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LUTTE CONTRE BOKO HARAM: CE QUE LE CAMEROUN ATTEND D’IDRISS DÉBY par William Bayiha

L’axe Yaoundé-N’Djamena se structure cinq jours après le sommet de Paris. Le président tchadien  été reçu à Yaoundé par Paul Biya ce 22 mai 2014.

Lorsque le chef de l’Etat accueille Idriss Déby à sa descente d’avion à l’aéroport international de Yaoundé-Nsimalen, il sait que son interlocuteur aura son mot à dire dans la stratégie sous régionale imaginée à Paris pour endiguer la menace Boko Haram. Même si le Tchad n’a encore officiellement essuyé aucun acte violent sur son sol, la proximité du pays avec le Nigéria et le Cameroun en fait un excellent trait d’union pour les assaillants. Un corridor que les «terroristes» emprunteraient pour se ravitailler en armes comme l’a laissé entendre indirectement François Hollande lors de la conférence de presse de clôture du sommet du 17 mai dernier.

Pour le président français en effet, «ce groupe terroriste est armé avec des moyens lourds». Des moyens que les membres de la secte peuvent désormais utiliser «grâce à une formation dispensée quand le Mali était sous occupation terroriste». D’un point de vue opérationnel, la même source affirme que «les armes pour beaucoup viennent de Libye». Or entre la Libye et les régions septentrionales du Cameroun et du Nigéria, le chemin le plus direct c’est le territoire tchadien. A la décharge du pouvoir de N’djamena, l’Etat tchadien n’a pas les moyens de mettre une brigade de gendarmerie sur chaque centimètre carré d’un territoire qui représente presque trois fois la superficie du Cameroun avec en sus de vastes étendues désertiques.
Mais Idriss Déby n’est pas n’importe qui au Tchad. On sait déjà qu’il en est l’homme fort depuis décembre 1990. Cette position lui permet d’avoir la haute main sur les services de renseignements de son pays. Son aide est donc capitale – comme celle de ses homologues camerounais, nigérians, nigériens, béninois et occidentaux – pour pouvoir coordonner les informations sur Boko Haram au niveau sous-régional. La présence du chef de l’Etat tchadien au Cameroun dans le contexte actuel tient tout aussi, selon une terminologie empruntée à l’anthropologue Paul Abouna, au «Pouvoir de l’ethnie».   
L’homme est en effet Zaghawa. Un puissant groupe ethnique réputé être au cœur des réseaux commerciaux triangulaires entre le Tchad, le Sud Soudan et la Libye. Toute chose étant égale par ailleurs, le président Déby devrait pouvoir s’appuyer sur ce réseau communautaire pour mieux traquer et isoler la menace asymétrique que représente la secte nigériane.
 
L’homme de guerre
 
La référence de François Hollande au Mali à la fin du sommet de samedi n’est pas gratuite. La chute du régime libyen en 2011 semble en effet avoir ouvert la porte aux mouvements terroristes à vocation salafiste. En témoigne la multiplication des attentats suicides au Nigéria tel que celui perpétré le 18 mai dernier à Kano, dans le nord du Nigéria. Un attentat à la voiture piégée. Un mode opératoire qui rappelle qu’en octobre 2013, des salafistes faisaient également sauter des voitures à Tessalit au nord du Mali et attaquaient les positions des soldats tchadiens en laissant au moins deux morts derrière eux.
N’Djamena sait donc déjà la nature de la menace que représente désormais Boko Haram dans la sous-région. Et l’expérience de ses 2 000 hommes engagés au Mali n’est pas mince. Ce sont en effet les colonnes tchadiennes qui ont réussi à libérer la ville de Kidal de l’emprise des djihadjistes qui en avait fait leur capitale. L’armée tchadienne a  pourtant d’autres atouts. Elle est l’une des mieux équipées de la région et ses troupes sont habituées aux combats en région sahélienne et aride.
Autant Paul Biya espère l’engagement du chef de guerre Idriss Déby aux côtés du Cameroun pour cette croisade contre l’«ennemi commun»,  autant il devrait se souvenir du rôle joué par l’armée tchadienne en Centrafrique. Mais il serait étonnant que les deux hommes se soient attardés sur cet aspect de la question. Pendant les 60 minutes durant lesquelles s’est déroulé l’entretien, les rapports économiques entre les deux pays n’ont a contrario pas pu être évités.
Après l’attaque de Kousseri du 05 mai 2014 le pont N’Gueli qui relie les deux pays a été fermé à la circulation par les gendarmes camerounais. Quant on sait que le port de Douala est la principale porte d’entrée des produits vers le Tchad, il n’est pas risqué de souligner que la croissance de l’insécurité dans la région de l’Extrême Nord a des effets directs dans la vie économique de N’Djamena et même au-delà.
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