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JE SUIS CAMEROUNAIS, JE SUIS BOKO HARAM par Florian Nguimbis

Hier mon pays a fait la une du JT français. Notre Roi qui se bat pour obtenir la fameuse photo de la poignée de main sur le perron de l’Elysée; lui dont les services ne se gênent pas pour payer des colonnes des Journaux hexagonaux à prix d’or, ce, pour présenter la magie des grandes illusions Réalisations, a dû être heureux hier car sans courbettes, ni argent, le triangle national était à la une des médias gaulois. Bon, c’est vrai qu’une affaire d’enlèvement n’est pas forcément une publicité positive. Mais bon… 
Boko Haram. Ces gens me plaisent. Ils sont aussi futés que les commerçants Bamilékés. Ils ont très vite compris qu’enlever des occidentaux était le moyen le plus sûr de s’engraisser. Le blanc a de la valeur en ce siècle, et les barbus ne font que suivre la tendance d’un marché qu’ils semblent maîtriser. Ils ne sont pas les seuls hein? Nous autres camerounais l’avons aussi  compris. En chaque camerounais il y a un peu de Boko Haram. 

J’en ai fait la triste expérience dernièrement. Soirée chaude à Yaoundé. 30 degrés. Temps idéal pour avaler des castels congelées. Je reçois le coup de fil d’un copain. Mbom tu es où? Retrouve-moi à x endroit. Ma fiancée est sur place. Tiens lui compagnie je suis en route. Dix minutes plus tard, je suis sur place. Un coup de fil et je me retrouve en face de la «fiancée» que je vois pour la première fois. Elle est blanche comme de la craie. Pas blanche de peur hein? Blanche par ce qu’européenne. 
Bisou à gauche puis à droite et nous voilà en train de deviser comme de vieux amis. Une heure plus tard, l’ami n’est toujours pas là. Les camerounais et l’heure hein? Toute une histoire. Je décide de changer de terrain d’opération. Vous savez, les snacks soi-disant luxueux avec leurs chaises en faux métal chromé m’énervent. Surtout que vu les prix pratiqués, encore quelques tours de table et ce serait à la police que je devrais aller régler la facture. Direction mon fief, mon petit bar de quartier que j’affectionne. La fille est un peu surprise, mais bon, son mec a dû lui dire que je ne suis pas un kidnappeur, vu qu’elle me suit en souriant. Nous voici devant une table plus ou moins propre. La sono hurle «l’homme c’est l’homme tant que ça se lève». Le tout au milieu de la fumée des fourneaux de porc et des effluves de poisson braisé. Du rire, des blagues grasses, des jolies minettes, bref, le Cameroun que j’aime. 
Rien qu’à la façon dont l’assistance nous a reluqué à l’entrée, j’aurais dû comprendre qu’il y’avait anguille sous roche, mais bon… A une table voisine, un groupe d’habitués. De vieilles connaissances, vous savez, ces «grands» qui glandent, mais boivent à longueur de journée dans les poches des autres. Des requins de bar qui sentent l’odeur de l’argent à des kilomètres et  peuvent te maudire à cause d’une bière non offerte. Je remarque à un certain moment que comme la majorité des autres clients, ils s’intéressent un peu trop à notre table. Soudain l’un d’eux se lève et vient me saluer avec affection: bonjour président! 
Malchance! Vous vous souvenez de cette affaire de «prési» non? Le type garde longuement la main de la «blanche d’autrui» dans la sienne. Puis au lieu de partir, décline toute son identité et se lance dans un éloge obséquieux et gênant de ma personne. Le petit-ci, je l’ai vu grandir. C’est un génie. Quand il part là-bas chez vous les Blancs, je l’écoute à la radio… blablabla. Le tout avec un subit accent francilien que je ne lui connais pas. La whitisation comme on dit par ici. C’est évident, il croit que c’est «ma blanche». Bleu de honte je digère ses âneries. Ils sont venus comme ça. A tour de rôle, présenter leur allégeance au «Prési Florian Ngimbis» et tous sont repartis avec une bière. A un certain moment, mon portefeuille s’est  mis à clignoter: petit! Je suis dans le rouge. Encore un faux geste et même l’argent de taxi pour demain tu n’auras pas. Enervé, je me lève pour aller régler ma facture au comptoir sous les regards haineux de certaines ex-lianes attablées et ceux admiratifs (je veux le penser) des connards qui viennent de me sucer la moelle. 
Au comptoir, surprise. Le barman, mon ami de toujours (du moins je le croyais), me sort après avoir encaissé mon fric: petit tu sais que tu as une facture qui dort ici hein? - Heu… On s’est dit demain non? Je n’ai plus grand chose sur moi. - Mouf! Tu es avec la blanche c’est toi qui paie? C’est ton argent? Tu me prends pour un idiot? J’ai dû batailler dur pour le convaincre. Je suis reparti avec les encouragements murmurés par la bande de gratteurs : nooon petit! Tu es fort. Confiance! Donne lui un bon plantain et reviens nous trouver on mange les euros là. La dernière image que j’ai est celle de leur table où, le pouce levé dans le dos de ma compagne, les connards me faisaient des grands signes pour me féliciter et me motiver tout en avalant mes bières. 
Quelques instants plus tard, j’appelais mon ami: pardon, viens récupérer ton colis, je ne suis plus là. Je n’ai même plus soif. Je suis quitté derrière les problèmes. Certaines expériences méritent d’être vécues pour démontrer la bêtise de la société. Ce regard sur les couples mixtes m’énerve. Si tout le monde est tout sourire quand ils sont présents, le dos tourné, ce sont des remarques désobligeantes, des allusions à la limite obscènes. Le Camerounais: j’aime cette fille. La société: L’amour hein? c’est ça! On vous connaît! La «blanche» est considérée comme un portefeuille ambulant en manque de sensations fortes. Toi le «négro» comme une verge sur pattes qui «cogne comme un noir pour vivre comme un blanc». Peu importe que ce soit toi le portemonnaie du couple. Peu importe que vous vous aimiez d’un amour sincère. La société, ta famille te verront comme un conquistador ayant récolté les trésors d’un lointain eldorado. Un héros chargé de recouvrer la «dette coloniale». 
Maladie: driiing le téléphone sonne. On t’attend à l’hôpital avec la facture de médicaments. Anniversaire: drrring! Voici le gâteau que je veux. Viens seulement payer. Mariage: viens tout acheter, nous on viendra seulement se passer la bague au doigt. Un obscur cousin se fait arrêter: drrrring! Nous voici devant le commissariat on t’attend. Pourquoi moi? Ben mon frère tu as la blanche non? Vive l’amour pour tous! Pas besoin de se rendre dans un lointain parc animalier pour se faire kidnapper. Parfois Boko haram est tout près. Dans une famille, dans un bar prêt à en découdre avec cette «éducation occidentale» qu’ils prétendent décrier, mais dont les euros leur font tant de bien. 
Peace Boko Haram! 
 Florian Nguimbis
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