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Le «panafricanisme» houphouétiste contre l’Afrique résistante ou dix réponses d’un Kamerunais à Guillaume Soro, président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire par Goni Waday

M. Soro à la suite de la visite que vous avez effectuée au Kamerun à la mi-juin 2014, nous vous adressons ces quelques réflexions sur divers points du discours arrogant que vous avez prononcé devant l’Assemblée nationale du Kamerun (et plus précisément ce qui en tient lieu). Ces rectifications serviront à édifier les millions de personnes qui peuvent se laisser tromper par votre discours volontiers amnésique ou totalement trompeur sur l’Histoire des résistances récentes contre l’oppression extérieure en Afrique. Nous souhaitons aussi et surtout qu’elles servent aux Ivoiriens électeurs et sympathisants d’Alassane Ouattara qui se demandent : mais pourquoi nombre de Kamerunais ont-ils autant mêlé leurs voix et actions pour soutenir Laurent Gbagbo ? C’est la condition inévitable pour ouvrir devant nos deux pays les chemins de l’indépendance dans une Afrique apaisée où il fera bon vivre. 



1.- Votre propos commence par une expression de défi : « Me voici donc à Yaoundé… » Vous qui déclarez connaître le Kamerun devriez savoir que c’est ainsi que Paul Biya défiait le brave peuple de Douala-la-rebelle, qui réclamait la fin de la dictature et la justice sociale, lors d’une visite à Douala en 1991. Nous ne ferons donc pas plus de commentaires. 

2.- Il est hypocrite, comme vous le faites, de poser et d’éviter de répondre à la question de savoir si 1944, année de la conférence de Brazzaville durant laquelle vous prétendez que Houphouët-Boigny a fait preuve d’une « hauteur de vues », a été un moment « fondateur d’une décolonisation réussie » ou le « simple signe annonciateur d’un long et difficile processus d’émancipation de notre continent ». C’est bien en ce moment-là que la France a préparé une manière de partir en restant à travers des gens comme Houphouët-Boigny, penseur et chantre de la Françafrique. Si la plupart des politiciens ivoiriens ne s’attaquent pas à cette icône de la Françafrique, c’est une démarche tactique pour éviter de choquer l’Ivoirien mal informé, qui tient Houphouët-Boigny pour modèle. 


3.- Vous déclarez encore : « Les faits sont là et ils sont têtus : les pays occidentaux, pendant des siècles, ont privé nos populations de la maîtrise de leur destin. » Vous ne croyez pas si bien dire puisque vous êtes l’expression actuelle, à la demande d’Alassane Ouattara soutenu par la fameuse communauté internationale (en réalité l’Occident prédateur depuis le temps de la traite négrière), de la perversion de la volonté des Africains de revivre en paix chez eux. 

4.- Vous avez encore écrit : « Je vous épargnerai le rappel du triste cortège de crimes et autres violations des droits fondamentaux de la personne humaine, qui ont marqué au fer rouge de l’infamie, l’histoire de la colonisation comme celle de notre libération. Mais une chose est certaine : aucun pays n’est fier d’avoir été colonisé et, par voie de conséquence, aucun de nos pays ne devrait se glorifier d’avoir été le plus terrorisé des pays colonisés ! » Cette allusion, si elle s’adresse aux Kamerunais qui ont rappelé au monde entier que c’est sur leur terre que la Françafrique est formellement née dans le sang et le drame, est perfide. Oui, la Françafrique est née au Kamerun ! Nous n’en avons pas tiré motif de fierté car personne (sauf les houphouétistes) ne peut penser qu’un tel drame soit nécessaire pour parvenir à l’indépendance que nous recherchons toujours. Oui le Kamerun, de toutes les colonies françaises a le plus subi le terrorisme de vos maîtres de Paris, Londres et Washington. Nous n’en sommes ni heureux, ni fiers mais nul n’a le droit de nous interdire d’en parler. Nous ne nous en glorifions pas car nous ne sommes pas de ces Africains prêts à toutes les manipulations pour accéder au pouvoir. Nous ne nous en glorifions pas car le combat n’est pas terminé. Nous ne nous en glorifions pas car on ne se construit pas sur l’instrumentalisation du sacrifice de ses ancêtres. PERSONNE ne pourra cependant nous empêcher de saluer et de célébrer éternellement notre Histoire de résistance et de combat qui fait peur à vos officines médiatiques (Radio France Internationale, etc.) célébrant naturellement Ahmadou Ahidjo et Houphouët-Boigny, mais jamais Um Nyobè et ses vénérables compagnons. 

5.- Nous sommes encore médusés quand votre naturel revient au galop, là où vous vouliez nous tromper en vous présentant comme un écolier qui a compris que l’Afrique a un destin commun. C’est ce qui découle de la phrase suivante : « En revanche, il est clair qu’une réflexion concertée sur les séquelles de la colonisation ne peut être que bénéfique, car l’impact négatif sur notre culture ancestrale, notre modèle économique et notre tissu social n’a pas revêtu la même forme dans nos différents pays. » Nous attendons impatiemment, la démonstration que vous souhaitez. Nous serons toutefois curieux de savoir quelles différences fondamentales existent entre nos pays du fait négatif de la colonisation. 


6.- Vous avez encore déclaré : « Pour autant, les leaders Africains, nos valeureux devanciers ont intellectuellement réagi contre la colonisation par la doctrine dite du panafricanisme, union des révoltés contre la domination, au nom du droit inaliénable qu'à tout peuple à disposer de lui-même. » Il est clair que le panafricanisme n’est pas votre tasse de thé car il prend sa source plus loin qu’à l’époque de l’Afrique colonisée. Le panafricanisme ce n’est pas d’abord l’union des dominés mais plutôt celle des Africains conscients de l’impérieuse obligation de l’Union des peuples noirs. Voilà pourquoi, évidemment, tout houphouétiste est un ADVERSAIRE FORCENE du panafricanisme. Redisons le donc : l’houphouétisme, c’est la balkanisation masquée de l’Afrique. Houphouët-Boigny c’est l’adversaire de Kwamé Nkrumah et de la démarche unitaire du groupe de Casablanca (1960-1963). Houphouët-Boigny c’est celui qui a milité pour le maintien d’une Afrique divisée en bantoustans, pseudo-Etats indépendants, sous les auspices des occidentaux. Houphouët-Boigny, c’est l’homme de Monrovia (capitale anglo-saxo-françafricaine) contre l’unité africaine. C’est pour cela que parmi vos devanciers, il n’y a eu que des démarches égoïstes et néocoloniales qui ont trouvé leur modèle achevé en Côte d’Ivoire, sous la direction de Houphouët-Boigny. La confusion volontaire que vous avez créée ici, à dessein, en raison et en réaction au soutien local (Kamerun) d’organisations panafricanistes à Laurent Gbagbo, prépare le terrain à la désinformation, cela se comprend aisément. 


7.- « Il faut donc poser aux panafricanismes africains des questions qui visent droit au cœur de la dignité humaine en péril dans tout combat politique. On découvre alors que seul vaut un panafricanisme de projet, d’inclusion et de solidarité concrètes, alors que la pire des choses qui puisse nous arriver, c’est la confiscation du thème panafricaniste par les imposteurs du national-chauvinisme. La haine de l’Occident devient, pour bon nombre d’entre eux, une manière de déguiser leur mépris de la liberté et de la justice entre les Africains eux-mêmes », dites vous encore. 

Mais apprenez M. Soro, que le panafricanisme n’a pas autant de variantes que vous voulez le faire croire. L’expression de cette pensée politique puissante ne peut pas être comprise autrement que comme une démarche positive, en réponse à vos maîtres. Il est donc ahurissant que ceux qui ont choisi de mordre le sein maternel mettent en accusation les panafricanistes « imposteurs » qui doivent légitimement se demander : mais pourquoi en parle-t-il autant ? Qu’ont fait les panafricanistes contre le régime d’Alassane Dramane Ouattara pour devoir subir autant d’attaques d’un rebelle à motivation soi-disant ethnique et en réalité mafieuse ? Si d’aventure les panafricanistes kamerunais se sont trompés en refusant la guerre imposée à la Côte d’Ivoire depuis que M. Gbagbo est arrivé au pouvoir, alors, il est grand temps d’ouvrir, sur la place publique, le procès de ces aveugles. Au lieu d’aller, dans une Assemblée pleine de feymen (comme les brouteurs d’Abidjan), de corrompus, de receleurs et d’élus issus du bourrage monstre des urnes, porter des accusations sans possibilité d’être contesté et pour que la Vérité jaillisse. 


8.- M. Soro a encore clamé : «être admiratif » devant le Kamerun, car il « vient d’un pays […] qui s’est divisé lui-même et ne peut s’en prendre qu’à lui et à lui seul, pour s’être trouvé dans cette situation de partition. » « Si on le (la Côte d’Ivoire) compare au Cameroun, que d’autres, les colons, ont divisé contre son gré et qui, malgré tout, est parvenu de son propre chef, à reconstituer son unité et à reconstruire son identité ?! », on peut être fier assure M. Soro. 

Honte à vous ! lui répondons-nous. Honte à vous qui tronquez et défigurez l’Histoire pour masquer des crimes imprescriptibles et inoubliables. Honte à vous car dans ce pays Kamerun, les menées de vos complices français (qui sont les premiers responsables survivants avec MM. Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara du drame ivoirien) ont autant traumatisé le Kamerun que l’Afrique résistante. Honte à vous car chacun sait qu’au Kamerun, l’unité nationale est menacée chaque jour par la même politique ethniciste voulue par les agents coloniaux successifs depuis Houphouët-Boigny et Ahmadou Ahidjo. Chacun sait qu’ici, l’irrédentisme du Southern Kamerun (régions anglophones) a atteint son paroxysme en raison de la gestion françafricaine (tournée résolument vers la satisfaction des intérêts étrangers) de notre pauvre pays. Honte à vous M. Soro car tout le monde sait au Kamerun combien l’Histoire est faussée et les héros de la Nation méprisés et insultés par ceux-là mêmes qui les ont assassinés. Cette « reconstruction » de l’identité kamerunaise, que vous voyez dans vos rêves, l’on présume que vous voulez la reproduire en Côte d’Ivoire, même si l’Histoire en marche vous a déjà montré que vous êtes sur la mauvaise voie. Entre harkis kamerunais et patriotes kamerunais comme entre harkis et patriotes ivoiriens, on est loin de la réconciliation qui passe par la Vérité et la justice. 


9.- C’est ici que notre propos prend un ton ferme et indigné de vous entendre associer votre lutte injuste contre le régime Gbagbo (quelques fautes qu’on puisse lui reprocher) à celle de Ruben Um Nyobe. APPRENEZ M. SORO QU’IL Y A DES INSULTES QU’ON N’OUBLIE PAS. Votre phrase suivante : « Comme Ruben Um Nyobè, Félix Moumié, et bien d’autres, furent rebelles contre le colonialisme français ici même au Cameroun, je le suis devenu ! » en est une. Même soutenu et couvert par la coalition internationale contre l’Afrique, vous devrez un jour être sanctionné pour cette offense inqualifiable tant elle est osée et distingue la morgue d’un esprit malhonnête et méprisant. 

Votre parti pris pour le mensonge est ici tellement flagrant et diaboliquement intelligent que le premier militant nationaliste venu verra que vous avez omis de citer le nom d’Ernest Ouandié à la suite de Um et Moumié. Et pour cause, Ouandié est le dernier chef de la guerre d’indépendance menée par le peuple kamerunais sous la direction de l’Union des populations du Cameroun (UPC). C’est normal que vous évitiez ce nom. Il n’a pas été tué directement par les Français comme Um et Moumié. C’est bien la soldatesque d’Ahmadou Ahidjo, ersatz d’Houphouët-Boigny affecté à la néocolonisation de l’Afrique centrale et notamment le Kamerun, qui a assassiné Ernest Ouandié. On comprend aisément que vous évitiez ce nom qui vous poserait tant de problèmes face à une Assemblée nationale pleine de harkis kamerunais qui a applaudi à l’assassinat de Ouandié. On comprend que de mèche avec vos prétendus hôtes, en réalité vos complices contre l’Afrique, vous avez tu ce meurtre odieux qui montre les limites déjà ténues de votre hommage du vice à la vertu. Croyez-moi, pour éviter de tomber dans ce travers inévitable, vous n’avez pas d’autres choix que d’accepter la vérité. Vous devriez d’ailleurs méditer sur cette phrase célèbre du camarade Emile (Ouandié) : « La Vérité voyage sans passeport. » Avec ou sans manipulation françafricaine, vous voilà pris, en effet, dans les filets de la Vérité de l’histoire kamerunaise avec laquelle vous avez tenté quelque arrangement cosmétique et pervers. Ici comme en Côte d’Ivoire, la Vérité se sait et se saura toujours. 


10.- Oui M. Soro, la Vérité sur la crise ivoirienne, nous la connaissons tous. Depuis ses fondements anciens dans le choix anti-africain de Houphouët-Boigny, malgré le mirage de réussite économique de la Côte d’Ivoire. Nous la connaissons dans son évolution avec la création de l’ivoirité, version affolée d’un houphouétisme dépassé par les mauvaises performances économiques d’un pays engagé sur la voie de la servitude du capitalisme français : les Ivoiriens et les Africains produisant ou se faisant voler des matières brutes que l’occident transforme pour son plus grand bonheur, l’essentiel de la richesse étant dégagée et retenue par cette transformation. Oui M. Soro, c’est quand la Côte d’Ivoire, vitrine brumeuse de la Françafrique s’est réveillée, son modèle de développement étant craquelé et moribond, que la folie des houphouétistes a imaginé l’ivoirité pour chasser le plus grand nombre de prétendants au partage d’un gâteau démesurément gonflé par le levain de l’exploitation injuste du paysannat. Sinon, comment expliquer que le fameux miracle économique ivoirien soit rapidement devenu un mirage au point qu’Houphouët-Boigny, une fois la crise économique des années 1980 arrivée, a été traité de « voleur » par des Ivoiriens désabusés ? Nous patriotes Kamerunais, savons bien que Houphouët-Boigny, malgré les conseils d’un Joseph Tchundjang Pouemi invité par lui-même à se pencher sur l’économie de votre pays pour lui proposer des solutions d’avenir, a REFUSE de reconnaître à son pays le droit à l’émancipation économique et à l’émancipation tout court. Nous vous invitons à relire le chapitre du livre de Tchundjang Pouemi, « Monnaie, servitude et liberté… », consacré à la Côte d’Ivoire. Il est intitulé : CHOISIR. Hier du temps de la colonisation, comme aujourd’hui où votre régime démontre qu’il peut rééditer, avec ses promesses de miracle économique après une élection présidentielle sous influence néfaste des Nations unies (les mêmes qui ont organisé la néocolonisation du Kamerun), les coups fumants d’Houphouët-Boigny, il est toujours temps de faire le choix d’une Côte d’Ivoire de justice -où l’on ne fabrique pas des complots contre les adversaires (depuis le temps d’Houphouët-Boigny) et contre le peuple (avec la révolte armée téléguidée par M. Ouattara). Il sera toujours temps de dire qu’on n’a pas besoin de milliers de morts pour qu’UN seul individu (M. Ouattara) soit président.

C’est alors seulement que se déroulera le vrai miracle : celui d’une Côte d’Ivoire unie sans arrière-pensée, sans cadavre dans le placard, sans dirigeant arrogant sûr du soutien de l’étranger, sans une presse aux propos haineux et rancuniers, sans miracle économique qui se transforme en cauchemar à la première épreuve. 

Goni Waday, presqu’à Libel li Ngoï (lieu du martyre de Ruben Um Nyobe)

goni.waday@gmail.com

Le 18 juin 2014
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