Jeudi 14 avril 1960 : le député André-Marie Mbida convoque une « Table Ronde ».
« …Dans son souci constant de trouver une solution efficace pour le dénouement de la crise camerounaise, M. André-Marie Mbida, ancien Premier ministre, leader du Parti des Démocrates Camerounais, et conformément aux demandes les plus impérieuses et aux vœux les plus ardents de presque toutes les populations camerounaises situées au-dessous de l’Adamaoua, en d’autres termes, les populations du Centre, du Sud, de l’Est et de l’Ouest du Cameroun, propose à tous les députés desdits secteurs géographiques une rencontre fraternelle le 21 avril 1960, au cours de laquelle ces députés traiteront les divers problèmes cruciaux que pose la prochaine rentrée parlementaire fixée au 3ème jeudi qui suit les élections générales, c’est-à-dire le 28 avril 1960.
Cette même réunion examinera le moyen efficace de la solution définitive de l’actuelle crise qui déchire notre patrie. Toutes les couches des populations camerounaises sont, en effet, fermement persuadées qu’une entente entre les représentants élus aboutira à la solution de la triste crise qui déchire, actuellement, notre pays, surtout les régions ou départements Bamiléké, Mungo, Wouri et Sanaga-Maritime, ainsi qu’à la disparition totale du régime établi par l’actuel gouvernement… »
A cet effet, M. André-Marie Mbida a adressé, depuis le 11 avril dernier à chaque élu, soit individuellement, soit au chef de liste, le télégramme suivant qui constitue une sorte d’appel à la réunion d’une « table ronde » : Suis heureux vous féliciter fraternellement et très vivement votre brillante victoire élections du 10 avril. Stop. Mes amis démocrates Camerounais et moi-même, souhaitons collaboration ou tout au moins solide coalition avec vous et tous les élus du Sud au sein de l’Assemblée Nationale dans intérêt supérieur notre patrie pour la sauver mauvais régime actuel et la tirer crise. Stop. Vous propose une rencontre entre tous élus Centre, Sud, Est, Ouest, jeudi 21 avril 1960 à Yaoundé. Stop. J’attends impatiemment votre réponse affirmative. Stop. Sentiments cordiaux ».
Après la publication de ce télégramme, Mbida André-Marie a convoqué un congrès du Part des Démocrates Camerounais : PDC.
Samedi 23 avril 1960 : congrès du Parti des Démocrates Camerounais.
Du samedi 23 avril au lundi 25 avril 1960, le Parti des Démocrates Camerounais, PDC, tenait son congrès à Yaoundé. A l’issue de celui-ci, MM. Oke Paul Président du congrès, et André-Marie Mbida, Président du parti, avaient adressé un télégramme au Secrétaire général des Nations Unies, M. Dag Hammarskjöld : « Protestons contre l’ingérence permanente, illégale et abusive de la France aux affaires intérieures du Cameroun, sur le plan politique, administratif, et militaire. Le départ des administrateurs français qui devront être remplacés par des techniciens français de bonne volonté ».
Après ce télégramme, il a fait adopter un « Programme Minimum National Commun »
Après ce télégramme, il a fait adopter un « Programme Minimum National Commun »
Mardi 26 avril 1960 : Adoption du « Programme minimum National Commun ».
Du 26 au 28 avril 1960, au domicile de M. André-Marie Mbida, 38 députés ont adopté un « Programme minimum commun » :
1/-amnistie générale et inconditionnelle ;
2/- formation d’un gouvernement provisoire de coalition chargé essentiellement d’assurer : a-départ des administrateurs des colonies français ; b-départ des chefs ou directeurs de services français partout où la relève peut être assurée ; c-préparer la refonte de la constitution ; d-dénoncer tous les accords franco-camerounais du 25 décembre 1959 ; e-résorber le chômage par la création de chantiers de jeunesse ; f-retrait des troupes étrangères suivi du renforcement des effectifs de l’armée camerounaise (engagement des maquisards dans l’armée régulière) ; g-réunification du Cameroun par la création d’une commission ad-hoc à l’Assemblée nationale et la mise en œuvre des moyens pra-tiques tels que, aide matérielle, création d’une mission permanente au Cameroun britannique.
1/-amnistie générale et inconditionnelle ;
2/- formation d’un gouvernement provisoire de coalition chargé essentiellement d’assurer : a-départ des administrateurs des colonies français ; b-départ des chefs ou directeurs de services français partout où la relève peut être assurée ; c-préparer la refonte de la constitution ; d-dénoncer tous les accords franco-camerounais du 25 décembre 1959 ; e-résorber le chômage par la création de chantiers de jeunesse ; f-retrait des troupes étrangères suivi du renforcement des effectifs de l’armée camerounaise (engagement des maquisards dans l’armée régulière) ; g-réunification du Cameroun par la création d’une commission ad-hoc à l’Assemblée nationale et la mise en œuvre des moyens pra-tiques tels que, aide matérielle, création d’une mission permanente au Cameroun britannique.
Signataires : Douala Manga Bell, Bebey Eyidi Marcel, Kanga Victor, Ndeffo Sébastien, Kamdem Ninyim Pierre, Soffo Tamafe Eloi, Tagne Abraham, Mopen Noé, Dissaké Hans, Makota Ngallé Daniel, Batonga Marc Max, Kemayou Happi Louis, Wandji Jean, Tenewa Emmanuel, Mayi Matip Théodore, Mbong Bayem Silas, Inack Martin, Bayick Tchoué Aaron, Edangté Edouard, Ngué Elie, Manga Mado Richard, Manga Bilé Blaise, Akono Claude, Zezoa Salomon, Effa Henri, Mballa Mvondo Barnabé, Noah Eugène, Mbida André-Marie, Tchoungui Elie, Atanga Gabriel, Tsala Mekongo Germain, Amougou Nguélé Paul, Puthon Ndékou Grégoire, Lontsi Daniel, Nonga Yomb, Schunmele Paul Louis.
Avril 1960 : les propositions de paix de Moumié Félix depuis Conakry.
De son côté, Moumié Félix, à la faveur d’une conférence de presse tenue à Accra au Ghana où il est réfugié, pose cinq conditions pour un arrêt immédiat de la guerre au Cameroun :
1/- que les élections législatives prévues pour le mois d’avril 1960, soient reportées au mois de juillet ;
2/- que les Etats africains soient autorisés à envoyer des observateurs à ces élections et la presse mondiale des correspondants ;
3/- dès lors que l’indépendance a été proclamée, que les troupes françaises soient immédiatement retirées du Cameroun ;
4/- qu’une amnistie totale et inconditionnelle soit décrétée ;
5/- que tous les détenus politiques soient libérés et tous les camps de concentration fermés.Si ces conditions sont acceptées, l’UPC, de son côté :1/- s’engage à ordonner un cessez le feu immédiat de la part de ses troupes ;
2/- garantit qu’aucun militaire français ou camerounais ne sera plus attaqué ;
3/- surseoira à la formation de son Gouvernement Provisoire de la Révolution Kamerunaise, G.P.R.K.
Réponse dédaigneuse du Premier ministre Ahidjo : « Monsieur Moumié, sous la protection et avec l’aide de pays étrangers, revendique la responsabilité du terrorisme et du banditisme. Monsieur Moumié est donc responsable de la présence au Cameroun des troupes françaises qui aident, provisoirement, les troupes camerounaises à protéger les populations Bamiléké, contre les crimes odieux de ses agents… » Bref : « niet ! ».
Bilan de « l’aide » des troupes coloniales françaises au Cameroun pour « protéger les populations bamiléké » :
24 avril 1960, incendie du quartier Congo, quartier dominé à l’époque par les Bamiléké ; bombardements au napalm pendant plusieurs mois en région bamiléké ; « train de la mort » au début du mois de février 1962 ; des milliers de têtes tranchées et exposées sur les places publiques, à Douala, à Mbanga, à Njombé, à Manjo, à Nkongsamba, à Melong, à Kekem, à Bafang, à Banganté, à Dschang, à Bafoussam, à Mbouda, bref, au Cameroun ; des centaines de villages rasés ; départ des troupes françaises cinq ans plus tard seulement, à savoir en 1965, au lieu de 1960 ; continuation de la guerre par l’armée du gouvernement et celle de l’U.P.C., l’Armée de Libération Nationale Kamerunaise, ALNK, jusqu’en 1970…
24 avril 1960, incendie du quartier Congo, quartier dominé à l’époque par les Bamiléké ; bombardements au napalm pendant plusieurs mois en région bamiléké ; « train de la mort » au début du mois de février 1962 ; des milliers de têtes tranchées et exposées sur les places publiques, à Douala, à Mbanga, à Njombé, à Manjo, à Nkongsamba, à Melong, à Kekem, à Bafang, à Banganté, à Dschang, à Bafoussam, à Mbouda, bref, au Cameroun ; des centaines de villages rasés ; départ des troupes françaises cinq ans plus tard seulement, à savoir en 1965, au lieu de 1960 ; continuation de la guerre par l’armée du gouvernement et celle de l’U.P.C., l’Armée de Libération Nationale Kamerunaise, ALNK, jusqu’en 1970…
Mercredi 15 juin 1960 : Charles Okala évite Ernest Ouandié et Osendé Afana à Addis-Abeba.
La Conférence des Etats indépendants d’Afrique tenue à Addis-Abeba, en Ethiopie, avait vu la participation d’une délégation de l’UPC en exil, composée d’Ernest Ouandié et de Castor Osendé Afana. Basés à Conakry, ils avaient effectué le déplacement en qualité de membres de la délégation guinéenne.
Ahmadou Ahidjo, pour sa part, y avait délégué, pour représenter le gouvernement camerounais, son Ministre des Affaires Etrangères, Charles Okala. Ce dernier, dès l’ouverture de la conférence, en avait été élu vice-président. Le soir de l’ouverture de la conférence, les délégations du Maroc, de la Tunisie et de la Guinée Conakry, avaient offert une réception conjointe à laquelle Ernest Ouandié et Castor Osendé Afana avaient été conviés. Aussitôt que Charles Okala les avait aperçu dans la salle, qu’il avait, sans plus demander son reste, quitté la réception, à la plus grande déception de l’ensemble des invités, qui avaient vu, à travers cette rencontre, une possibilité d’amorce de dialogue entre le gouvernement camerounais et l’UPC en exil.
Mercredi 17 août 1960 : Assassinat du Rev. Père Jean Courtecuisse à Ngambé.
Le Révérend Père Jean Courtecuisse de la congrégation du St. Esprit, accusé « d’intelligence avec l’ennemi », est abattu à coup de machette dans la ville de Ngambé, par des guérilleros de l’UPC. Ces derniers affirment, par la suite, que Jean Courtecuisse exigeait de ses ouailles qu’elles lui révèlent si elles étaient des sympathisants de l’UPC, et qu’elles confessent ainsi ce péché. Après quoi, il s’en allait s’ouvrir à l’armée française en opération dans la région.
Vendredi 7 octobre 1960 : Assassinat du Préfet Albert Khon près d’Eséka.
Vendredi 7 octobre 1960, le préfet Albert Khon du Nyong & Kellé a été assassiné au village Bekoboum II à quelques kilomètres d’Eséka et de la gare Bidjocka.
Accompagné du sous-préfet d’Eséka, du lieutenant de gendarmerie, du commissaire spécial M. Ngambi, du chef supérieur M. Bidjoka et d’un assesseur, le préfet Albert Khon s’est rendu au village Bikok-Boum où l’armée de l’Upc était signalée. Sur indication de l’assesseur, il est entré, suivi du sous-préfet, au domicile d’un individu déclaré « douteux ». Ce dernier, profitant d’un moment d’inattention du préfet et du sous-préfet, lui assena trois coups de machettes à la tête. Transporté d’extrême urgence à l’hôpital central à Yaoundé, il rend l’âme dans la soirée. Dans la même soirée, le commissaire M. Ngambi est abattu d’un coup de fusil de chasse.
Samedi 15 octobre 1960 : empoisonnement de Félix Moumié à Genève
Jean Martin Tchapthet, un étudiant camerounais en France, militant de l’UPC, témoigne : « Le 15 octobre 1960, Tchaptchet quitte l`hôtel Rex en compagnie de Moumié. Ils ont rendez-vous avec un présumé journaliste du nom de William Bechtel. Ce dernier a rencontré le président de l`Upc un an plus tôt, à Accra. Pour l’Upc, il est particulièrement important d`établir un contact avec la presse. C’est le seul moyen d`alerter l`opinion internationale sur son action. William Bechtel a réservé la table 5 au restaurant huppé « Le Plat d’argent ».
Selon le témoignage de Jean-Martin Tchaptchet au micro de Frank Garbely, le réalisateur du documentaire « Mort à Genève – l’empoisonnement de Félix Moumié », il n`y avait personne d`autre dans la salle : « Il ne me souvient pas qu`il y avait des voisins immédiats. M. Bechtel était derrière une paroi et puis derrière le président Moumié et moi, il y avait juste un passage que le garçon pouvait emprunter pour servir à manger. Il n`y avait personne d`autre dans la salle ». Avant le plat principal, Moumié boit un verre de Pernod. Selon le rapport de la police fédérale suisse, il y avait un gramme de thallium, un poison « inodore et insipide ». L`ancien dirigeant de l`Upc n`en revient pas encore : « Je ne sais pas à quel moment cela est arrivé. On regardait les photos qu`il présentait. C`était des photos de lui avec le président Moumié à Accra. Il y avait une atmosphère de confiance ». Peu après 23h, William Bechtel prend congé. Moumié accompagne Tchaptchet à l’hôtel et se rend 44 rue des Papis où l’attend Liliane F., une présumée belle de nuit qui aurait partagé ses derniers moments. D`après les mêmes sources, Liliane, surnommée Le Perroquet, conduira le président Moumié dans une clinique privée. Transféré à l`hôpital cantonal le lendemain à 23h30, il sombrera dans un profond coma, avant de mourir la 3 novembre ».
Enoh Meyomesse
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