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Cameroun: Fondamentalisme, terrorisme, rébellion… Y-a-t’il un «Boko-Haram» camerounais ? par Joseph OLINGA N.

Avant que Boko-Haram ne s’en mêle, les trois régions du Nord Cameroun, les plus touchées par ses attaques armées, vivaient sous la crainte des coupeurs de route, des voleurs de bétail des braconniers et autres incursions de rebelles venus du Tchad et de la République centrafricaine. Des phénomènes vaincus avec une certaine efficacité par les forces spéciales camerounaises. La région qui partage une longue frontière avec le Nigeria est en ce moment sous le coup d’une activité criminelle sans précédant. A l’enlèvement de la famille Moulin-Fournier, de nationalité française revendiquée par la secte islamiste Boko- Haram, l’Extrême-Nord Cameroun connait des enlèvements et des attaques non revendiqués. 

Organisation à l’idéologie confessionnelle à ses débuts, les incursions, assassinats et affrontements vécus désormais à l’intérieur du Cameroun laissent dire à nombre d’observateurs que le mode opératoire se démarque de celui de la secte Boko-Haram dont la zone d’activité est le Nord du Nigeria. Dans la presse nationale et internationale la thèse de l’éventualité d’une collusion entre la terminologie de la secte et la rébellion fait florès sans que les autorités n’apportent plus de précision. Chercheur à la fondation Paul Ango, Stéphane Akoa soutient pour sa part que «dans un contexte géopolitique mondial où s’organise des stratégies fondées sur l’hypothèse de la pénurie en pétrole, l’Afrique centrale en particulier est devenue une pièce non négligeable des grandes manœuvres pour le contrôle de cette rente.» 



Intégrisme ou rébellion armée? 

Leader politique, Ngouo Woungly Massaga, explique que cette menace qui fait trembler le Cameroun doit être vue sous les prismes du rançonnement, d’un souci d’expansion idéologique mais aussi sous l’angle d’une menace systémique. Toutefois, précise le Commandant Kissamba, «l’objectif stratégique de Boko Haram en tant que groupe intégriste radical est d’œuvrer à l’islamisation totale de l’Afrique par la violence, la pratique d’un islam radical, appliquant la Charia.» En clair, soutient cette source, la menace Boko-Haram n’est pas ponctuelle comme pourraient le percevoir d’aucuns. «Elle est stratégique et elle porte sur le long terme et vise le mode de vie des Africains.» 

Membre titulaire du Comité central du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), Hervé-Emmanuel Nkom entend dissocier les activités criminelles qui se déroulent dans l’Extrême-Nord avec le mode opératoire de la secte islamiste Boko-Haram. Pour cet acteur politique, «Le Boko-Haram qui est considéré jusqu’à présent comme un objet de prise de pouvoir au Nigeria est devenu une menace pour la sécurité intérieure du Cameroun.» A ce propos, Hervé-Emmanuel Nkom souligne que «la menace de déstabilisation que connait le Cameroun en ce moment est vraisemblablement orchestrée par des personnalités politiques originaires du Nord.» En clair, estime ce militant du Rdpc, c’est un cheval de Troie. 

Politologue, Mathias Owona Nguini ne relativise pas la piste Boko-Haram. Une secte, soutient cet analyste, qui représente une menace sérieuse pour la sous-région. Néanmoins, consent Dr Owona Nguini, «l’implantation de ce groupe pourrait en outre susciter des soutiens locaux, ce qui aurait pour effet de déstabiliser le contrôle politique que les Etats exercent sur leur population.» Dans le même temps, cette source pense que «Boko-Haram pourrait renforcer non seulement l’islamisme radical mais surtout les partisans de l’action armée.» 


Possibilités de compromission 

C’est une conception qui semble partagée au sein des formations politiques. Président de l’Union démocratique du Cameroun, Adamou Ndam Njoya suggère de reconnaître les échecs pour prévoir et prévenir «les phénomènes Boko-Haram, les pirateries et autres pour s’employer à remonter aux origines internes et externes de ses sources.» Pour Emmanuel-Hervé Nkom, il faut se détourner de la piste confessionnelle. Pour ce cadre du Rdpc, la possibilité des compromissions chez les apparatchiks est grande. Il s’agirait selon lui «des personnes nostalgiques du coup d’Etat manqué de 1984 et de celles qui pensent que le moment est venu de prendre le pouvoir.» 

Toutefois, il faut éviter les risques de stigmatisation. A l’analyse, il faut relativiser la capacité de «ces élites» à rallier les populations locales à leur entreprise de déstabilisation. «La difficulté serait de rassembler les populations de l’Extrême-Nord, en majorité chrétienne, à une cause islamiste.» Une appréciation que partage le politologue Mathias Owona Nguini, pour qui «dans un pays comme le Cameroun, où il existe beaucoup de religions, ça pourrait entraîner des tensions interconfessionnelles, alors que le Cameroun est parvenu jusqu’ici à une gestion relativement satisfaisante des relations entre les confessions.» A la lecture de la confusion qui entoure la compréhension des évènements qui se déroulent à l’Extrême-Nord, Hervé-Emmanuel Nkom pense «qu’il faut prendre en compte toute les hypothèses éventuelles. D’autant plus que la proximité dangereuse de certaines élites visiblement intermédiaires de ces groupes et la confusion du sérail dans la compréhension de ce phénomène affecte l’opinion.» 
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