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L’extrémisme tribal sans limites par Modeste BIKELE ATANGANA

Sa dernière livraison après 15 jours d’une mise en scène fort bruyante de sa posture de victime spéciale du régime « Beti-Biya » souligne la vacuité de son projet politique en nous livrant une tentative pathétique d’endoctrinement de deux officiers de gendarmerie.  Après avoir essaimé aux quatre coins du monde, espérant à coup d’outrances et d’injures coaliser la « communauté internationale » contre Paul Biya, si les agitateurs en sont à faire la danse du ventre à ses « militaires écervelés et sans couilles » il y a en effet de quoi désespérer Nkomkana.

Ma première surprise en le lisant a été d’apprendre sa proximité avec Anicet Ekane, véritable homme politique, dont je ne partage pas tous les points de vue mais pour qui j’ai beaucoup de respect, en raison précisément de sa maitrise des fondamentaux de la science politique. L’histoire politique de l’UPC et donc du Cameroun  a pourtant déjà démontré à Ekane que pendant que les uns se battaient par patriotisme, certains feignaient le patriotisme pour récupérer des exploitations de café et des champs de bananes. Mais après tout il faut de tout pour faire une alternance. A condition cependant qu’il y ait une vision commune.

Ma deuxième surprise est dans le culot sans pareil et la faiblesse d’analyse stratégique de ces démocrates qui nous assurent que le changement c’est d’abord la violence et l’incivilité, sous prétexte qu’on a tout essayé. Ces gens pressés de voir l’objet de leur haine (Paul Biya, sa femme, ses enfants et ses Beti) six mètres sous terre, œuvrent de manière si contreproductive que chaque fois qu’ils l’ouvrent, Paul Biya gagne des voix.


L’état culturel de l’opinion dans notre pays me semble à ce propos nécessiter un prérequis incontournable à toute alternance. Comment construire une vision commune du « changement » lorsque certains s’inclinent devant une abstraction divinisée et d’autres devant des crânes ? Comment forger un destin commun lorsque que pour certains l’incantation communautariste permanente, la salissure facile de l’autre et l’incivilité atavique tiennent lieu d’outils de dialogue ? Traiter l’épouse du chef de l’Etat de « wolowoss » ce qui veut dire « pute » dans le langage commun camerounais n’est pas seulement une faute politique en plus d’être une faute culturelle de goût, mais c’est aussi le révélateur d’un déficit d’arrimage au socle minimal d’acceptabilité des limites. Je ne connais pas la femme de Patrice Nganang s’il en a une. Mais je ne me permettrais jamais de la traiter de « wolowoss » même si elle en était vraiment une, sous prétexte de combat politique ou de trait d’humour douteux.

Ceux qui par défaut d’éducation ou par instinct grégaire revendiqué s’affranchissent aussi aisément des seuils d’acceptabilité anthropologiquement nécessaires à la construction de la nation peuvent-ils prétendre à nous dire ce qu’il y a lieu de faire ou de ne pas faire pour une alternance orientée vers l’intérêt de tous ?

Se tromper d’adversaire (Les Beti sont les voleurs) ou se tromper de méthode (amalgame, injures, contrevérités) sont les deux rails sur lesquels roule à grand bruit l’agitation anti-Biya en direction d’un gouffre. Cela s’est déjà vu en 1992 et les leçons ne semblent pas avoir porté, l’extrémisme tribal étant plus facile à mobiliser que l’analyse du contexte historique à affronter. La situation est pourtant claire.

La dimension intéressée, assumée et déterminée de la délinquance de comptabilité publique opérée par les conglomérats multi-ethniques de la prédation qui pensent ne pas avoir à le payer un jour, est le fil conducteur des facteurs entravants du développement camerounais. Ceci n’échappe à aucun Camerounais et ceci n’épargne aucun Camerounais. Le sentiment d'être mal gouverné, ou pire, celui de ne pas être gouverné, est devenu dévastateur par la somme d'anticipations négatives qu'il produit sur l'ensemble du corps social. Un pays n'est pas gouverné quand les lois n'y sont plus appliquées à tous. Quand l'opportunité est donnée à quelques uns de réaliser des gains personnels sur la seule base de la mauvaise application des règles. Les injustices deviennent alors de plus en plus criardes. Il s'y répand une témérité à bafouer les règles. Les initiatives de l'autorité restent sans effet. Les réformes n'aboutissent pas. Mêmes les projets dignes d'intérêt trainent en longueur ou sont abandonnés. Le rapport entre l'Etat et le citoyen devient conflictuel. L'Etat n'a plus d'objectif, et pour faire semblant d'en avoir, il se met à mentir aux citoyens. Les malversations se multiplient. L'accessoire devient essentiel et les vrais sujets disparaissent du débat. Le système ne fonctionne plus que pour sa seule survie et au final secrète sa propre mort.

Face à un tel défi, dans un pays récemment sensibilisés aux formes républicaines de l'Etat comme le nôtre, la composition de la citoyenneté en droits (civils, politiques, économiques) et devoirs (fiscaux, moraux, patriotiques) établi un contrat social au-dessus de toute autre considération. Cette citoyenneté doit ignorer toute expression et toute revendication qui lui sont contraires pour permettre la construction d’une culture publique qui s'impose à tous, pour définir et faire accepter à tous les valeurs qui s'affranchissent des loyautés singulières. L'agrégation des communautés en un espace national pluri-culturel oblige à une caractérisation de l'identité nouvelle, et par conséquent à  l'exercice d'une hiérarchisation au sein d'éléments variables concourant à  l'émergence de collectifs d'adhésion, se distinguant des pré-assignations "spatiales" et "biographiques". Suis-je Eton avant d’être Beti ? Suis-je avocat avant d'être Beti? Suis-je Beti avant d'être Camerounais ? Que signifie-t-il d'être un médecin Peul natif d'Obala, résident à Banganté, supporter du Tonnerre de Yaoundé, dont le plat préféré est le ndolè,  membre du Lion's club et sympathisant du SDF? On le voit la multiplicité des variables d'appartenance complexifie l'analyse de la mutation en cours dans notre société.

La difficulté que rajoute Nganang et ses semblables c’est que l’obsession de singularité qui les habite, qui s'exprime implicitement ou explicitement dans l'affirmation que l'autre est improductif et/ou négatif et que le salut du pays n’est redevable qu’aux siens, ne se limite pas à une simple auto-glorification. Elle déclenche une démarche de singularité en retour de ceux qui sont collectivement stigmatisés et  installe un contexte sociétal violemment ethnicisé qui empêche tout, et d’abord « le chassement » de Biya. La Tunisie vient d’élire démocratiquement un président âgé de 88 ans ayant servi deux dictateurs, Bourguiba et Ben Ali. Le changement vu du point de vue du peuple recèle parfois de surprises impossibles à anticiper lorsqu’on est aveuglé par le choix de privilégier un facteur explicatif unique.

Modeste BIKELE ATANGANA. Paris.
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