs grands malades sont maintenus artificiellement à la tête de certains Etats Africains sans possibilité de diriger effectivement le pays qui, dans la plupart des cas est géré par procuration par un membre du clan. Cette situation dure malheureusement depuis plusieurs décennies.
Un saut dans le passé nous renseigne sur les cas les plus pathétiques de l’histoire de notre continent. Tout le monde se rappelle de l’ancien président Tunisien Habib Bourguiba, longtemps malade et affaibli et qui était maintenu à la tête de l’Etat Tunisien par un entourage qui n’entend pas céder les privilèges qu’il tire de la proximité avec les cercles du pouvoir. Cette situation a duré plusieurs années jusqu’au jour où Ben Ali a décidé de déposer M. Bourguiba et de s’emparer du pouvoir qu’il a su confisquer jusqu’à l’avènement du printemps arabe qui a soufflé son régime.
L’autre cas pitoyable nous est venu de la Guinée Conakry avec le président Lansana Conte qui a tenu à briguer un ultime mandat présidentiel alors qu’il était rongé par la maladie. Chacun de nous se rappelle de la campagne présidentielle de cette époque qu’il a menée étant toujours assis dans sa voiture. Pire, il avait déclaré à ce moment qu’il y avait toujours des gens qui feront la campagne pour lui et voteront pour lui, même s’il reste assis comme c’est le cas.
Et ironie de l’histoire, cette année là, il avait exercé son droit de vote dans sa voiture ne pouvant pas se retrouver dans son bureau de vote pour cause de maladie. Malgré sa victoire, il n’a pas pu aller au bout de son mandat, parce que décédé entre temps. De nos jours, c’est l’actualité algérienne qui met en évidence cette curieuse conception du pouvoir à l’africaine. Le président Abdelaziz Bouteflika, âgé de 79 ans et malade depuis plusieurs années a déposé sa candidature pour un quatrième mandat à la tête de l’Etat. Tout le monde est unanime qu’il n’a plus été vu en public depuis plusieurs mois et qu’il est sur une chaise roulante. Comment un tel chef peut encore être maintenu à la tête d’un Etat qui aspire à l’émergence ?
L’aveuglement criminel des membres de l’entourage du président algérien a pour but de maintenir ce chef malade et diminuer pour qu’il continue à gouverner à travers lui. Même le milieu des affaires est perturbé par la candidature d’Abdelaziz Bouteflika. Pour preuve, c’est à main levée que le vote pour le soutien de sa candidature a été effectué lors des assises du forum des chefs d’entreprises algériens le 8 avril 2014. Reconnaissons également que l’impuissance politique des oppositions africaines conforte ces entourages des dirigeants africains dans leur conviction pour le pouvoir perpétuel de leur champion.
Désormais, il faudrait que le Africains commencent à être sérieux et patriotes, parce que le développement passe par la bonne gouvernance et aucune gouvernance ne peut être bonne si à la tête de l’Etat, le dirigeant a perdu ses facultés physiques ou intellectuelles. L’Union Africaine (UA) de son côté devra commencer à regarder un certain nombre de pratiques qui se passent en Afrique et qui sont des facteurs de blocages de notre émergence collective. Nous disons oui à la non ingérence dans les affaires internes des Etats africains, mais non à l’indifférence parce qu’aucun Etat ne se gouverne par procuration.
Souvenons nous qu’en 1982, les amis politiques du président Ahmadou Ahidjo avaient tout fait pour le dissuader de sa ferme décision de démissionner de la tête de l’Etat. Sa position est restée catégorique: «je n’accepterai jamais de gouverner par procuration ». Sage décision tout de même !
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire
Laissez nous un commentaire sur cet opinion.