Sur 22 millions de Camerounais, Elecam semble n’avoir inscrit que moins de 3
millions sur ses listes et le taux de distribution des cartes est de moins de 52
%! Notre État-Nation est donc tout simplement pathétique. Cette information est
tombée comme un de ces bilans cliniques qui, tout à trac, découvrent une «
maladie grave ». L’homme de la rue savait le Cameroun patraque, il ne le savait
pas rongé par une si grande incompétence de ses institutions, miné par la
déchéance de son peuple démissionné et démissionnaire. Et le branle-bas des
vérités ajoute au ressentiment populaire. Il nourrit cette abstention électorale
à venir, et même la précipitation à faire voter les Camerounais avec leur Carte
Nationale d’Identité ne peut y remédier! La République est à genoux, mise aux
pas des égoïsmes de l’ethnie minoritaire, celle des bouffes tout! Des
gouvernants sans foi ni loi! Comme les grenouilles de la fable, le bon peuple
déblatère les soliveaux qui le laissèrent péricliter « peinard ». Au Cameroun,
seul le désastre déchaîne les vérités captives, mais elles sont rapidement
rattrapées par les grandes flammes d’un État qui ne croit pas s’autoconsumer
suivant l’expression théologique si chère à Thérèse d’Avila.
En réalité, nos soliveaux politiques en guenilles d’idées, ni pires ni
meilleurs que leurs électeurs, se laissent, depuis trente ans, glisser dans le
déficit et le déclassement national avec ce mélange d’optimisme factice et
d’évitements opportuns qui prépare, chez nous, les « étranges défaites ». «
Insouciance habituelle, effroi passager! ». À ce rythme, oui à ce rythme se
terre une Nation, se meurt un pays, s’enterre un peuple.
Pour oser le vrai diagnostic, il eût fallu dénoncer l’enlisement insidieux de
la Nation dans cet ultralibéralisme archaïque et égocentrique, celui d’une
invite à la démission du plus grand nombre pendant que l’ethnie minoritaire
s’empare de tout et bouffe tout. Aucun homme politique ne se risquera à le
poser. Ni les médias, réduits au silence avec la fermeture des robinets d’aide à
leur survie; il n’y a qu’à lire nos journaux ces dix derniers jours pour s’en
convaincre. Une page d’information pour 31 pages de publicité ! Voilà ce que les
camerounais payent à 400 FR CFA ! Personne ne croit plus à ses chimères.
Hahahaha, de bout en bout, les mots rigueur et moralisation ont disparu du
viatique de Pour le Libéralisme communautaire la bible de nos gouvernants depuis
1982. Et l’introuvable diagnostic n’aura fréquenté ni l’élection présidentielle
ni les actuelles législatives et municipales, où l’on pelote le subalterne sans
toucher à l’essentiel.
Ineffable, donc, ou inaudible à l’intérieur, le diagnostic pourtant rôde dans
les villes comme dans les campagnes, et les familles ne sont pas en reste. Il
assène cette évidence : le Cameroun rame à contre-courant de son propre devenir.
En Afrique centrale, à contre-courant des pays qui se portent mieux que lui. À
contre-courant même des pires dictatures de la sous-région, qui, sauf chez nous,
réforment leurs fondations dictatoriales. Partout, le biyavélisme est en marche,
se met au-dessus de Machiavel le Prince initiateur, et taille sa part dans les
chairs des plus démunis.
Observer autrui pour s’enseigner soi-même, la méthode date du néolithique. On
admettra qu’elle se soit de nos jours raffinée. Et d’abord dans l’art du
commerce et de l’entreprise. Les tests de qualité comparative prolifèrent dans
ce que le management anglo-saxon appelle le benchmarking. Son systématisme n’a
pas investi nos politiques camerounaises. On y résiste pour de bonnes et de
mauvaises raisons.
Les bonnes raisons tiennent à la spécificité historique, démographique,
culturelle de chaque aire géographique : le génie de chaque peuple interdit de
transposer chez l’un ce qui réussit à l’autre. À partir de là, nous pouvons
penser tout ce que nous voulons, mais les Moundang ne sont pas les Bamoun. Le
fait de vouloir appliquer à Bafia ce qui marche à Bafoussam reste comique!
L’unité nationale ne veut pas dire uniformité et nous sommes les mieux placés
pour le dire. Je connais des peuples au Cameroun qui ont des dispositions
culturelles au consensus, certains sont connus pour leur participation
syndicale, d’autres encore sont connus pour leur faible dépendance à la triche
fiscale et sociale et au final nous sommes tous différents les uns des autres et
c’est dans cette différence que réside notre complémentarité. Dit ainsi nous ne
sommes Cameroun que parce que nous pouvons limiter la valeur de comparaison
entre les différents peuples de chez nous.
Il en est pourtant de pertinentes. Se cramponner à nos grands-parents qui
sont au pouvoir depuis l’indépendance alors que la moyenne des chefs d’État de
la sous-région est de 67 ans! Nous alignons devant nos pairs le record de
longévité aux affaires, oui toutes affaires confondues! Nous avons décroché la
palme d’or du pays le plus corrompu de la planète terre! Autant de données
comparatives qui, depuis longtemps, auraient dû percer l’édredon officiel, celui
que les médias tout aussi officiels nous livrent à longueur de journée.
Le Chef de l’État est en court séjour privé en Europe, voilà l’annonce faite
il y a quelques jours par la CRTV. Michel Ndjock Abanda s’est cru le devoir de
nous dire qu’avant de s’envoler pour un autre continent le Chef de l’État s’est
entretenu avec le Premier Ministre entre autres. Parmi les sujets abordés debout
dans ce salon des Chefs d’État à l’aéroport figuraient les résultats des examens
officiels. Satisfecit total nous alors dit le reporter sans mentionner que l’on
a délibéré en dessous de 8 et parfois 6 dans certaines régions, élection oblige!
À quel rang pointons-nous au niveau de la compétitivité économique,
universitaire? Qui peut le dire avec exactitude? Combien de temps nous faut-il
pour découvrir que notre enseignement ne monte pas, ne s’améliore pas, mais
décline? À dire vrai, des enquêtes officielles de Bernard Fonlon, de Jean-Marc
Ela, le disaient déjà il y a une vingtaine d’années, elles étaient officielles
et sont restées cachées sous nos moquettes officielles…
On a raison de se méfier des comparaisons bancales. Mais le triste butoir où
nous sommes acculés plébiscite plutôt les indicateurs contre l’« optimisme
scélérat » de l’omerta publique. Que le Cameroun vive depuis trente ans
au-dessus de ses moyens, quelques cassandres le criaient dans le désert. La
panade, soudain, l’enseigne à tous.
À l’heure critique où nous sommes, les comparaisons éloquentes, les alarmes
venues de partout devraient s’évader des journaux élitaires, gagner les grands
médias populaires. Enfin, je viens d’écrire comme dans le Washington Post comme
si j’avais des concurrents... Au Cameroun, que sont finalement les journaux
élitaires? Avons-nous des radios élitaires? Des chaînes de télévision élitaires?
Et, chez les politiques, baliser, en chiffres de feu, notre proche avenir. Le
Secrétaire Général des Services du Premier Ministre le fait déjà très bien nous
diton! Mais alors quand allons-nous quitter l’insouciance sans sombrer dans
l’effroi? Pardonnez-moi, mais, au risque de me répéter nous-voilà englués dans
un processus de normalisation qui va bientôt accoucher d’une somalisation du
Cameroun!
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/ Dr Vincent-Sosthène FOUDA : L’insouciance et l’Effroi : le Cameroun en plein processus de normalisation
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