Opinions Nouvelles

Opinions Nouvelles
Opinions pour mieux comprendre où va le monde

RÉSEAUX SOCIAUX : PLUS DE BIEN QUE DE MAL par Raoul Simplice Minlo

Comme à chaque fois après un événement tragique, internet et surtout les réseaux sociaux s’embrasent et se transforment en un déversoir, un exutoire de tout et n'importe quoi. Infos, mais aussi rumeurs et désinformation se disputent ce que nous appelons souvent ‘’mur des Lamentations’’. Après la pathétique affaire Monique Koumatekel en avril 2016, l’accident tragique du train  152 de la Camrail, le 21 octobre dernier à Eséka, a encore mis les réseaux sociaux au-devant de la scène. La nouvelle doxa médiatique a une fois de plus fait le buzz. Elle a fait, voire, créer  l’événement.  Les réseaux sociaux  ont dessiné le diable sur le rail, et le diable est apparu. Disent certains. Le bilan est lourd. La  consternation est à son comble. La douleur intense. Depuis ce drame, chacun y est allé de son post pour s’indigner, pleurer, commenter, analyser, donner sa version des faits, invectiver, injurier, partager, accuser, manipuler, récupérer, appeler à la  révolte. Les smartphones, tablettes, laptops et  autres desktops ont surchauffé à la mesure de l’horreur.

Pub : Discutez, achetez, vendez en toute sérénité sur Simpofo.com
Et une fois de plus, les médias sociaux et les réseaux sociaux ont été fustigés, accusés de manipulation, d’oiseau de mauvais augure et présentés comme un danger pour la Cameroun. Les médias à capitaux publics et certains médias privés ont consacré éditoriaux, commentaires, reportages et vox pop, étalant au passage leur inculture du domaine. Les uns et les autres ne faisaient pas de différence entre médias sociaux (blog, forums de discussion, wikis) et réseaux sociaux (Facebook, Instagram, watsapp, twitter, viadeo, Hi5 etc), désignant même de bloggers, tous les utilisateurs des outils sus évoqués. Ils ont convoqué les médialogues, les hommes de droits, les politiques, la population pour donner des avis sur ce qu’ils pensent des réseaux sociaux,  ce que prévoit la loi en prenant le soin de  mettre l’emphase sur les  différentes condamnations encourues par les utilisateurs, pour que nul n’en ignore.
Disons-le tout de suite. L’heure n’est plus à la hantise des médias et des réseaux sociaux. Ces plateformes d’échanges, de discussions et de diffusion ne doivent aucunement faire peur. Ils font partie désormais de notre quotidien.  Nous devons nous en accommoder, nous en approprier. Fustiger, condamner, jeter l’anathème, maudire ne servent à rien. Cette attitude peut même dénoter une certaine ignorance coupable de la révolution numérique dans laquelle nous sommes embarqués bon gré mal gré. 
Citoyen émetteur-récepteur
En effet, nous devons comprendre une fois pour toutes que la révolution numérique actuelle est comparable à celle du début du XIXème siècle. Nous serions confrontés selon MISSIKA (2007) à une « technologie disruptive » qui bouleverse les règles du jeu, les positions de force des principaux acteurs et où la dimension socioculturelle du processus serait particulièrement importante. Ici, la révolution technique servirait de révélateur à la révolution comportementale : blogs, forums, chats, Facebook, watsapp ou wiki permettent à chaque citoyen de passer du statut de simple récepteur à celui d’émetteur-récepteur (user generated contents). Et c’est le  plus grand changement de ces dernières années. Il   réside dans le fait que le travail de  collecte, de  traitement et de  diffusion des faits n’est plus l’exclusivité des seuls journalistes. Aujourd’hui, bon nombre d’informations apparaissent d’abord sur les réseaux sociaux avant que les grandes agences, AFP, Reuters, Associated Press ou APA n’aient eu le temps de rédiger les premières dépêches. 
Aujourd’hui, l’information se déroule en premier lieu sur les réseaux sociaux, mais malheureusement  la désinformation aussi. Et peut-être surtout elle. La véracité du propos n’est pas vraiment la première préoccupation dans cet espace public. Le principe journalistique et de bon sens, qui exige de recouper toute information à plusieurs sources n’est pas la première exigence. Personne ne vérifie rien, et plus le post est faux, plus le faux est grossier, plus il aura de succès. En effet, les réseaux sociaux sont d’imposants générateurs de contenu,  produits par un magma de lecteurs consommateurs, prescripteurs, émetteurs et récepteurs. Et nous pouvons, dès lors  comprendre la posture du  célèbre philosophe, écrivain et essayiste italien, Umberto Eco sur ce phénomène quand il affirmait: «les réseaux sociaux ont donné le droit de parole à des légions d’imbéciles qui, avant, ne parlaient qu’au bar, après un verre de vin et ne causaient aucun tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite alors qu’aujourd’hui, ils ont le même droit de parole qu’un prix Nobel. C’est l’invasion des imbéciles».
Malgré les dérives, les uns et les autres doivent définitivement intégrer que nous avons changé d’époque et de façon de communiquer. Nous sommes désormais à une ère où, selon l’Éditorialiste du journal français l’Express, Christophe Barbier, «l’infobésité» bombarde le citoyen du XXIe siècle avec tout ce qui (se) passe. En cette tempête où l’émotionnel l’emporte sur le rationnel, sons, images et textes gavent plus qu’ils ne nourrissent, informent et déforment à la fois, puisqu’on ne peut penser aussi vite que l’on ressent. Ainsi, chacun  a le sentiment de vivre une époque à la fois transparente, parce qu’il sait  presque tout, presque tout de suite et vite, parce qu’il ne comprend pas où vont l’homme et le monde. L’actualité sonne dans notre poche, grâce aux alertes «smartphonées», et résonne dans notre tête, comme un écho qui cherche son sens profond. En donnant, avant qu’ils n’adviennent, les combinaisons pour décoder les évènements importants, en approfondissant les tenants et les aboutissants de ceux qui éclatent sans prévenir ».
Le gouvernement et toutes les autres administrations, les entreprises, les médias, les universités, les hôpitaux, les partis politiques, les églises, les lycées et collèges doivent, comme l’avait prescrit d’ailleurs le Chef de l’État au gouvernement en début d’année, s’approprier médias et réseaux sociaux. Au lieu donc  de commander des dossiers médiatiques à charge, pour dénoncer et toujours fustiger ces outils, marqueurs de notre époque, il serait plus judicieux et important d’engager une réflexion sérieuse et profonde sur l’appropriation et les usages  avantageux du web 2.0 au Cameroun à l’ère de la révolution numérique.
Le Web 2.0,  l’urgence d’une appropriation
 Le web 2.0  ou internet de deuxième génération, est une évolution de l’internet vers plus de simplicité (ne nécessitant pas de grandes connaissances techniques ni informatiques pour les utilisateurs) et d'interactivité (permettant à chacun de contribuer sous différentes formes). C’est donc une entrée du web dans une nouvelle ère. Il est également un ensemble de principes et de pratiques et une réalisation technique, économiques et sociale qui induit des grands bouleversements : Il marque le passage de l'interactivité à l'interaction, le passage de web vitrine au web plateforme d'échange entre les utilisateurs (internautes), services et applications en ligne, l'apparition des nouveaux modèles de communication dits « many to many » fondé sur des réseaux qui ne se basent plus sur l'échange d'information, mais sur le partage du savoir et dans lequel tout internaute peut librement et aisément diffuser l'information. Selon Tristan Nitot, président de Mozilla Europe, « c'est le Web tel qu'il a été imaginé par son inventeur, Tim Berners-Lee, un Web où chacun peut publier et consommer de l'information. Un Web où l'on est consommateur, et acteur à la fois. Consomm'acteur, en quelque sorte».
   Le web 2.0 est donc une transition de l'univers isolé des sites web vers des flux de contenu libre et des services ouverts. Se définissant comme interactif, social et collaboratif, il permet une interaction totale entre internaute, le site en lui-même et les internautes entre eux. En d'autres mots, le web 2.0 est un socle d'échanges entre les utilisateurs et des applications en ligne. Il fait référence à la fois aux usages sociaux, tels que les usages entre les internautes, et aux technologies, telles que les plateformes sociales et collaboratives, permettant d'échanger et de partager des connaissances. Phénomène disruptif, il a un impact sur tous les domaines de la vie. Nous ne pouvons donc plus nous contenter aujourd’hui de jeter l’anathème,  de dénoncer.  Nous devons trouver les moyens d’une meilleure appropriation et en faire des  outils de développement pour notre pays.
Raoul Simplice MinloJournaliste diplômé de l’Esstic/UY2 et de l’IFP Paris2
Partagez sur Google Plus

About BIGDeals

This is a short description in the author block about the author. You edit it by entering text in the "Biographical Info" field in the user admin panel.
    Blogger Comment
    Facebook Comment

0 commentaires:

Enregistrer un commentaire

Laissez nous un commentaire sur cet opinion.