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MARC VIVIEN FOÉ ET LA MALÉDICTION INDOMPTABLE DES LIONS (23 JUIN 2003-23 JUIN 2014) par Félix TATLA MBETBO

Ça fait exactement 11 ans que Marco a quitté la scène à la Molière, et depuis lors, il est entré dans la triste liste des « morts inutiles » de notre pays. Et comme la plupart de nos morts un tant soit peu célèbres, on dit de lui qu’il a été vendu, condamné comme Sisyphe à rouler la pierre dans les enfers, et à battre les briques de terre dans les airs. Marc Vivien Foé est aussi « mort pour rien », son sang n’a pas pu servir de rançon pour les péchés que les générations futures devaient commettre à foison ni de source d’inspiration où celles-ci pouvaient venir étancher leur soif de gloire et de gloriole. Pour nous, faire une corrélation entre la mort étonnante de Marco et la « malédiction indomptable » qui s’abat depuis lors sur les lions n’est pas une affaire anodine. Le triste constat que nous pouvons faire, c’est que, depuis les années 2000, les Lions avaient tout remporté jusqu’à la mort de Marco, et depuis juin 2003, les Lions n’ont plus rien gagné du tout.

Quand nous disons « rien gagné » c’est rien au sens nihiliste du mot. Cet échec visible des Lions n’est que le reflet de celui du pays qu’ils sont tenus de représenter. Parce que le peuple camerounais, commençant par ses dirigeants qui digèrent plus qu’ils ne dirigent, a l’habitude de ne rien gagner du tout : ni ses combats contre les autres ni combats contre lui-même. On n’a rien gagné, bien sûr à l’exception décevante des capsules de bières, de la ligue de champions de la longévité aux pouvoirs, de la coupe du monde de la corruption et autres lauriers fanés qui reposent sur nos fronts flétris. Personne ne fera croire le contraire malgré le « chantage » folklorique qui sévissait il y’a deux ans, où un tristement célèbre artiste osait claironner « on a gagné on a gagné », pourtant les Lions venaient de louper leur participation à la CAN 2012 et 2013. Une honteuse absence, d’abord parce qu’il n’est pas admissible que le Cameroun soit absent à une telle compétition, ensuite la 2012 était organisée par deux de nos voisins, parmi lesquels la Guinée de Nguema, que le Cameroun envisageait annexer dans ses tristes années de gloire. D’où l’introduction de la langue espagnole dans nos écoles, tributaire de la velléité de faire de la Guinée notre 11e province, avant que Kondengui ne vienne lui ravir la vedette. On arrive même à comparer les Lions à la blonde bière Heineken, car comme eux, elle mousse, coûte cher, mais elle ne gagne pas.
Depuis la mort de Marco, plutôt que de faire une étiologie rationnelle de l’échec cuisant et répétitif des Lions, on a plutôt cherché à classer cela dans des préoccupations mineures. Quand ces caustiques causes ne sont pas dans les luttes personnelles, elles sont dévoyées au monde du surnaturel. De ce point de vue, quand les lions perdent comme ils savent déjà si bien le faire, c’est parfois les ministres de sports qui en pâtissent. Bidoung Mkpatt en a payé les frais en 2004 après l’échec des Lions en ¼’ de finale de la Can en Tunisie, Mbarga Mboa pour n’avoir pas qualifié les Lions au mondial 2006, va être doucement forcé à libérer le plancher. A. Edjoa pour avoir hésité à qualifier les Lions en 2010 va être détaché de la prairie, privé ainsi de la beuverie. (Lire JBT, programmés pour échouer, 2010), Le ministre Fofé avait connu le même sordide sort après la coupe du monde 90. Connaissant le maitre des jeux, Adoum Garoua ne va surement pas déroger à la maladroite règle. Ces sinistres ministres sont
tous coupables de jouer ou d’avoir badiné avec la mascotte fantoche du régime, qui aime à profiter des victoires des Lions pour mentir aux yeux du monde que le pays va bien.
Quand ce ne sont pas les ministres qui en payent les frais, se sont les entraineurs, qui au lieu d’entrainer les Lions à la victoire, sont entrainés à agir selon les volitions des vantards et des voleurs. Depuis les années 70, aucun entraineur des Lions n’a passé plus de trois ans à son poste. Cette fugacité ne peut qu’étonner pour un pays comme le Cameroun, réputé pour sa pugnacité en ce qui concerne la confiscation ad vitam des postes de responsabilité. C’est le poste le plus rotatif du Cameroun, preuve que depuis la mort de Marco, les Lions ont connu dix entraineurs. De Arie Haan à Finke passant par Nyongha, Pfister, Nkono, Clémente, Lavagne et consort. Et chacun de ces entraineurs a été frappé en sa manière de la marco-malédiction-indomptable. Or chacun d’eux, pris respectivement, exemptés les nationaux, était arrosé d’énormes et anormales sommes d’argent. On dépensera par exemple 150 millions de nos pauvres francs, juste pour l’accueil de le Guen, baptisé Paul le Gain à l’occasion. Il bénéficiera en une naine année, d’un demi-milliard de nos francs qui ne le sont pas du tout, plutôt tordus comme ceux chargés de les distribuer, toujours en cash. En plus de l’argent qui tombe au même rythme que les malades du sida et du paludisme, tombent aussi des diluviennes pluies de chansons dédiées aux Lions, des sommes de psaumes et des quantités de cantiques des cantiques et incantations incapables à épurer la marco-malédiction indomptable.
Quand ce ne sont pas les entraineurs, qu’on accuse à cause de leur extranéité et de leur défaut de charisme, on se tourne aux causes surnaturelles comme on sait bien le faire. Pour le commun, si nous échouons tant, c’est parfois à cause du maillot jaune, qui est défini comme un maillot maudit, dont sa couleur ensoleillée ne fait pas toujours briller les Lions. D’autres ont eu à penser que chaque fois qu’il pleut à Yaoundé lors d’un match des Lions, la malchance se lave. De ce point de vue, il faut garder quelques millions de francs aux « gardiens » des traditions, pour qu’ils provoquent toujours la pluie le cas échéant, même en saison sèche. On n’avait donc pas compris que les Lions aiment tant voir la pluie tomber, pour qu’on ait l’impression que ces « mouilleurs » savent si bien mouiller le maillot. On se souvient encore en Afrique du Sud, le Ministère des Sports a pris en charge une douzaine de féticheurs, pour aider les lions à pousser le ballon et à « garder » les buts lors de leurs rencontres. Mais apparemment la malédiction était plus forte que toutes les allumettes, et cette fois ci au Brésil il fallait prendre la prophétie féerique de TD Joshua à l’envers. Le numéro 17, est devenu dans l’éthos camerounais, lui aussi un maudit numéro, et ce n’est pas Idrissou qui va le contredire.
Certains patriarches n’ont pas hésité à souffler dans certaines oreilles qu’ils savaient bavardes, qu’ils ont « maudit » le stade. En 2010, Samuel Eto’o n’a pas tardé à leur mouiller la barbe avec du liquide qui sait rendre propre ce que lave l’eau. Il a fallu que le Cameroun organise la Can 72, pour que sorte de la broussaille, ce stade qu’on esquive de prononcer son nom de baptême pour l’appeler « cuvette de Mfandena ». C’est que ce stade porte un nom, celui du « bâtisseur », du « président fondateur ». Celui qui, malgré le fait de posséder un stade aussi grand, ne puisse bénéficier d’un seul mètre carré dans « son » pays pour reposer sa tête. Près de ce stade, nous avons une rue qui n’a attendue que la mort de Marco pour porter son nom. Mais le malheur c’est que, Marco n’a jamais marché sur cette rue quand elle portait son nom.
Ceux qui ont donné de leur sueur ensanglantée pour l’image du Cameroun, mais qui ont le malheur d’être encore en vie, passent indifférent face au faciès des « nécropolitiques » : qui décident de qui doit « vivre » et qui doit « mourir».
En réalité il y’a une « malédiction scientifique » qui frappe des nations qui ne respectent pas leurs morts et leurs légendes vivantes. Mais il faudra aussi reconnaître que les vivantes légendes doivent savoir provoquer ce respect. C'est-à-dire partir à temps, que ce soit de manière brusque comme Marco, ou de manière aussi juste comme Jojo. Rigo a tardé avant de le comprendre, et après une décennie comme capitaine des Lions, a risqué sortir de la tanière comme un chien, la langue pendante et la queue entre les jambes. Aujourd’hui il occupe un poste par défaut dont il ne maitrise ni les tenants ni les aboutissants. Eto’o qui a d’une certaine manière provoqué cette sortie du « capitaine courage », feigne de ne pas avoir retenu la leçon : quitter les choses avant qu’elles ne vous quittent. Lui qui a été ramasseur de balles au jubilé de « jojo » Antoine Bell, devait savoir que « lorsque vient le moment de s’arrêter, il vaut mieux le savoir soi-même que de l’apprendre par d’autres » (vu de ma cage, P. 31).
Et ceci relève encore d’une marco-malédiction, celle qui consiste à faire croire qu’aussi vieux soit’ il, « un lion ne meurt jamais » il dort. Le problème c’est qu’un lion dans son sommeil de parésie ou dans sa mort royale, ne mérite de place que dans les vestiaires ou au cimetière. Il est temps que meure le lion pour que revive sa royauté. Tous les lions de la génération Marco, doivent pour une bonne fois jeter l’éponge et quitter la tanière. Que l’équipe se débarrasse de la vieille coupe pour ne plus souiller le vin nouveau, qu’elle fasse enfin « peau neuve » dans tous les sens du terme et de l’épiderme.
 Félix TATLA MBETBO,


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