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Humanisme : larmes et sueurs en milieux hospitaliers camerounais par Vitalis Essala

La chronique de Monique Koumate a embrasé langues et lèvres à qui mieux mieux. Réseaux sociaux et médias traditionnels ne sont pas encore revenus de leur battue sur ce phénomène rapidement devenu viral. Phénomène qui, somme toute, a révélé la face oubliée du Cameroun profond.

D'aucuns en ont fait une ligne de tire sur le gouvernement et la personne de Biya. D'autres ont choisi de couver leur président et de blâmer cette tragédie - qui en reste une - sur le coup du sort. Et, sans envie gourmande de reproduire l'écho de ce cri de détresse qu'ont lancé en choeurs les infortunés de Koumate et jumeaux, voici un témoignage authentique d'un camerounais qui vous ouvrira peut-être les yeux sur un fait qui reste réel au Cameroun et que nul ne peut se donner la permission de douter. Ce témoignage vous est rapporté tel que recueilli de son auteur, en intégralité.

" En fin novembre 2014, j'étais en visite au Cameroun. Une étrange masse avait pris le plaisir de se loger dans ma gencive et m'avait forcé à aller voir un médecin. Le jeune médecin qui m'avait reçu avait l'air talentueux. Son diagnostic était quelque peu effrayant. Il avait dit que j'avais une tumeur dans la bouche. La seule façon de traiter cette condition était une intervention chirurgicale rapide, avait-il ajouté. Mais, tout honnêtement parlant, il m'avait dit que seul le professeur Foé pouvait réussir une telle opération au Cameroun et qu'il travaillait au Centre Hospitalier Universitaire (CHU), à Yaoundé. Du coup je me suis dit que s'il fallait engager une telle longue procédure médicale risquée, il fallait plutôt retourner aux Etats-Unis où les soins seraient largement meilleurs. Trois jours plus tard j'étais aux Etats-Unis.

Le médecin qui m'avait reçu au Cameroun avait dit que la tumeur était bénigne, c'est-à-dire qu'elle n'était pas cancéreuse. C'est le même constat qu'avait fait le médecin qui m'avait accueilli aux Etats-Unis après la biopsie. La biopsie est une technique de prélèvement d'une partie du corps pour des tests en laboratoire. Cette biopsie était concluante sur le fait que la tumeur était non cancéreuse.

En début janvier 2015, je me suis fait opérer. Tout mon palais avait été enlevé, quatre molaires enlevés et la mâchoire supérieure droite coupée en deux et enlevée. Vous vous demandez comment est-ce que je mangeais après tout ce charcutage ? Bien pensé. Je ne mangeais pas. Je prenais ma nourriture par un tuyau. Lors de l'opération, on avait percé mon estomac et y avait introduit ce tuyau qui ressortait par le dessus du nombril et retenu sur place par des petits disques en plastique. C'est là que je versais une formule médicale qui partait directement dans mon estomac. J'ai porté cela pendant sept mois et demi.

Bien sûr j'avais perdu la parole. Pendant des mois je n'arrivais pas à parler. Mais écoutez ceci. Si vous pensez avoir tout appris aujourd'hui, écoutez ce qui va venir. Dix jours après l'opération, la clinique a appelé. Le docteur voulait me voir. Arrivé là-bas avec mon ami, le docteur nous a révélé la nouvelle la plus désarmante qui soit : la supposée bénigne tumeur était en fait cancéreuse. Après l'opération, son instinct a poussé le chirurgien à envoyer cette tumeur à l'hôpital Johns Hopkins au Maryland. C'est un hôpital très emblématique. C'est là-bas qu'ils ont pris la peine de disséquer cette tumeur et la passer au crible le plus fin. Et au beau milieu de ladite tumeur était le cancer. "

Ce témoignage est émouvant. Mieux encore, il révèle un assez grand nombre de vérités qu'il est bien de relever. Tout le monde n'a pas la chance d'aller se faire traiter aux Etats-Unis. La personne qui donne ce témoignage était parmi les rares camerounais à pouvoir s'offrir ce luxe. Mais a-t-on vraiment besoin de sortir de son pays pour recevoir de bons soins ? Si les hôpitaux camerounais étaient fournis de bons équipements personne n'aurait besoin de s'expatrier pour aller chercher des soins. En construisant l'hôpital général de Yaoundé, le Président Ahidjo avait pour objectif d'offrir un centre hospitalier de référence aux camerounais et à la sous-région d'Afrique centrale. Nul n'aurait donc - en toute logique - besoin d'aller aux Etats-Unis ou en Europe pour des soins de référence.

Deuxièmement, Monique Koumaté n'a pas eu besoin d'équipements de référence. Elle avait juste besoin de soins. C'est tout ! Dans le témoignage qui précède il n'a été aucune mention d'un système englouti d'indifférence. Le docteur a suivi la procédure médicale standard. En plus il est allé au-delà du paquet minimum qui aurait été de se contenter d'enlever la tumeur. Mais il est sorti des sentiers battus en envoyant cette tumeur à un autre centre de recherche avancé. Ces réflexes existent au Cameroun. Mais avec toute la volonté que pourraient avoir un ou deux médecins, les moyens n'auraient pas suffi pour d'examens plus méticuleux. Et si un pays comme le Cameroun, qui, il y a 30 ans, était au même niveau d'évolution avec la Corée du Sud, est 25 fois inférieur à ce pays de nos jours, a-t-on encore besoin de croquis pour comprendre qu'il faut un changement radical au Cameroun ?

 Ce qui s'est passé à la quintinie est juste le reflet de ce qui se passe dans les coulisses chaque jour au Cameroun. Le Cameroun est une tumeur cancéreuse qui se croit bénigne. Son apparence de paix n'est qu'un mal profond qui s'ignore. Cette accalmie n'est pas là parce que Biya est un homme de paix. Cette accalmie est là parce que l'église du Seigneur prie.

Certes, direz-vous, un croyant respecte ses autorités car ces autorités sont instituées de Dieu. Mais si vous lisiez juste un peu plus votre Bible vous comprendriez que chaque fois qu'une autorité s'est distancée de son peuple Dieu a manifesté Son rejet de ladite autorité en animant un sentiment d'exacerbation au milieu du peuple. Si vous pensez que ce qui s'est produit à Douala est digne du nom de Dieu, permettez-moi d'exprimer mon étonnement.

Si vous voulez dire que des gens se servent de prétextes pour saboter Biya, c'est encore faut. A quoi est-ce que vous comparez la vie de Monique, et de ses enfants, et de tous les autres camerounais qui sont éteintes chaque jour à cause de l'insensibilité de cette administration ? Hier c'était elle ; à qui le tour ? Sans devenir un oiseau de mauvais augure, le Cameroun devrait comprendre qu'il a enfin besoin de repos. Assez d'enterrer ses enfants ! Assez de se faire marcher sur les pieds sans le droit de crier ! Assez de faire fi de ses droits fondamentaux. Le droit à la vie et le droit à la santé sont des droits fondamentaux. Dans son article trois, la déclaration universelle des droits de l'homme déclare que " Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne. " Dans les pays qui se respectent on assiste des personnes en danger. Vous savez déjà que ce n'était pas le cas à l'hôpital de la quintinie. Hors, si vous n'avez pas la volonté de comprendre que le pays est abandonné à lui-même, au moins ayez la volonté de pleurer avec ceux qui pleurent.

Par Vitalis Essala
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