Depuis que la guerre a commencé
contre Boko Haram au nord du Cameroun, on ne sait pas vraiment ce qui
s'y passe et surtout quels sont véritablement les enjeux. Dans une
atmosphère cette fois institutionnellement francophobe, on peine parfois
à saisir qui fait quoi et pourquoi.
Certains disent que « la déstabilisation du Cameroun vient de la
volonté de la France et de ses complices camerounais d´exploiter sans
partage le plus grand gisement d´uranium au monde.»
Malgré l'évidence d'une propagande populiste en faveur d'un Paul Biya
aux abois qui n'a jamais aimé le peuple camerounais, on ne peut nier
que la France, protectrice inconditionnelle jusque là du régime de Biya,
ne fait jamais rien sans calculer en Afrique. Françafrique oblige.
Ce qui intéressera bon nombre sera la nature de ces "complices"
camerounais. A vrai dire, ce n'est pas la chute probable de Biya qui
devrait réjouir, mais plutôt de savoir quelle clique viendra après lui,
si ce n'est pas la même. En tout cas, cela interpellera ceux qui pensent
que la fin de Biya résoudra le problème du Cameroun, ou qu'une autre
clique fera mieux que lui. La vérité est que l'argent appelle l'argent
et que le rouge monte aux yeux à la vitesse de l'éclair. Les populations
ne sont même pas un alibi pour les suivants. Le "choix du peuple", de
la foutaise. Elles sont superflues dans ces histoires et paient toutes
seules le prix de la braderie et de l'empoisonnement de leurs terres.
En attendant, Boko Haram, la peste régionale originaire du Nigeria
voisin, a dépassé les frontières et sème la désolation dans les villages
frontaliers du nord camerounais. L'armée nationale est sur place pour
défendre l'intégrité du territoire national. Le sacrifice suprême est
devenu quotidien, autant pour les soldats que pour les civils. Les
Camerounais soutiennent "leur armée", ce BIR (Brigade d'intervention
rapide) qui a plutôt été jusque là utilisé par Biya pour mater les
Camerounais lors de manifestations ou de risques de révoltes.
Mais encore...
Poli. Un bled paumé de 5 700 âmes, à 136 km de Garoua, chef-lieu du
département de Faro, région du Nord. Le coin est considéré par les
connaisseurs comme un scandale géologique. Les longues chaînes de
montagnes qui ceinturent le département regorgent d’importants
gisements, notamment d’uranium et d’or.
Le paradoxe entre les importantes ressources minières que renferme le
sous-sol de Poli et la relative pauvreté dans laquelle vit sa
population n'a rien à envier à la psychose qui s'en est emparé depuis
quelques années.
Au Cameroun, on dénombre 23 réserves d'uranium actuellement en phase
d'exploration dont le gisement des monts Kitongo, à environ 12 km de
Poli, localisé pour la première fois en 1958.
C'est en 2006, que la Nu Energy Corporation Cameroon, filiale de Mega
Uranium Limited basée au Canada, s'intéresse au minerai des monts
Kitongo et obtient l'autorisation de l'explorer.
Sans savoir exactement ce qui se trame depuis des années, la
population locale et avec elle les experts, est consciente des risques
sanitaires, particulièrement les maladies cancéreuses, et
environnementaux liés à l'exploitation de l'uranium dans les sommets des
monts Kitongo. On craint la contamination de l'air et de l'eau, sans
compter l'émission de gaz toxiques. On sait aussi que la population
devra faire avec les expropriations et les déplacements forcés des
habitants d'au moins 12 villages des environs.
Deux principaux projets euranifères sont
en cours au Cameroun, soit à Kitongo au Nord, avec une réserve probable
de 13 125 tonnes, et à Lolodorf au Sud avec des réserves probables de
11 000 tonnes. Selon les experts, la teneur minimale du gisement est de
0,10%, alors que les concentrations en uranium des gisements connus dans
le monde sont comprises entre 0,05 et 0,50%.
La guerre provoquée au nord par Boko Haram, avec un Deby qui accourt
sur le territoire camerounais, au secours de son voisin détesté, style
"loup dans la bergerie", alors que les évidences de sa complicité avec
Boko Haram se sont accumulées, a de forts relents d'agendas cachés, on
s'en doutait. Mais aussi un gout très amer de déjà vu et de chronique
annoncée de sang et de désolation au long cours.
Dans tous les cas, Paul Biya n'est pas en train de se battre contre
Boko Haram pour protéger le peuple camerounais et son territoire.
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