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Bienvenue à Nsimalen, Cameroun en miniature par Florian Nguimbis

Bienvenue à Nsimalen, Cameroun en miniature

A force d’emprunter les avions, je me suis mis à m’intéresser aux aéroports. Un aéroport est un lieu de vie qui la plupart du temps est le reflet quasi exact de la société qui l’abrite. A ce titre, j’ai observé les aéroports camerounais et ma foi… Bref, lisez plutôt.

Comme l’école primaire dont un décret proclame la gratuité, les aéroports camerounais ont leurs contradictions. Tenez ! Les chariots. Quand vous arrivez à Nsimalen, ne cédez surtout pas aux sourires racoleurs des opérateurs qui vous abordent : Mon frère ! Tu es frais comme l’igname ! ou Ho ! la go Paris te mérite, tu attendais quoi pour partir ? Des approches toujours sanctionnées par la même phrase : mets ton sac ici je t’accompagne. Sauf que rendus à l’enregistrement, le gars va te tendre la main, tu t’étonnes, il va te parler de « la vie qui est dure », de l’agrément qu’il paye aux ADC, bref, tu vas que payer. Un futur mbenguiste ne discute pas. Hein tara ? Mille francs pour toi c’est quoi même ? Ne gâte pas ton nom grand !

La magouille

Elle commence dès l’entrée avec cette histoire de kilos. Mon frère, vous allez où ? On a un problème de kilos excédentaires blablabla. Je me suis toujours fait la réflexion que transporter l’excédent de bagages d’un camerounais c’est comme bouffer des sushis chez un restaurateur chinois à Bamako. Cette opinion n’engage que moi.


Les débrouillards

Cette nouvelle race -créée par le Renouveau et les Grandes Ambitions- est aussi présente dans les aéroports camerounais. Ils vendent du crédit téléphonique (nos fameux call-boxeurs), vous abordent pour changer des devises. Un tuyau : vous pouvez boire des Castel à l’aéroport de Nsimalen ! Si ! si ! Les jeunes femmes que vous apercevez dehors et qui vous regardent droit dans les yeux n’attendent personne. Elles vendent des bouteilles de bière qu’elles trimballent dans des sacs à main. J’ai testé hein ? C’est pas beau ça ? Les impôts qui ne servent à rien Chez nous, on a la taxe dite d’aéroport dont je n’ai jamais compris l’utilité ni le sens. En effet, tous les passagers des vols internationaux sont astreints au payement de 10.000 francs avant d’embarquer dans un avion. Je me suis toujours demandé à quoi servait cet argent, dans quelle poche il rentrait. Si au moins on pouvait avoir la clim à ce prix !

 Les bureaucrates

Nos fameux fonctionnaires avec leurs airs importants qui font croire qu’ils servent à quelque chose. On les remarque à leurs valises neuves donnant plus l’impression d’un départ en vacances qu’une mission de routine et leurs vêtements d’hiver qui sont la preuve qu’ils consultent la météo avant de voyager. Parfois en traversant la première classe de certains vols Air France, je me dis que l’épervier au lieu de voleter au-dessus des sept collines de Yaoundé, devrait tout simplement prendre l’avion.

La joie

Les gens sont heureux de te voir partir : tu t’en va chercher les euros. Ils sont tout autant fiers de ton retour : tu ramènes les euros. J’adore cette foule dans les aérogares. A l’aller, c’est la famille, les amis, tout un fan club improvisé qui semble dire: Ma chérie, tu es l’espoir de tout le village, va de l’avant ! Photos. Dominant tout le monde, le Blanc, conquis sur Internet, rouge de son séjour à Kribi, ivre de plaisirs inaccessibles chez lui, assez bête pour croire que tous ces cousins à la mine renfrognée sont vraiment des cousins. La mère qui pleure, les regards envieux des soeurs, la fille, ex mouton noir qui prend sa revanche et rit fort pour masquer la peur de cet outre-mer dont elle ignore tout. Les flashes qui crépitent, une atmosphère de Cannes. Il y en pour toutes les sauces: aventuriers, étudiants, futurs Eto’o, futurs riens, tous sont adulés, parce qu’ils partent. L’avion devient plus qu’un moyen de transport, c’est l’ascenseur social. Il n’y a pas que l’aller, le retour aussi à ses ambiguïtés.

  Le carnet de vaccination

Avant même le passeport, le premier document exigé en terre camerounaise est ce carnet jaune qui prouve que vous êtes vacciné contre je ne sais quoi. « Bonne arrivée au royaume des moustiques, nous vérifions que vous n’êtes vacciné ni contre le paludisme ni contre le SIDA ». Un peu comme les policiers et la carte nationale d’identité sur nos axes routiers: Vous n’avez pas de ceinture de sécurité ? Tant pis, présentez vos cartes qu’on soit sûrs que vous mourrez en règle.

Les hommes habillés

Comme dans les rues de Yaoundé, dans les aéroports camerounais on croise des flics et militaires en grande tenue. Sauf qu’eux ne sont pas là pour le Vigipirate hein ? Nous on n’a(vait) pas de soucis avec les terroristes. C’est plutôt des soucis de douane. La douane au Cameroun, tu la paies si tu ne connais personne, du coup pour le trafic d’influence, rien de mieux que des galons dorés : le prestige de l’uniforme.

Il y a aussi cette foule, comme à Douala, qui observe les avions atterrir et décoller. Cette foule de jeunes qui n’attendent personne mais sont debout devant le hall d’embarquement à longueur de journée.

Avec dans les yeux cette envie de partir, cette envie de connaître un ailleurs meilleur, ils vous regardent quand vous embarquez, vous lorgnent quand vous débarquez, les yeux pleins d’étoiles, semblant se dire que làbas ne peut être pire qu’ici. Néanmoins il y a de la joie dans nos aéroports hein, rien à voir avec cette froideur de Paris Charles de Gaulle par exemple. Cette indifférence affectée. Chez nous ce sont des youyous à l’arrivée, un brouhaha de conversations au départ, les gosses qui courent dans tous les sens, les rires, la chaleur, le tutoiement spontané, les blagues grasses et épicées. Même dans un avion à destination du Cameroun, on est déjà au Cameroun. Et quand l’aéronef atterrit, on applaudit à tout rompre. Bah oui, dans un pays où personne ne fait correctement le travail pour lequel il est payé, on sait transformer la routine en miracle. Tu as fait atterrir cet avion ? Alléluia ! Mon commandant tu bois quoi ? Moi j’aurais répondu la Castel!, mais d’ici à ce que je pilote un avion de ligne.
Peace !


© kongossa.mondoblog.org : Florian Ngimbis 
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