Lettre ouverte à son Excellence Paul Biya - Par Michel Michaut Moussala

Excellence, 

M'adressant à vous à travers cette autre missive, je voudrais vous signifier que le pays va mal au point de me donner l'impression que nous vivons une atmosphère de fin sans nom. En effet, après votre périple européen d'un peu moins d'un mois qui vous aura respectivement conduit à Bruxelles au sommet union européenne union africaine achevé le 03 avril et pour lequel vous aviez quitté le pays le 1er avril 2014, Certes, vous êtes réapparu le 25 avril à Rome, à l'occasion de la canonisation des Papes Jean XXIII et Jean Paul II, après une disparition d'un peu plus de trois semaines, Pendant ce temps, vos compatriotes étaient sans nouvelles de vous. Etiez-vous souffrant, en villégiature ? Nul ne saurait répondre à ces interrogations. Toutefois, votre absence fait assimiler le Cameroun au seul pays au monde dirigé par un pilote automatique, car il n'est point besoin de votre présence au pays, les conseils de ministres y étant un phénomène rarissime. Et quand par extraordinaire le Nnom Ngui en convoque un, il dure généralement moins de trente minutes et se confine à une communication unidirectionnelle sans aucune possibilité de débat. A contrario, les conseils de cabinet se tiennent effectivement chaque mois. Mais on voudrait bien demander pour quelle utilité, tant il est vrai que le Premier ministre, soit disant chef du gouvernement n'est en fait que le premier d'entre les ministres, Certains ministres au sein de son gouvernement sont même plus puissants que lui et, en permanence le secrétaire général de ses services veille au grain. C'est donc un Premier Ministre sous haute surveillance. 


Excellence, vos compatriotes à vos retours d'Europe, vous considèrent comme un Chef d'Etat en transit car vous adorez la Suisse et je ne sais même pas pourquoi la Confédération helvétique ne vous offre pas la nationalité suisse, étant entendu que vous y séjournez chaque année pendant au moins 90 jours. Toutes choses qui confèrent au secrétaire général de la présidence de la République et au secrétaire général des services du Premier ministre de piloter le pays aux risques et périls des populations. 

Excellence, j'ai appris à travers mes antennes que vous êtes en pourparlers avancés avec le Vatican pour une éventuelle visite officielle au Cameroun du pape jésuite François 1er. Cependant, je me pose une question: en 1985 et 1995, le pape Saint Jean Paul II avait effectué deux visites officielles au Cameroun. 

En mars 2009, le pape Benoît XVI avait effectué une visite officielle au Cameroun. Vous avez effectué plusieurs visites officielles au Vatican et Jean Paul II, Benoît XVI et François ler vous ont tous reçu plusieurs fois. Qu'est-ce que le pays et les Camerounais gagnent de ces visites au plan spirituel car, le pays s'est davantage enlisé dans le mal, les sectes, la mal gouvernance. Or, ces visites auraient dû être bénéfiques au Cameroun et aux Camerounais. 

Malheureusement, le pays va mal et le niveau de vie de vos compatriotes décline. Vos visites officielles à Rome et les séjours des souverains pontifes au Cameroun n'ont aucune retombée bénéfique. Le pays va mal et les nuages ne font que s'accumuler à l'horizon. A preuve, en dépit de votre loi d'amnistie ou de commutation de peines en février dernier et malgré la libération de beaucoup de personnalités alors incarcérées pour détournements de deniers publics, Me Alice Nkom jusqu'alors active dans la défense des homosexuels, n'a pas hésité de commettre il y a quelque temps, une association de prisonniers politiques au Cameroun. Aussi est-on en droit de se poser la question de savoir si ladite loi d'amnistie ou encore cette commutation de peines excluait les personnalités interpellées pour détournements de deniers publics? 

Dans le sillage de cette association, on pourrait également Se poser des questions sur le récent acquittement de l'ancien délégué du gouvernement auprès de la communauté urbaine de Douala, par ailleurs ancien président du conseil d'administration du Port autonome de Douala, le colonel Nathanaël Edouard Etonde Ekoto. Pourquoi aurait-il dès lors passé huit ans derrière les barreaux pour se voir acquitté? Dans cette affaire ayant opposé le Port Autonome de Douala à certains anciens responsables de cette entreprise, seul Siyam Siwe a écopé de 25 ans de-prison, tous les autres sont acquittés purement et simplement. Ces acquittements remettent ainsi au goût du jour, les récriminations à l'encontre de l'Opération Epervier qualifiée à juste titre d'être à tête chercheuse pour de vulgaires règlements de comptes à mettre sur le compte de velléités successorales de quelques dauphins putatifs. 

Analyse faite et avec suffisamment de recul Excellence, cette opération, à la longue, finira par discréditer le pouvoir judiciaire. En effet, pour des acquittements qui interviennent après le maintien en prison pendant de longues années des personnalités prétendument pour détournements de deniers publics, ceux-ci mettent à mal le système judiciaire et semblent plutôt entériner l'inféodation dudit pouvoir judiciaire au pouvoir exécutif Comme pour conforter cette thèse, comment comprendre autrement le véritable cafouillage que les Camerounais ont vécu les 31 mars et 1er avril 2014, suite à l'arrestation et à la mise en liberté de Louis Bapès Bapès. Quel que soit le côté où l'on se trouve, on y perçoit une immixtion de l'exécutif dans le judiciaire. 

A l'occasion, la justice aura vacillé car, il a suffi d'un courrier émanant du Sgapr, Agbor Tabi, en l'absence du Sgpr aux Usa, adressé directement au procureur général du Tribunal Criminel Spécial pour que Louis Bapès Bapès soit interpellé. Et au sortir de cet imbroglio, quels vont désormais être les rapports entre ce dernier et Agbor Tabi, pourtant très lié à Titus Edzoa en 1997? Certes en bon politicien le garde des sceaux qui pourtant représente la chancellerie a préféré se mettre à l'écart de ce tourbillon, mais aurait-il pour autant altére les récriminations d'inféodation à l'exécutif à l'encontre du judiciaire? 

Excellence, un autre point préoccupe les Camerounais depuis votre retour de Rome, c'est l'urgence d'un remaniement ministériel car au-delà du cas Bapès Bapès dont on attend la sortie du gouvernement, il urge d'impulser une nouvelle dynamique pour se donner davantage de chances d'implémenter avec succès notre plan d'émergence. C'est donc une question de temps et d'opportunité. Et dans cette optique, il est désormais établi que certains de vos collaborateurs ne vous rendent véritablement pas service, tout au moins pour ce qui est de certains projets de décision. C'est ainsi que durant tout le mois d'avril, l'agence de régulation du secteur de l'électricité (Arsel) et Aes Sonel ont alimenté une certaine tension au sein des consommateurs en entretenant l'idée d'une hausse du tarif du Kwh d'électricité. Il aura fallu une opposition du Race pour que les initiateurs de cette diabolique machination l'abandonnent. Mais ce n'est que partie remise car, le jour de la réunion y relative à la Primature, Aes Sonel n'était pas représentée. Si cette augmentation avait eu lieu, on aurait eu droit aux mêmes émeutes de la faim de février 2008, consécutives à l'augmentation du prix du carburant à la pompe. Fort heureusement, votre discours musclé en direction des sorciers et apprentis sorciers avait eu raison des émeutiers. 

Excellence, votre temps est très précieux et je préfère arrêter mes jérémiades, mais elles traduisent l'état de l'opinion, même comme on ne gouverne point avec l'opinion publique. A la semaine prochaine.

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