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Dr Vincent-Sosthène FOUDA : Pour le sursaut de l’Unité National

Les débats n’ont pas eu lieu au Conseil Constitutionnel malgré les deux nuits que nous y avons passées. Le système est verrouillé, cadenassé ! Les débats ont été absent à la Chambre Administrative de la Cour Suprême qui ignorant l’existence des Chambres Administratives dans les 10 régions de notre pays, a choisi de tout concentrer à Yaoundé ! Voilà autant de difficultés qui convoquent en nous cette interrogation. L'union nationale est-elle une idée stupide ? Quand un pays se trouve, comme le nôtre aujourd'hui, devant un mur de problèmes à résoudre, elle apparaît logique. Mais, comme chacun sait, logique n'est pas nécessairement camerounaise.

Le Cameroun a une longue tradition d'occultation des difficultés que son système politique n'a cessé d'entretenir, avec autant de cynisme que de pleutrerie. A quelques exceptions près, les représentants des différents pouvoirs, tenez politiques, médiatiques, législatifs, économiques, les différents syndicats et autres corporations, les militaires et autres corps habillés ont toujours joué la défausse devant les réformes qui s'imposaient : « On ne peut pas le dire, on ne peut pas le faire »,  « le Cameroun est particulier, nous ne voulons pas les forces étrangères chez nous », « nous souffrons mais nous prendrons tous les armes comme un seul homme pour nous défendre contre l’envahisseur » tels sont les différents refrains qui nous sont servis ici.

Désormais, tout le monde a compris, sauf peut-être dans les coins de la République les plus régulés, dans nos villages où l’on n’a jamais su d’ailleurs que le Cameroun existe, que nous sommes arrivés au bout d'un système et qu'il faut le changer. Nos institutions sont à bout de souffle, elles n’ont ni été renforcées, ni consolidées encore moins rénovées. L’héritage colonial tombe en ruine face à une colonie de fonctionnaires affairistes, paresseux et en panne d’imagination. Notre endettement a dépassé la barre des 90 % par rapport au PIB. Nous avons un effectif de fonctionnaires sur le papier qui ne correspond à rien. De nombreux bandits et prévaricateurs de la fortune publique se baladent à travers le monde tout en percevant un salaire de la fonction publique. Le plus gros contingent de ces agents se recrute dans le monde des enseignements (maternel, primaire, secondaire et universitaire). L’écrivain Patrice Nganang est la parfaite illustration de ce monde. Parti du Cameroun pour un stage en linguistique en Allemagne cet enseignant des lycées continue à émarger à la fonction publique camerounaise. Dans les années 90 l’INJS a envoyé une vingtaine de ses cadres enseignants au Canada parmi lesquels Ngoa Nguélé l’actuel directeur de cette école, il est certainement le seul à avoir regagné le Cameroun. Beaucoup de ces enseignants dispensent des enseignements à divers titres aujourd’hui dans les universités canadiennes et américaines tout en percevant un autre salaire au Cameroun.
Il m’arrive d’échanger avec les uns et les autres qui se contentent simplement d’affirmer que le salaire qu’ils perçoivent au Cameroun s’occupe des problèmes du Cameroun ! Aucun alors ne réalise qu’il commet un double crime, celui de priver son pays d’origine d’un poste physique à la fonction publique mais aussi qu’il perçoit un salaire qui devrait revenir à quelqu’un d’autre qui lui, est au chômage. Pouvons-nous continuer, devons-nous continuer à nous endetter pour payer les factures d’une incompétence sociale qui prend aujourd’hui de l’eau de toute part ? N’est-il pas temps de prendre conscience qu’il faut passer à autre chose, ne devons-nous pas construire pour les générations futures ?
Le Président Paul Biya et son gouvernement ne sont pas en état de mener la politique d'assainissement des comptes qui permettrait de remettre le Cameroun sur pied et de retrouver la croissance. Pour le Libéralisme communautaire n’est plus en mesure de redresser la barque Cameroun. Les membres du RDPC se sont enfermés dans le déni bien qu’il y ait une minorité qui perçoit que tout est fini.  L’ensemble du peuple camerounais est aujourd’hui  convaincu que le Président Paul Biya,  n’a plus dans son propre camp, une majorité pour des réformes profondes. S'il veut faire quelque chose des cinq ans qu’il lui reste, le président est condamné à rebattre les cartes et à ouvrir le jeu. Son règne est loin derrière lui, il est aux affaires depuis 1963, Président de la République depuis 6 novembre 1982. Long oui trop long déjà.

Sinon, le Président Paul Biya, encloué dans son fauteuil de Mvoméka quand il peut y être, sera appelé à subir une sorte de supplice chinois jusqu'à la fin du présent septennat : les mauvaises nouvelles continueront de lui tomber sur la tête comme les gouttes d'eau des bourreaux au temps de l'empire du Milieu. Pour se soustraire à ce sort funeste, il a une solution : donner un coup de pied dans la fourmilière de notre système moribond. Personne ne l’écoute plus, ni ses Ministres, ni son Secrétaire Général, ni son Directeur du Cabinet Civil, oui il faut du sang neuf dans la maison et ceci de façon urgente et dans tous les compartiments de la maison.

La descente aux enfers du Président Paul Biya dans son propre camps risque, si ce n'est pas déjà fait, de le paralyser et de le transformer en ce qu'on appelle, aux Etats-Unis, un président "canard boiteux" quand, après avoir perdu les élections générales de mi-mandat, il est condamné à coller les timbres ou à inaugurer les chrysanthèmes en faisant le moins de bruit possible.

Or, en ces temps incertains, rien ne serait pire que l'immobilisme. Le Cameroun est entré dans une crise de nerfs dont on ne voit pas la fin. Il lui faut tout réinventer. Son contrat social. Son "vivre ensemble". Ses fondations économiques. Sans parler de l'intégration sous régionale, qui, faute de projet et de vision, est en train de s'effilocher sous nos yeux impuissants.


Que nous soyons en 1845, date de la fondation de l’espace public moderne dans notre pays avec la création et l’ouverture de la première école par le Pasteur Merrick ou en 1960 date de l’indépendance du Cameroun francophone, que nous soyons dans une autre époque, cela revient au même : le Cameroun va mal et il faut bouger. Même si aucun politicien n'ose le dire ouvertement, beaucoup, dans tous les camps, savent ce qu'il faut faire. Il faut s’unir, il faut aider les populations à comprendre et à suivre.

La solution, c'est l'union nationale autour de personnalités raisonnables de toutes les forces politiques du Cameroun qui tenteraient, dans un délai de dix-huit mois, de rétablir les comptes publics en engageant deux ou trois des grandes réformes urgentes qu'aucun gouvernement n'a su mener à bien au cours des dernières décennies (Éducation nationale, système de santé, mille-feuille administratif, les transports et les travaux publics, l’eau et l’énergie etc.). Nos routes tuent aujourd’hui plus que hier, ce sont les familles entières qui disparaissent parfois c’est trois générations grands-parents, enfants et petits-enfants, le Dr Ella, son épouse et leurs cinq enfants, le sergent Belibi son épouse et leurs six enfants et tout ceci à intervalle de deux jours ! Nous devons aller au-delà de l’émotion et nous poser des questions vraies justes et surtout agir. Nos hôpitaux sont devenus de véritables mouroirs et comme tout mouroir on y va en trainant les jambes. Même si, depuis leur camp respectif, nos hommes politiques s'envoient des noms d'oiseau, il y au Cameroun assez de politiciens prêts à faire passer l'intérêt de l'État et de la collectivité avant celui de leur boutique. C'est du moins ce qu'on veut croire.

L'union nationale reste une spécialité allemande, et c’est l’Allemagne qui a fondé la vie politique moderne au Cameroun ; elle est donc encrée dans la tradition politique camerounaise. Martin Paul Samba, Douala Manga Bell, le chef Mandola l’ont porté jusqu’à la fusillade et la pendaison. Le Président Ahmadou Ahidjo l’a fait aussi en appelant à l’unité nationale durant ses 25 ans de règne, les camerounais ont appris à vivre en peuple et non plus en ethnies, en tribu. Oui les Camerounais ont eu à s’en plaindre sans doute, le parti unique à céder la place au multipartisme avec ce que cela comporte comme richesse au niveau des idées mais aussi au niveau des hommes et des femmes responsables politiques. Dans tous les cas et exemples cités, nous pouvons dire que l’unité nationale a permis de poser les bases d’un redressement et a fortifié la paix entre les différents peuples présents ici.


 Sans doute l'union nationale ferait penser à un retour au parti unique qui rimerait avec pensée unique mais que non. Mais, au point où nous en sommes, le délitement actuel creuse de plus en plus en profondeur le fossé qui sépare les uns et les autres. Le Cameroun est au bord de l’éclatement et les différents recrutements dans les forces armées et autres forces de défense nationale n’y peuvent rien. Les armes n’ont jamais construit ni consolidé la paix.

Bon. Dites-moi combien êtes-vous disposés à publier ce texte ? Avez-vous une idée de ceux qui le liront de la première ligne à la dernière sans s’ennuyer ? Sans s’arracher les cheveux, sans crier au scandale et au sacrilège ? Monsieur les directeurs de publication vous pouvez maintenant arrêter de sourire ou de vous moquer. Je refuse de croire cependant que cette suite d’idées agencées est simplement un rêve. Alors si tel était le cas, un rêve qui, s'il se réalisait, nous changerait la vie. Depuis le temps, la rouerie et le mensonge n'ont cessé de faire tomber le Cameroun. Pourquoi ne pas essayer maintenant la naïveté et la transcendance ?
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