Qu’est ce qui nous inspire dans la conception et la mise en œuvre de nos programmes économiques ? La question traverse mon esprit depuis quelque temps. J’ai donc choisi de relire les quelques ouvrages et visiter les concepts que j’ai rencontrés sur mon chemin et ceci depuis quelques années déjà. Il me semble que les modèles économiques élaborés par les économistes du développement des années 60, fondés sur l’idée des industries industrialisantes, semblent de plus en plus perdre de leurs adeptes inconditionnels. Le développement économique d’un pays ou d’une région n’est plus tributaire du développement du secteur secondaire soit de l’industrie lourde.
Le développement est l’expression d’une dynamique économique efficiente basée sur l’adaptation de l’offre des biens et services à la demande exprimée. Le développement est l’expression d’une dynamique économique efficiente basée sur l’adaptation de l’offre des biens et services à la demande exprimée. La mondialisation et la globalisation des économies du monde nous imposent une approche singulière de la problématique de la croissance et du développement économique, et un pragmatisme dans l’élaboration des modèles de politiques au niveau de précision d’une action chirurgicale. Nous n’avons pas le professeur Carson ici sur le continent mais tous ceux qui sont familiers de la chirurgie comprennent le parallèle. Dans ce contexte de compétition internationale et de concurrences tous azimuts, et compte tenu des ambitions légitimes, du moins et tout au moins du Cameroun dans la sous-région, comment l’économie camerounaise peut-elle contribuer à la conquête économique du continent le plus convoité du monde, l’Afrique? Comment mettre en exergue ses propres atouts, tout en tenant compte de ses propres limites? Le rapport Védrine loin d’être une attaque en règle nous inspire.
Gisement pour la croissance mondiale
Aujourd’hui plus que jamais, l’Afrique semble être un gisement pour la croissance mondiale dans les prochaines décennies! L’Europe, l’Amérique ou plus globalement les pays de l’OCDE peinent à repousser les ondes de la récession depuis la fin de l’année 2008. La croissance chinoise, les pays du groupe BRIC, et les autres pays dits émergents, observent une relative décélération de leurs économies et un certain «tassement» des indicateurs de croissance économique.
L’Afrique va jouer ce rôle de locomotive des économies du monde pour les prochaines décennies, mais afin d’assurer cette tâche, elle mérite d’être traitée en «partenaire» et non comme une proie riche en matière première comme semble le suggérer avec insistance le rapport Védrine.
L’Afrique est, d’ailleurs, agacée par ces «mercantilistes» du XXIe siècle avides de ses richesses naturelles, ou qui cherchent à vendre à sa population tout bien dès lors qu’il y a un bénéfice dans la transaction.
Ces deux constats sont actuellement des faits, et non des hypothèses d’un modèle de théorie économique. L’Afrique a besoin de partenaires qui opèrent dans une logique gagnant-gagnant et qui agissent dans l’optique d’intégrer les économies des pays de l’Afrique dans l’économie mondiale. En bref, des partenaires soucieux de son développement économique et qui agissent dans l’intérêt de sa population, de ses propres structures économiques et par voie de conséquence dans l’intérêt des économies mondiales.
Or, l’intérêt de l’Afrique ne se limite pas aux exploitations minières, agricoles, forestières, halieutiques et énergétiques, il est d’abord dépendant des structures organisationnelles et structurantes de ses économies. Sans celles-ci, l’effet multiplicateur – au sens keynésien du terme – des investissements dans la production et l’exploitation des activités citées plus haut (famille des secteurs économiques primaires et secondaires) est réduit à sa plus modeste expression.
L’Afrique a cruellement besoin pour son développement «auto-entretenu des partenaires» des activités de services qui sont à la fois la trame de fond et les autoroutes de croissance et de développement des autres activités des secteurs primaires et secondaires, telles les veines et les artères dans un corps humain!
Des opportunités pour le Cameroun
Parmi les secteurs des services offrant de grandes opportunités pour les opérateurs camerounais, nous citons notamment: le secteur minier. Le Cameroun est reconnu aujourd’hui comme l’une des plus grandes réserves minières du monde avec des voisins qui n’en sont pas dépourvus mais qui compte sur lui. Il reste donc au Cameroun a créer rapidement un marché réel de détection, de taille et de négociation minière.
Le secteur des transports et logistiques
Les besoins du continent africain dans ce secteur sont énormes. En Afrique centrale peut-être encore plus, avec le Tchad, la RCA, la Guinée Equatoriale et dans une moindre mesure le Gabon qui même avec pour certains une ouverture sur la mer compte sur le Cameroun pour leurs ravitaillement. Tout est donc à faire depuis l’organisation pure et simple d’un parc d’outils de transport (avions, bateaux ou véhicules terrestres) jusqu’à l’harmonisation des différents types de transport et l’implémentation de circuits de transports et logistiques assistés par ordinateurs. La compagnie aérienne nationale, c’est vrai, portée à bout de bras par les finances publiques se doit de faire des efforts pour une autonomie et ainsi faire du Cameroun dans la sous-région un « hub » en la matière. En revanche, des voies maritimes sont à créer très vite, alors que le transport routier continental est encore dans un stade embryonnaire! C’est peut-être aussi ici que le dynamisme de la population est à solliciter pour la libre circulation des hommes et des biens dans la sous-région. C’est le lieu ici de souligner et de rappeler que la libre circulation n’est pas synonyme de libre installation.
Le secteur de la distribution (grandes surfaces)
Nous avons de nombreuses difficultés à faire émerger ce secteur. Pourquoi ? Plusieurs raisons peuvent être convoquées. Le « made in Cameroon » a du mal à voir le jour malgré la création de l’ANOR. Il y a nécessité de transformation de nos produits en interne avec en premier une distribution en interne avant de penser à une exportation. Des pays comme l’Inde, la Chine, le Japon sont passés par là. Il faut arriver à créer des enseignes et ne pas laisser cet espace aux groupes français, indo-pakistanais, chinois et espagnol. Si nous ne créons pas des enseignes et n’occupons pas cet espace encore vierge, d’autres le feront bientôt.
Le secteur des télécommunications et des services de traitement de données
La conquête des opérateurs nationaux de téléphonie mobile est déjà, certes en retard, entamée, se fait lentement du fait de la lourdeur des investissements et de la concurrence ardue. L’opérateur historique national CAMTEL est en terme de qualité de service notamment dans le secteur de l’Internet le meilleur, mais il doit faire des efforts pour s’implanter dans les zones rurales ce t’autant plus qu’il est l’unique installateur et distributeur de la fibre optique. Oui le « software » peut-être amélioré et nous pouvons déplorer qu’Eto’oTélécom n’ait pas fait long feu. Dans un avenir que nous voulons proche il est à souhaiter que le marché local soit ouvert aux opérateurs du continent.
Les services de l’éducation et de la formation
Les besoins des économies africaines sont énormes pour ce secteur, leur développement en est largement tributaire. L’expérience camerounaise est lacunaire à l’intérieur du pays mais dans la sous-région, elle fait autorité. Elle peut et doit donc être partagé avec ses voisins. Nous voyons à Yaoundé, Douala, Bamenda, comment le secteur privé soutient le secteur public dans l’éducation et l’enseignement. Nos universités et autres grandes écoles s’ouvrent de plus en plus au monde de l’entreprise. Ce n’est pas encore une réussite, il faut donc beaucoup d’initiatives et même de l’audace. En réalité pour parler de «success story» nous devons accepter de nous inscrire dans une logique de co-développement et de coopération Sud/Sud.
Les services de la santé
Dans ce domaine également, le secteur privé camerounais stagne et est presque inexistant ! La polyclinique sainte Anne à Yaoundé a fermé, la clinique du Bon Secours du professeur René Essomba, semble avoir disparu avec son créateur tandis que la polyclinique Fouda n’est plus que l’ombre d’elle-même. Ce qui est vrai à Yaoundé l’est aussi à Douala avec la Clinique Soppo Priso. Nous ne pouvons donc pas dire que le secteur privé a pris le relai des hôpitaux publics. Il est important de mener à présent une réflexion juridique en la matière et nous interroger sur la conception que nous avons de la médecine et de la santé dans notre pays en premier et dans la sous-région par la suite. Nous regorgeons toutefois des professionnels de la santé aux capacités professionnelles et managériales qui ne souffrent d’aucun doute. Il nous reste à mettre à profit tout ceci et à créer des plateaux capables de répondre aux besoins des populations.
Les services d’études et d’ingénierie
Les besoins du continent africain en infrastructures de base sont colossaux (habitats-logements, routes, ports, aéroports, ponts, tunnels, travaux publics, etc.). Chaque projet nécessite des études d’ingénierie au préalable. Les bureaux d’études et les sociétés d’études et conseils établis au Cameroun doivent jouer un rôle pour soutenir en amont la réalisation de ces projets par des entreprises camerounaises compétentes.
Rôle économique prépondérant
Pays africain par excellence, le Cameroun bénéficie de plusieurs atouts indéniables pour assumer un rôle économique prépondérant dans l’arrimage des économies de la sous-région à l’économie mondiale. Parmi ces atouts, nous citerons notamment son histoire, géographie, culture, absence de passif colonial, importance du secteur tertiaire de sa propre économie, etc. De par sa ressource humaine et le savoir-faire de celle-ci, le Cameroun confère à ses acteurs économiques un avantage certain dans la conquête économique de l’Afrique, dès lors que ces derniers (acteurs publics ou privés) mettent l’accent sur les besoins primordiaux et nécessaires pour le développement des économies africaines. Besoin liés, tout d’abord, aux services.
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