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Gazoduc à Douala: La société civile exige l’arrêt du projet par B-P.D.

1.- Un projet jugé meurtrier 

Jeudi 10 avril dernier à Douala, un groupe de citoyens a entretenu la presse nationale et internationale sur le gazoduc qui va, dit le groupe traverser la cité, la mettant en péril et exposant des populations à une mort certaine. Pendant plus d’une heure, le collectif s’insurge contre la construction de ce projet qu’il juge dangereux voire meurtrier. Petit rappel, en 2011, la société Rodéo Developpement, devenue depuis quelques semaines Gaz du Cameroun, a obtenu du gouvernement une licence d’exploitation d’une usine de gaz dans la ville de Douala, fait observer l’un des panélistes. « Ce projet de quatre phases comprenant entre autres la construction d’une usine et celle d’un gazoduc qui traverse la ville de part en part sur 17 kilomètres, est aujourd’hui presque achevé, et le ministère de l’environnement, de la protection de la nature et du développement durable a délivré pour chacune de ces phases un certificat de conformité environnementale, attestant que ce projet est sans danger aucun pour l’environnement et les populations qui vivent aux alentours », tempête l’un des membres du collectif. Or, poursuit un autre rien n’est plus faux : le gazoduc est une installation extrêmement dangereuse. Le gaz qu’il transporte a pour fonction principale d’exploser et de s’enflammer, ce qui rend indispensable la mise en place des mesures de prévention, de protection et d’intervention. 


Enfonçant le clou, l’on annonce alors que malgré tous les moyens et les précautions dont s’entourent les constructeurs européens et nord-américains, les gazoducs dans ces pays explosent en moyenne deux fois par an depuis les années 1970. « Des fuites de gaz surviennent fréquemment, quand ce ne sont pas les soudures qui cèdent ou des engins de chantier qui provoquent des fissures ou sectionnent les canalisations. De plus, un gazoduc est une cible privilégiée des terroristes ». 

Et « les conséquences de son explosion et de l’incendie qui s’ensuit sont dévastatrices : aucun être humain ne survit dans un rayon de 500 m, toutes les habitations sont détruites sur 800 m à la ronde, des flammes hautes de 200 à 300 m produisent une chaleur irradiante jusqu’à 2 km, comme un signe, une explosion de gazoduc a eu lieu en Pologne, la veille de l’inauguration de l’usine à gaz de Ndogpassi en novembre 2013. Depuis, il y en a eu neuf autres (5 aux Etats-Unis, 2 au Canada, une au Mexique, une en Egypte) ». De quoi donner des sueurs froides. 
Malgré cela, gronde le collectif, le ministère en charge de l’environnement, dans le projet de construction du gazoduc, a pris sur lui de valider des réunions de consultation publique des populations non conformes à la loi sur la gestion de l’environnement. Plus grave, estime les membres de la société civile regroupés à Douala, le délai de convocation des populations n’a pas été respecté, le ministère lui-même n’a pas été convié aux réunions, les populations non plus n’étaient présentes, 17 personnes en tout et pour tout ont été consultées à Bassa et à Bonabéri ; ces participants ont lu et remis des déclarations marquant la désapprobation des communautés par rapport au projet. En plus, comme si cela ne suffisait pas, le tracé, précise-t-on, n’a pas été communiqué au public et les populations riveraines (habitant les quartiers Bali et Akwa, et tous ceux que le gazoduc traverse entre les deux) n’ont été ni informées, ni consultées sur le projet, et pour cause… 


2.- Pour une ville sans moyens de secours 

Depuis quelques temps, ce projet alimente les conversations jusque dans les chaumières à Douala. Ce projet consiste à exploiter les puits de gaz de schiste découvert dans le canton Bassa, plus précisément dans le village Ndogpassi. Outre l’usine de production, il est prévu un réseau de distribution par gazoduc construit en trois temps : un premier tronçon vers les industries situées dans la zone industrielle de Logbaba, un deuxième en direction du canton Bakoko pour alimenter une centrale électrique à Ngodi et enfin le tronçon Bassa-Bonabéri. En partant du marché Sandaga, le gazoduc va traverser le fleuve Wouri puis les localités suivantes : Bonassama, Bonendalè, Bojongo, Mambanda, Sodiko et Ndobo pour ne citer que celles-là. Auparavant, il sera passé par le canton Bell, par l’usine des Brasseries à Koumassi, le lycée technique, la chefferie Bell, le parc des Princes…, traversant l’axe-lourd pour longer le quartier Dikolo, la vallée de la Bessekè. En partant de la zone industrielle de Logbaba, le tracé aboutit toujours à Bassa, à Ndogsimbi, Bonapriso puis Bali. 

Ce qui semble à priori attiser la colère du collectif est que « la ville de Douala ne dispose pas de moyens de secours et d’intervention adaptés à cette situation d’extrême dangerosité. Le groupement des sapeurs pompiers de Ngodi assure la couverture incendie de toute la région du Littoral, avec uniquement deux camions d’incendie. Si le projet de construction du gazoduc est conduit jusqu’à son terme, les populations vont vivre sous la menace permanente d’une véritable bombe susceptible d’explorer à tout moment ». 

« Aujourd’hui dans la ville de Douala nous n’avons pas ce que nous voulons. Mais nous aimons ce que nous avons et qui nous est le plus cher : nous aimons la vie et nous demandons qu’elle soit respectée. Nous nous élevons coûte que coûte contre ce projet monstrueux qui serait mille fois meurtrier et destructeur que la catastrophe de Nsam du 14 février 1998 et face auquel nous sommes sans information et sans défense aucunes », dit la société civile. Qui, pour toutes ces raisons, exige l’arrêt immédiat de la mise en œuvre du projet de construction du gazoduc dans la ville de Douala, ainsi que le démantèlement des installations mises en place illégalement car sans concertation avec les populations riveraines au tracé, sans étude de dangers ni plan d’urgence, sans étude d’impact environnemental réalisée conformément à la loi. 

Selon les experts, les installations gazières nécessaires pour l’exploitation d’un gisement gazier sont classées établissements dangereux pour le voisinage, la population, et la nature. Ces installations sont rangées à la 1ère classe de la nomenclature des établissements réputés dangereux, insalubres ou incommodes et comportent des inconvénients tels que les bruits, les menaces d’incendie et d’explosion, les odeurs, l’altération accidentelle des eaux, la prolifération des insectes et la poussière. « L’exploitation du gaz de schiste est prohibée dans plusieurs pays européens, en raison des atteintes graves qu’elle fait subir à l’environnement et surtout de la contamination des puits d’eau qu’elle occasionne », soulignent les experts. 


3.- Le Démenti de Gaz du Cameroun 

Joint par nos soins hier mardi 15 avril 2014, le directeur général de Gaz du Cameroun dément formellement ce que dit la société civile. « Il y a eu des concertations avec les populations riveraines au tracé, une étude de dangers, un plan d’urgence, une étude d’impact environnemental réalisée conformément à la loi. Tout a été fait selon les normes. Les différentes étapes du processus ont été respectées. Que les gens ne viennent pas vous raconter du n’importe quoi. Ce n’est pas vrai ce qu’ils racontent. Nous sommes une entreprise citoyenne et respectueuse des normes en matière d’environnement. On ne peut pas rassembler la presse pour lui dire des choses inexactes », affirme Honore Mbouombouo Dairou. 

Qui toutefois prévoit que le projet pourrait favoriser le développement industriel et l'investissement à Douala grâce à une augmentation significative de l'approvisionnement en énergie et à moindre coût. 

Sur le plan social, disent certains experts, la localité d’exploitation pourrait bénéficier de l’implantation d’un système fiable de sécurité. Elle devrait aussi générer des emplois additionnels crées par des grandes, moyennes et petites entreprises locales, sous-traitantes dans le projet de Rdl. Sur le plan environnemental, ils citent la fourniture d'une énergie propre et la substitution par le gaz naturel du fuel lourd et des huiles régénérées. En outre, il y a le transfert de technologies aux entreprises locales pour l’installation de la canalisation de distribution de basse pression (gazoduc) en polyéthylène de haute densité (Hdpe) et la formation des ingénieurs camerounais dans l’installation et la maintenance de l’usine de traitement et du système de canalisation (gazoduc). « 6 000 000 de litres d’huiles usées par an seront retirées de la consommation suite à la substitution de ces huiles par le gaz naturel. Par conséquent, le projet aura un impact positif significatif sur l’environnement », soutient Emmanuel Foutso Adji, expert sur le projet. 

Logbaba produit du méthane pur avec très peu de résidus. De la centrale il y a 13 kilomètres de pipeline sous terre, qui franchissent la ville vers ses clients, principalement des entreprises industrielles. « Ce projet représente aussi des espoirs que la ressource naturelle du gaz peut être exploitée pour apporter des bénéfices aux populations du pays. Aussi, l'exploitation de cette centrale aura immédiatement un impact sur le produit intérieur brut du pays. Le Cameroun pourra économiser jusqu'à 113 milliards de Francs Cfa de devises étrangères si le plan de commercialisation du produit marche à plein régime. Cette exploitation devrait rapporter à terme, jusqu'à 75 milliards de Fcfa par an dans les caisses de l'Etat en terme de redevances et autres impôts. Le Cameroun a aujourd'hui une chance unique de se positionner sur le marché stratégique du gaz naturel, avec tous les avantages que cela pourrait entraîner. 

Nous espérons les accompagner de la façon la plus pertinente dans ce processus», analyse Kevin Foo, manager général de Vog qui trouve qu'il s'agit d'une opportunité pour le Cameroun. Il faut néanmoins relever par précaution que le Cameroun n’a pas les moyens technologiques du Japon ou de l’ex-Urss qui n’ont pu éviter Tchernobyl et Fukushima. 

B-P.D.
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