Corruption dans la filière banane.Me Charles Nguini a présidé la cérémonie de publication des résultats de l’enquête que ses équipes ont menée à Njombe-Penja.Les deux premières phrases de la conclusion du rapport d’enquête rendu public ce 06 août 2014 résument à elles seules la manière avec laquelle l’agro-industrie de la banane alimente la corruption et la violation des droits de l’homme, de l’avis de Transparency international Cameroon (TI-C). «Les différents volets de l’affaire Paul Eric Kingue montrent finalement comment le département du Moungo et l’arrondissement de Njombe-Penja sont pratiquement mis en coupe réglée par les grandes compagnies agroindustrielles qui y sont installées, peut-on lire. En effet, ces groupes agroindustriels ont développé de véritables colonies concessionnaires dans les zones d’exploitation qui leur sont attribuées, s’y comportant comme s’ils étaient dans de véritables fiefs ». Le principal accusé est Les Plantations du Haut Penja (PHP) accusé de deux types de forfaiture. La première est d’user de moyens occultes «pour infléchir la balance de la justice en sa faveur». Les enquêteurs de TI-C pointent notamment du doigt le procédé «nocif et nuisible» d’un groupe capable de faire jouer ses ressources et ses réseaux dans les circuits administratifs et politiques «pour mettre hors d’état de nuire» une personnalité qui leur demande des comptes telle que l’ancien maire de la commune de Njombe-Penja.
Lors de la cérémonie de mercredi, le président de TI-C a qualifié Paul E. Kingue d’«héros-martyr» de sa ville en indiquant clairement que les condamnations dont fait l’objet l’ancien édile sont consécutives à sa volonté de voir les producteurs de banane payer leurs impôts après 30 ans d’incivisme fiscal. Le rapport revient sur l’enchaînement de faits qui l’ont conduit en prison et comment le fameux ‘‘rouleau-compresseur’’ a été mobilisé pour le maintenir toujours plus longtemps derrière les barreaux. TI-C souligne notamment des vices de procédures au niveau des juridictions chargés de connaître des divers chefs d’accusation. Le ministère de l’Administration territoriale (NDLR à l’époque dirigée par Marafa Hamidou Yaya) est également dénoncé pour avoir destitué M. Kingue de ses fonctions de maire de Penja avant même qu’une chambre judiciaire ne reconnaisse sa culpabilité.
Droits de l’homme et pollution.
«Je ne souhaite pas que vous dites que nous sommes allés à Njombe seulement pour discuter du cas de Paul Eric Kinguè… Ce serait faire injure à tous ceux qui souffrent sur le terrain», tempère Charles Nguini. Les investigations de ses équipes imputent en effet une seconde forfaiture à PHP – et à la Société des Plantations du Moungo. Celle-ci est relative à la violation des droits des communautés riveraines et de ceux de ses travailleurs. Il est inconcevable, s’insurge le directeur exécutif de TI-C Roger Ngoh Yom que quelqu’un gagne 28 000 francs CFA par mois alors qu’il travaille 10 heures par jour et 06 jours par semaine. Impossible pour ces petites mains de se plaindre aux autorités administratives ou judiciaires qui semblent toutes subir la pression de PHP. A l’image du litige qui l’oppose au GIC des planteurs et autres fruits de Njombé-Penja, l’entreprise agro-industrielle multiplie les actes de pression sur tout ce qui s’oppose à ses appétits fonciers.
La réaction de Charles Nguini après la cérémonie de présentation à Yaoundé le 06 août 2014
Dans cette dernière affaire aussi, Transparency rend compte d’un climat qui laisse croire que «le groupe bananier PHP use de sa puissance économique et financière pour peser sur les institutions judiciaires». Et le chapelet des reproches faits à la filiale des groupes Compagnies Fruitières ne s’arrête pas là. L’entreprise est responsable de la multiplication et de la récurrence des faits de pollution, apprend-on. Contrairement aux prescriptions légales, le rapport de TI-C indique qu’aucune étude d’impact environnemental n’a été commanditée depuis la mise en place de la plantation. D’autre part, PHP ne se préoccupe pas des conséquences que l’utilisation de produits chimiques destinés à l’entretien de la bananeraie pourrait avoir sur les populations riveraines mais surtout sur ses employés qui y sont quotidiennement exposés.
Pour l'instant PHP n'a pas encore répondu à ces accusations qui ne sont pas nouvelles. On se rappelle qu'il y a quelques mois, l'entreprise avait réagi à la suite d'une enquête publiée par la chaîne de télévision française France 2. Sa position a été de rejeter en bloc les accusations de délinquance fiscale, d'exploitation indue de sa main-d’œuvre et de pollution.
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