De nombreux
chefs d’Etat africains seront à la croisée des chemins en 2015 et 2016. Ils
devront choisir entre se maintenir contre vents et marées au pouvoir ou préparer
leur succession. Ce débat fait déjà rage en République démocratique du Congo
(RDC) où Joseph Kabila ne peut plus, en théorie, se représenter en 2016. C’est
aussi le cas au Burundi, puisque Pierre Nkurunziza est soupçonné de vouloir se
représenter, alors que la loi fondamentale n’autorise que deux mandats.
Au Congo
Brazzaville, Denis Sassou NGuesso, est lui également confronté à l’article 57
de sa Constitution qui l’empêche de se représenter en 2016. En effet, M.
NGuesso, selon les termes de la Constitution congolaise adoptée en 2002, doit
rendre le tablier en 2016. De plus, l’homme est frappé par la limite d’âge (70
ans). Qu’à cela ne tienne, ses partisans, à travers le Parti congolais du
travail (PCT) ne l’entendent pas de cette oreille.
En effet, à l’occasion
d’un congrès du PCT tenu dans la dernière semaine du mois de décembre 2014, les
membres du bureau politique, dans leur quasi-majorité (46 oui contre 1 non), se
sont prononcés en faveur d’une révision de la Constitution, vieille seulement
de 12 ans.
Le chef de l’Etat
congolais, quant à lui, dans son message à la nation, s’est félicité de la
vitalité de la démocratie, et mis en garde ceux à l’intérieur du pays qui
voudraient voir le pays sombrer dans le chaos, non sans avoir auparavant
signifié que c’est aux Congolais de résoudre les problèmes congolais. Allusion à
peine voilée aux donneurs de leçons de démocratie. Suivez notre regard. Pour
tout observateur avisé de la scène politique africaine, ces différents cas de
figure donnent une impression de déjà-vu, notamment au Burkina Faso avec Blaise
Compaoré. Celui-ci, on se souvient, en dépit des nombreuses contestations de l’opposition
et des mises en garde venant de toutes parts, a tenté vaille que vaille de procéder
à la modification de l’article 37. Au Niger, bien avant, c’est Mamadou Tandja
qui est allé ‘‘tout droit dans le mur’‘. Et comme ce fut le cas de Blaise
Compaoré au Burkina Faso, Pierre Nkurunziza, Joseph Kabila et Denis Sassou
NGuesso font la sourde oreille, alors qu’ils sont les principaux concernés. Les
prochaines échéances électorales ? ‘‘C’est encore loin. Ma principale préoccupation,
c’est le bien-être de nos populations’‘ ou encore ‘‘nous aviserons le moment
venu’‘. Ces ‘‘déficients’‘ démocrates vont même jusqu’à menacer ‘‘ les médecins
‘‘, qui viennent ou tentent de venir à leur chevet. La suite, c’est la mort
subite Que se passe-t-il dans la tête de nos chefs d’Etat africains ?
A moins d’être
frappé de myopie intellectuelle, rien ne justifie un tel aveuglement.
Malheureusement, ces ‘‘pères-fondateurs’‘, ces ‘‘guides éclairés’‘ et autres
timoniers semblent manquer cruellement de bon sens et de discernement. Le
pouvoir sans doute grise son détenteur. De plus et pour reprendre le titre de l’ouvrage
de l’écrivain ivoirien Ahmadou Kourouma, les palais présidentiels africains
sont remplis de tout, sauf de ‘‘diseurs de vérité’‘. C’est souvent le cas chez leurs
nombreux courtisans, conseillers spéciaux et militants regroupés dans un parti,
prétendument qualifié de ‘‘majoritaire’‘ (ou mangeonritaire ?). Sinon, comment
comprendre, ce qui s’est passé au Burkina Faso risque de se dérouler sous nos
yeux au Burundi, en RDC et au Congo Brazzaville. Voir tout un parti regorgeant
d’intellectuels, de cadres aux compétences diverses, soutenir des projets
iniques dans LE SEUL dessein inavoué et malsain de maintenir un individu et son
clan au pouvoir, est tout simplement lamentable. Pire, les Africains, notamment
leurs dirigeants, donnent l’impression de ne tirer aucun enseignement des
erreurs du voisin. Comment expliquer cela ? Loin de sombrer dans des considérations
métaphysiques gratuites, le problème de la pratique de la démocratie en Afrique
est peut-être spirituel. Soit. Une certitude cependant demeure. Pour
paraphraser l’ancien président français, Nicolas Sarkozy, les Africains, leurs
inamovibles présidents en tête, ne sont, sans doute, pas assez rentrés dans la
démocratie.
Aubin W. NANA, nanaubin@yahoo.fr
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