Il y a 32 ans, le sport marchait plutôt bien. Que ce soit le handball, le basketball, le volleyball, et bien d’autres disciplines, le Cameroun était parmi les meilleurs. Au football, nous étions pratiquement les meilleurs, que ce soit avec les clubs qu’avec l’équipe nationale fanion. Le Cameroun avait également trois grands stades bien aménagés (Yaoundé, Douala, Garoua). 32 ans plus tard, malgré les multiples victoires et lauriers engrangés, le nombre de stade digne de ce nom n’a pas augmenté. Pire, l’état de santé physique des stades existant est fortement dégradé, obligeant les instances internationales de football à sortir ces bijoux d’antan du fichier des stades acceptables pour des compétitions internationales. Quel horreur pour le pays de Roger Milla ! 32 ans plus tard, les clubs de football camerounais jouent désormais les seconds rôles quand ils ne sont pas tous simplement absents de la scène. Pour ce qui est de nos Lions indomptables, équipe fanion, elle est désormais à l’image d’un octogénaire usé par le temps, dont l’existence et la présence ne sert plus qu’à l’histoire, de quoi retourner le maréchal Mbappè Leppé du fond de sa tombe.
Il y a 32 ans, les choses semblaient alors aller bien pour ce secteur relevant des services de base sur le plan social, au point de nous faire rêver d’une possibilité de garantir l’accès à la santé à tous les citoyens. 32 ans plus tard, le paludisme, complètement éradiqué ailleurs, continue de faire des ravages au Cameroun. Le choléra tue des milliers de personnes chaque année sur l’ensemble du territoire national. L’espace des tradi-praticiens non encadrés s’est grandement élargi, exposant au passage des millions de Camerounais tenus par le pouvoir d’achat, à diverses arnaques et autres dangers d’ordre sanitaire soutenus par la vente des médicaments dans la rue, et qui fait profusion. La corruption gangrène les hôpitaux publics. Le slogan rêveur développé et qui a fait l’objet d’une grande publicité dans les années 1980 “santé pour tous en l’an 2000“s’est vite transformé en “maladie pour tous et partout en l’an 2000“.
La situation n’est pas moins alarmante en ce qui concerne l’éducation. Parti d’une éducation de masse (le plus grand nombre de personnes a accès à l’éducation), nous sommes rendus 32 ans plus tard à une éducation d’élite (seul ceux qui font partie de la classe sociale la plus élevée ont accès à l’école). Le niveau de dégradation des infrastructures scolaires semble aller de paire avec la dégradation de la qualité des enseignements. Le système scolaire longtemps décrié n’a pas changé. Pire, il contribue dangereusement à la détérioration du paysage intellectuel. La fonction principale de l’école étant de former l’Homme, l’on peut attribuer à ce système scolaire désuet d’être tributaire d’une société camerounaise dont la méritocratie a laissé la place à la médiocratie. S’il y a eu quelques Universités de construit ça et là dans quelques régions du Cameroun, ces institutions ne sont plus que des repères d’expression des conflits tribaux et politiques, en lieux et place de milieux d’expérimentation des sciences et des savoirs.
Oui ! Moi à sa place, je n’oserai plus !
Au regard du niveau de défectuosité actuelle du tissu social, que dire du développement économique ? La ville de Douala nous servira d’échantillon à ce sujet. Cette métropole baptisée Douala Mbengue (en référence à la ville de Paris), porte d’entrée du Cameroun, reconnu du reste comme l’Afrique en miniature, se trouve, 32 ans après, dans un état de dégradation indescriptible. Les inondations, jadis objet de curiosité, sont devenus le lot quotidien du spectacle urbain. La capitale économique du Cameroun présente un visage photographique de la situation socio-économique nationale. Le port et l’aéroport qui ont fait la force et la fierté de Douala, ne sont plus que des gros monuments utiles aux historiens plus que d’être rentables pour nourrir l’économie nationale. Oui, monsieur le Président, moi à votre place je n’oserai plus ! Notre jadis beau pays le Cameroun est, depuis 32 ans, dans bien de domaines et secteurs en reculade. Les dérives sont toujours en constante évolution. L’accès à l’eau, à la santé, à l’éducation, à un habitat décent sont devenus des chimères. Des dizaines de milliers des jeunes Camerounais mettent leur vie en danger, au large des côtes marocaines et algériennes, tentant de traverser vers l’Europe. Pour ces milliers de jeunes dont la majorité est des diplômés d’Universités, leur seul espoir se trouve désormais dans cet exercice périlleux qui fait annuellement des centaines de morts. Comme l’a reconnu monsieur Biya lui-même, lors du traditionnel discours de fin d’année en 2013, la corruption, le laxisme, et autres maux, monnaie courante dans l’administration publique, hypothèquent la moindre possibilité de décollage. De plus, notre pays semble désormais servir de champ d’expérimentation et d’exercice d’actes conflictuels multiformes. Entre les Boko Haram dans la partie septentrionale du pays, la Seleka et autres rébellions à l’Est du Cameroun, nourri par les accusations et contre accusations des personnalités politique très proches du pouvoir, s’incriminant les uns les autres, sur la question ô combien sensible liée à la sécurité du territoire national.
32 ans passés, rigueur et moralisation ne sont plus que des slogans creux et sans substance qui relèvent d’un passé qui était alors porteur d’espoir. La gabegie et la corruption ont vite pris le pas sur tout, au point de s’imposer comme mode de gouvernance de l’administration publique. Il se pourrait que les fonctionnaires qui, dans l’exercice de leur fonction, n’usent pas de la corruption, s’exposent à des sanctions graves pouvant aller jusqu’à des peines privatives de liberté. Qu’en est-il de notre chère démocratie toujours revendiquée mais jamais réalisée. Un militant politique présente le paysage politique camerounais comme une “scène politique à quelques exceptions à l’image d’un pays politiquement unicité et fadement unicolore“. Les espoirs nés des lois sur les libertés se sont vite évanouis, ce n’était qu’une lueur d’illusion rapidement déconstruite par la dure réalité du quotidien, qui met face au citoyen, une dictature fratricide, entretenue par une monarchie politiquement multicolore. Parce que notre pays le Cameroun ressemble désormais à une grosse machine dont les documents technique ont disparu alors que les mémoires sont déréglées, parce que le pays de Rudolph Douala Manga Bell, Martin Paul Samba, Rubin Um Nyobè, Ernest Ouandié et autres, a besoin de retrouver ses vraies marques. Oui parce que la longévité use et fatigue, moi à la place de Monsieur Biya, je n’oserai plus me représenter.
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