Le Tchad a célébré,
le 1er décembre dernier, le 24e anniversaire de l’accession au pouvoir du président
Idriss Deby Itno, celui-là même dont l’avènement à la tête de l’Etat en 1990
avait constitué pour les Tchadiens une lueur d’espoir. Par la suite, cet espoir
va faire progressivement place à la désillusion. Une fête qui intervient dans
un contexte de désolation générale, au regard de la grande clameur que cette célébration
suscite à travers le pays. L’opposition a appelé tous ses militants et tous
ceux qui aspirent à un changement démocratique « à boycotter les
manifestations marquant cet anniversaire. Des manifestations qui n’ont, du
reste, aucun caractère national, selon eux. »
Mais Deby,
qui cherche à redorer son blason après la brusque ébullition du front social le
21 novembre dernier, « veut montrer à son opposition qu’il a encore de la
légitimité. Aussi tient-il à célébrer ses 24 ans de règne, dans un contexte qui
ne s’y prête franchement pas. En effet, à l’heure où les satrapes du continent
sont dans le viseur de leur peuple, l’attitude de Deby a de quoi intriguer. A
moins que cette énième lubie du prince ne soit liée à la récente déclaration de
François Hollande qui a annoncé qu’il restait redevable à Deby pour son
engagement dans la crise au Nord-Mali. Et ce n’est pas tout : l’actuel
locataire de l’Elysée a laissé entendre qu’il n’est pas contre les
Constitutions qui ne limitent pas le nombre de mandats présidentiels, l’essentiel
étant que les élections dans les pays concernées se déroulent de façon libre et
transparente. Comme on le voit, les déclarations du président français peuvent
avoir donné des ailes au satrape tchadien. L’opposition, en tout cas, n’a pas
manqué de donner de la voix, en s’insurgeant contre les « folies »
du monarque. 24 ans de dictature, ça ne se célèbre pas !
La population a compris que c’est le
moment où jamais de marquer l’histoire du Tchad
Cela dit, l’opposition
politique tchadienne sera-t-elle en mesure de changer le cours de l’Histoire ?
Une question d’autant plus à propos que nul n’ignore que l’opposition
tchadienne, à l’instar de bien des oppositions en Afrique, a toujours brillé
par son incapacité à s’unir, à se serrer les coudes, afin de mener une lutte
commune pour déboulonner Idriss Deby, comme cela a été le cas au Burkina Faso.
De fait, les
intérêts égoïstes de certains opposants tchadiens transcendent ceux de la
nation. Et ces fissures et autres lacunes permettent bien évidemment au
dirigeant tchadien de boire son petit lait et de toujours gouverner en rond. Il
est donc urgent que l’opposition tchadienne fasse preuve de plus de maturité,
qu’elle tire leçon des erreurs du passé, qu’elle grandisse véritablement, afin
de faire échec à Deby dans sa volonté de règne ad vitam aeternam. Bien sûr,
toute seule, elle n’arrivera pas à déboulonner une dictature vieille de plus de
deux décennies.
La
population qui a aussi compris que c’est le moment ou jamais de marquer l’histoire
du Tchad, que le salut ne viendra pas seulement de l’Opposition, a
aussi un grand rôle à jouer. Et, de toute apparence, elle a décidé de
jouer sa partition. Nul doute que la présence conjuguée de plusieurs forces sur
le terrain, opposition politique, société civile, population, amènera Deby à
comprendre qu’après 24 ans de règne sans partage, il est temps de se retirer
sur l’Aventin, afin de permettre à d’autres compétences de s’affirmer.
Le Pays :
Seydou TRAORE
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