Il s'y trouvait une foule d'autant plus nombreuse que Bodo était le dernier grand marché qui se tenait encore dans toute cette région, la plupart ayant fermé à cause des craintes d'attentats. On comprend que le résultat soit spectaculaire. Il s'agit de l'une des attaques les plus meurtrières de l'histoire du Cameroun. Les étals du marché ont été pulvérisés, en même temps que des lambeaux de chairs humaines sanguinolentes. Le dernier bilan fait état d'au moins 32 morts. Un bilan provisoire qui pourrait s'alourdir puisqu'une dizaine des 86 blessés sont dans un état très grave, la charge des explosifs ayant été très violente. Évacués par hélicoptère, les blessés graves sont actuellement en soins intensifs dans les hôpitaux de Mada et Maroua.
Nouveau mode opératoire
Si les auteures sont toujours de jeunes filles, cette fois-ci elles ne portent pas de ceintures explosives bourrées autour de la taille. Déjouant les contrôles de l'armée, c'est dans des sacs de légumes, en l'occurrence de gombos, que les bombes ont été dissimulées. De quoi rappeler que le terrorisme aura toujours une longueur d'avance sur les armées régulières.
Mais l'on peut imaginer les prochaines cibles éventuelles des islamistes. Il y a longtemps que les passagers au Cameroun remarquent une ambiguïté lors des contrôles policiers, dans le cadre de cette guerre contre Boko Haram. L'on se limite au contrôle des identités. En décembre dernier nous avons ainsi compté 16 contrôles de cartes d'identité entre Bamenda et la frontière du Nigéria, par Ekok, mais aucune fouille ni de bagages ni des passagers qui pourraient faire entrer des tonnes d'explosifs jusqu'aux cœurs de nos plus grandes villes, les contrôles étant pareils dans tout le pays. Or ce n'est pas dans une carte d'identité que l'on pourrait cacher une bombe.
Cette situation devrait très vite changer avec les attentats de Bodo, où la nébuleuse Boko Haram vient de changer aussi son mode opératoire. Mais comment pourrait-on fouiller tous les sacs qui entrent dans un marché bondé ?
Et si les armées expérimentaient les chiens-pisteurs !
Notons d'emblée que ce changement de mode opératoire par les éléments de Boko Haram ne doit pas être perçu comme une augmentation en grade des islamistes. Au contraire, il laisse entrevoir la difficulté que ceux-ci ont à poursuivre leurs exactions en usant seulement de leurs anciennes méthodes. Il s'agira pour les armées nationales de s'adapter en conséquence. L'on pourra par exemple s'inspirer des pays où les chiens au flair entraîné fouillent les bagages en un temps record dans les gares et les rues bondés. Et c'est efficace ! Le Cameroun pourrait commencer à s'octroyer ce type de chiens policiers en nombre, intégrant ces paramètres dans son dispositif de lutte contre le terrorisme, avant que les cars de transports ne soient l'objet des prochains attentats.
Mais cela ne suffiraient pas. Les gares routières, les marchés et les lieus très bondés peuvent être aménagés de façon à canaliser les foules qui devront toutes emprunter des entrées où des chiens postés détectent d'éventuels explosifs. Ces aménagements seront vitaux.
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Faut-il rappeler que dans la seule région de l'Extrême-Nord du Cameroun, depuis que les attaques des islamistes nigérians se déroulent aussi sur le territoire camerounais, soit en 2013, plus d'une trentaine d'attaques-suicides ont été perpétrés, causant environ 1 200 décès, dont des dizaines de militaires. Le Colonel Didier Badjeck au ministère de la défense du Cameroun avance le chiffre de 67 militaires et 3 policiers tués.
Du côté du Nigeria, l'insurrection de Boko Haram et sa répression ont fait plus de 17 000 morts. L'on compte en outre environ 2,5 millions de déplacés depuis 2009. Plus d'un million d'enfants dans les quatres pays du bassin du Lac Tchad ne vont plus à l'école à cause de Boko Haram qui, en pidgin nigérian, signifie littéralement " livres interdits ". C'est justement en retrouvant vite le chemin de l'école qu'ils symboliseront la victoire contre l'obscurantisme autour du Lac Tchad.
Par Betran KOMNANG – Bruxelles, Belgique.
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