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LES EXPERIMENTATIONS AFRICAINES DE L’ASSURANCE MALADIE UNIVERSELLE(Le Rwanda, la côte d’ivoire, le Ghana, La RDC…)

Le 12 Mars 2016 un hôpital public désigné "de référence" selon une phraséologie pompeuse devenait le lieu d'un drame : Une femme enceinte Monique Koumateke rendait l'âme dans des conditions ambigües et se faisait éventrer à même le sol, au sein même de l'hôpital public par une personne non habilitée parce que le personnel soignant avait été incapable de prendre la situation en mains. De l'avis des personnes qui accompagnaient Monique, la femme enceinte aurait été boudée par des mercenaires en blouse blanche pour "délit de pauvrété".

Le scandale devenu si énorme rappelait aux esprits cultivés une sentence

Rabelaisienne dont la pertinence résiste à l'usure :

"Science sans conscience n'est que ruine de l'âme"

La société entrait en émoi et l'affaire inondait la conversation publique devenant ainsi un thème majeur du grand flot verbal. Le quatrième pouvoir s'emparait aussitôt du sujet Dans la foulée des réactions parfois passionnées , par mesurées, une idée surgissait et naviguait d'un plateau télé à un autre :C' était l'invitation à instaurer au Cameroun ,une assurance maladie universelle.

Les deux grandes formations politiques dominantes le RDPC et le SDF essayaient chacune de s'accaparer l'idée. On nous expliquait du côté du SDF que le Chairman en avait déjà parlé. Les thuriféraires du régime nous rappelaient que l'idée faisait partie des promesses du chef de l'Etat.

En même temps personne dans les deux camps politiques n'expliquait comment échafauder un pareil projet ? Comment le financer ? En l'absence d'un exposé argumenté, détaillé et chiffré, on reste dans le terrain de la pure démagogie, une soupe trop longtemps servie au peuple Camerounais.

Instaurer au Cameroun une assurance maladie universelle est un impératif, mais ce ne sera pas une sinécure. Une assurance maladie est une bonne idée qui peut foirée si elle est mal conçue. Par exemple si la définition des sources de financement est inappropriée. Pour maximiser les chances de succès dans une telle entreprise ,il faudra commencer au préalable par recenser les bonnes pratiques comme dans une démarche de veille commerciale. Ce qui signifie qu'il faudra regarder ce qui s'est fait ailleurs dans des économie de taille semblable . L'assurance maladie universelle encore appelée AMU existe et fonctionne avec succès dans 15 pays africains :Le Rwanda, la côte d'ivoire, le Gabon, le Sénégal, l'Ethiopie, l'Afrique du sud, le Burkina-faso, le Mali, le Bénin,le Djibouti,le Nigeria,la Tunisie,le Maroc

L'une des questions les plus épineuses que doit affronter un pays qui veut mettre sur pieds une assurance maladie universelle est vraisemblablement son financement. Comment financement une ambition aussi gigantesque.

Un mode de financement semble avoir prévalu dans la plupart des pays africains, on pourrait l'appeler le modèle Rwandais.Il consiste à exiger de chaque citoyens qu'il s'inscrivent dans une caisse d 'assurance maladie moyennant une cotisation annuelle qui varie avec le niveau de revenu. Elle peut varier de 2 dollars par an pour les indigents à 100 dollars par an pour des personnes ayant des revenus très élevés.

D'autres pays comme le Gabon et le Ghana tout en exploitant le modèle Rwandais on essayé de diversifier les sources de financement par le recours à des approches innovantes telles qu'une taxe sur la téléphonie mobile,une taxe sur les transferts d'argent,la majoration de la TVA,les taxes sur les embarquements à l'aéroport ou sur les accostages de navires.

Si l'inscription à l'assurance maladie universelle est obligatoire dans des pays comme le Rwanda,elle est restée facultative dans des pays comme le bénin. Le fait qu'elle soit obligatoire garantit un niveau de succès élevé. Là où l'inscription est facultative, le système a choisi de mettre chaque citoyen devant ses propres responsabilités. On verra toujours arriver des personnes qui viendront s'effondrer devant l'hôpital public affirmant ne pas avoir un radi, quand bien même ils auraient la possibilité de s'affilier à des taux de cotisation trop faibles.La mutualisation du risque sanitaire n'est pas en Afrique une idée neuve ;Ils existait déjà depuis les indépendances divers systèmes de mutualité dans des pays comme le Rwanda ou le Sénégal ; Mais ces initiatives ne couvraient que les salariés du public et du privé. Par contre l'assurance maladie universelle encore appelée AMU est un concept récent dans les pays africains qui s'y sont investis. L'assurance maladie universelle repose sur l'intention d'inclure dans les systèmes de mutualisation des risques les plus pauvres de la société.

L'assurance maladie au Rwanda

Peu après la guerre, le Rwanda a commencé à se reconstruire et plusieurs initiatives et innovations ont vu le jour, dont certaines ont abouti à des résultats satisfaisants. Le système de mutualisation du risque maladie est devenu à ce propos un cas d'école emblématique. Ce système est passé par trois phases de développement. En premier lieu, il s'est agi de mettre en place un projet pilote dans trois districts du pays (1999-2001), qui a été suivi par des initiatives d'extension dans d'autres districts menées par les autorités politico-administratives (2002-2005). Ceci a conduit à la troisième phase qui a consisté en une large expansion et une réflexion sur la généralisation du système au niveau national pour aboutir à une couverture par une assurance maladie universelle (de 2006 à ce jour)

Le système Rwandais de la répartition du risque sanitaire repose sur plus de 250 mutualités dont certaines sont publiques et d'autres privées .
L'assurance publique regroupe entre autres :
La caisse sociale d'assurance dont les bénéficiaires sont les agents de l'Etat. Les affiliés à cette caisse cotisent à un taux de contribution de 2 % du salaire brut
La Rwandaise d'assurance Maladie très connue sous le nom de RAMA couvre aussi bien les agents de l'Etat que les employés du secteur privé avec un taux de cotisation de 15% du salaire brut ,7,5% étant payé par l'employé et 7,5% par l'employeur
La military Medical insurance : Ses bénéficiaires sont les militaires et leurs ayant droit. Son taux de contribution est de 22,5% dont 17,5% reviennent à l'Etat et les 5% à l'affilié
La mutuelle d'assurance maladie à base communautaire :Elle a la spécificité de couvrir une population faible économiquement composée du monde rural ,des travailleurs du secteur informel, des étudiants, des indigents.

Parmi les caisses d'assurance privée nous avons :
La CORAR , la SORAS : leur clients sont les travailleurs du secteur privé et leur ayant droit. Les primes varient selon les choix des employeurs.

Les sources de financement

Le système rwandais d'assurance maladie est financé comme suit :
70% du financement vient des ménages, 9% du gouvernement, 8%des employeurs privés, 13% des donateurs étrangers.

Les prestations couvertes par les mutuelles d'assurance sont les suivantes :
-Les Consultation chez le médecin
-L'Hébergement à l'hôpital
-Les soins curatifs (consultations, suivi des maladies chroniques, réhabilitation nutritionnelle) ;
-Les accouchements ;
-examens de laboratoire (goutte épaisse, hémoglobine ; examen direct des selles et des urines)

Le système d'assurance maladie du Rwanda couvre 98% de la population. L'inscription des citoyens au programme est obligatoire. Le taux de cotisation par affilié est environ de deux dollars par an pour les plus pauvres de la société.
L'apport de l'assurance maladie en termes d'avancée sur le plan sanitaire est indéniable.
Au cours de six dernières années, le taux de paludisme a diminué de plus de 50% tandis que l'incidence et la mortalité liées à cette maladie ont été réduites à moins de 60 et 70% respectivement.

Quelque 108.000 séropositifs sont désormais traités contre 0 il y a dix ans. De même, grâce au système de santé, les moyens de prévention comme les moustiquaires, les vaccins, les immunisations sont désormais gratuits pour les habitants, ce qui a conduit à réduire le nombre de nouvelles infections.

L'assurance maladie en côte d'ivoire

Après les difficultés rencontrés sous l'ère Gbagbo pour mettre sur pieds une assurance maladie universelle (AMU) le gouvernement de son successeur a développé le concept de couverture maladie universelle(CMU).

la lettre « A » du projet précédant étant remplacé par le « C ». Suite à l'adoption par l'Assemblée Nationale en mars 2014 du projet de loi instituant la CMU, le gouvernement ivoirien a sélectionné en octobre 2014, une société chargée d'enrôler les assurés. L'opération d'enrôlement avait débuter le 29 décembre 2014.

Le régime ivoirien de protection sociale protège les travailleurs salariés obligatoirement pour les risques suivants :
-La maladie ;
-Les prestations familiales (dont la maternité) ;
-Les accidents du travail-maladies professionnelles ;
-Les pensions (vieillesse, invalidité et survivants).

Il n'existe pas de régime spécifique aux travailleurs indépendants.Ces derniers peuvent néanmoins adhérer volontairement à l'assurance accident du travail.
Depuis le mois de septembre 2015, une couverture maladie universelle (CMU), instituée par la Loi n° 2014-131 du 24 mars 2014, couvre obligatoirement l'ensemble des populations résidant en Côte d'Ivoire.
L'affiliation à la couverture maladie universelle (CMU) est obligatoire depuis septembre 2015 pour les populations suivantes :

les fonctionnaires et militaires en activité,
les pensionnés affiliés à la CGRAE,
les salariés et retraités du privé
les travailleurs indépendants des secteurs informels et/ou agricoles,
les étudiants
les personnes sans emploi.
Seuls les enfants de moins de 5 ans sont considérés comme ayant droit.
Chaque assuré affilié bénéficie d'un numéro d'immatriculation unique pour la couverture CMU.
Chaque affilié contribue à hauteur de 1000 CFA par mois
La CNAM en assure la gestion.

La CMU comprend 2 régimes :
un régime contributif, dénommé Régime général de base (RGB) financé par les cotisations des assurés,
un régime non contributif, dénommé Régime d'assistance médicale (RAM), qui vise les personnes économiquement faibles ou démunies et dans lequel l'Etat se substitue aux assurés pour le paiement des cotisations et du ticket modérateur.

L'assuré nouveau cotisant dispose de 3 mois de carence avant de bénéficier de la prise en charge des soins. Après une cessation de paiement, les droits sont couverts jusqu'à 3 mois.
Les prestations de soins dispensés dans le cadre de la CMU sont inhérentes à :
la maladie ou l'accident,
la maternité,
la réhabilitation physique et fonctionnelle,
la prévention.
Le panier de soins est composé :
des consultations (médecins généralistes et spécialistes, infirmiers, sages-femmes),
des médicaments,
des actes de chirurgie,
des examens de laboratoire,
des hospitalisations
des urgences.

Les prestations garanties ne sont prises en charge par la CMU que lorsqu'elles sont délivrées par un prestataire, public ou privé, ayant signé ou adhéré à une convention avec la CNAM.
Le taux de couverture de la CMU varie entre 70 et 80 %.
                         
LE GHANA

Le programme national d'assurance maladie du Ghana le Pnam autorise, surveille et règlemente l'opération des programmes d'assurance maladie à travers le pays.
L'inscription au programme d'assurance maladie est obligatoire selon la loi mais n'est pas forcée en pratique.

La majorité de la population est exempt de primes.C'est le cas notamment des enfants de moins de 18 ans, les femmes enceintes, les personnes âgées de 70 ans et plus, les pensionnés, les personnes vivant dans l'extrême précarité. Mis à part ces différentes catégories les autres personnes devront payer une prime annuelle située entre 8 et 12 dollars.
Le programme est financé à 87% par les affiliés et à 13% par le financement étatique.

L'idée qui sous-tend le programme d'assurance maladie du Ghana est de remplacer l'ancien système de paiement des frais hospitalier en vigueur depuis 1985 et connu sous le nom de "cash and carry" sous lequel les patients devaient payer à l'avance les soins médicaux dans les cliniques et les hôpitaux du pays.

Le système de couverture médicale actuelle qui vise à fournir les soins médicaux à toutes les personnes vivant au Ghana a été décrit par un éditorialiste comme le plus grand projet de développement depuis kwame Nkrumah

L'assurance maladie du Ghana prend en charge 95% des pathologies y compris les soins ambulatoire et l'hospitalisation, les médicaments, les tests de laboratoire

GABON

L'idée de départ lorsqu'il a fallu instaurer au Gabon un système d'assurance maladie était d'assurer la couverture sanitaire des plus démunis. La création d'un fond de garantie sociale pour les populations économiquement faible a été le socle du projet.Mais ce fond était financé par un prélèvement de 10% sur le chiffre d'affaire des entreprises de téléphonie et un autre de 1 ,5% sur les transferts d'argents.
Bien plus tard le système a été étendu aux travailleurs du secteur public et privé qui appartenaient au paravent au fond de garantie sociale. La dynamique engagée a permis en outre de baisser le taux de cotisation des actifs en le ramenant à 4 ,5% à la charge de l'employeur et 1% à la charge du travailleur.

LE CONGO DEMOCRATIQUE: Une idée novatrice

Quand les congolais de la diaspora financent la prise en charge sanitaire de leurs familles installées en Afrique

Depuis juillet 2009, Camille D'Hulst, Directeur Général de la Mutualité Neutre de Belgique, a ouvert son cœur aux Congolais d'Europe en acceptant d'intégrer dans son institution la section ‘Afrique' via un projet introduit par Boomba Ekofo Louison, belge d'origine congolaise, et de Remy Nkanu, congolais. En s'inscrivant à la Mutualité Neutre en Belgique, les affiliés congolais devront payer la somme de 56,50 euros par mois dont 45 euros seront destinés aux soins médicaux de sept personnes qu'ils auront choisies à Kinshasa. Les 11,50 euros restants sont à verser à la cotisation mensuelle de la famille résidant en Belgique. Les personnes déclarées doivent se présenter physiquement dans les agences de la Mutualité Neutre de Kinshasa (MNK) pour se faire enregistrer, photographier et encoder. Tenant compte des difficultés de déplacement à Kinshasa, la MNK a résolu d'affecter chaque membre, selon sa localisation géographique, à un centre médical proche de son lieu d'habitation. La MNK travaille en collaboration avec plusieurs hôpitaux de la capitale dont la Clinique Ngaliema à Gombe, le Centre Monkole à Mont-Ngafula, l'Hopital Saint-Joseph, Bondeko à Limete et l'Armée du Salut à Maluku. La ville est donc bien quadrillée par la mutualité qui veut aider les populations de Kinshasa.

Kinshasa est la première capitale africaine à bénéficier de cette initiative mais sans doute pas la dernière car la Mutualité Neutre de Belgique compte élargir son champ d'action en provinces et pourquoi pas dans d'autres villes de l'Afrique subsaharienne.
           
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Comment évaluer la performance d'un système d'assurance maladie ?

On peut y parvenir en interrogeant trois types d'indicateurs :

1- la disponibilité des ressources de manière permanente
(si les mesures en vigueur génère les ressources de manière permanente l'indicateur est performant)

2- le pourcentage de la population couverte par l'assurance
maladie universelle

(les pourcentages élévés sont associés à une meilleure performance)

3 -La couverture par groupe de population
(il ne suffit pas de regarder le pourcentage de la population couverte,mais de voir aussi le niveau de participation des différentes catégories de la population. Plus large est la représentation, meilleure est la performance)

Les management des ressources financières : Une modalité de l'efficacité d'un système de mutualisation du risque

Pour qu'un système de protection sociale soit viable, il est indispensable d'assurer la bonne gestion des réserves issues des cotisations des assurés afin d'éviter les crises de liquidité. La plupart des caisses de prévoyance sociale qui fonctionnent correctement procèdent à des investissements dans des actifs rentables afin de dégager des surplus. Ceci permet d'assurer à la fois le paiement des droits des affiliés à temps et de disposer d'une marge pour la gestion des dépenses de fonctionnement courant.

Cependant, dans nombre de pays africains, l'Etat a en général une forte ingérence dans la gestion des caisses de protection sociale et a souvent tendance à utiliser ces ressources pour financer des dépenses publiques qui n'ont aucun lien avec les problématiques de protection sociale. Par ailleurs, certaines institutions de sécurité sociale procèdent à de mauvais choix d'investissement en achetant des actifs peu rentables. Ces opérations contre-productives conduisent à une destruction des ressources collectées ; ce qui conduit à de fréquentes crises de liquidité.

Correspondance : NDJAMA BENJAMIN,   Ndjama@yahoo.com
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