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YVONNE SALAMATOU : Quand l'Etat bradait 48% de la SODECOTON…

Si les indicateurs à la SODECOTON sont aujourd'hui au vert et les perspectives prometteuses, il ne doit pas échapper à ceux qui ont la mémoire que l'Etat, alors actionnaire majoritaire de cette entreprise de développement (70% du capital au moment des faits), a voulu brader dans des conditions rocambolesques, en 1994, 48% de ses actions. Et qu'il aura fallu la témérité, entre autre, de l'actuel Directeur général, Iya Mohamed, pour que la tentative se solde par un échec alors même que l'Etat avait cédé légalement ses actions au sulfureux homme d'affaires Baba Amadou Danpullo, connu sous le sobriquet de «Baba Socoba», via une curieuse société dénommée SMIC dans laquelle il avait malicieusement réussi, en distribuant 1% d'action à quelques bonnets nordistes, à faire passer pour une société «nordiste». 

Baba Amadou Danpullo avait donc mis la main sur un paquet de 21 982 actions de la SODECOTON détenues par l'Etat après avoir «converti miraculeusement» l'ancien Premier ministre d'alors, Achidi Achu, à ses arguments. A la suite de quoi, les sociétés porteuses d'actions de l'Etat (CSPH, SNI, ex-ONCPB) avaient signé les droits de cession de leurs actions à la Société Immobilière du Cameroun (SMIC) contre la modique somme de... 1,5 milliards FCFA. Le Premier Ministre avait donné des instructions dans ce sens, et le Chef de l'Etat, après avoir reçu une lettre d'un des actionnaires de la SMIC en la personne de son ami, Abdoulaye, lamido de Rey-Bouba, avait fermé les yeux sur l'opération. 

L'incongruité de l'affaire, c'est que, au moment où Baba Amadou mettait ainsi la main sur ce joli paquet d'actions de l'Etat (48%), deux milliards FCFA de dividendes attendaient d'être versés par la SODECOTON à... l'Etat. Petit calcul élémentaire: l'Etat se débarrassait de 48% d'actions et de deux milliards FCFA de dividendes contre la somme de 1,5 milliard FCFA! Et même que, pour régler sa transaction, Baba Socoba s'était tranquillement endetté auprès du défunt Crédit Agricole du Cameroun, une banque dans laquelle la SODECOTON détenait un petit paquet d'actions... D'où les soupçons d'arrangements d'arrière-cuisine qui pèsent depuis lors sur les protagonistes de cette affaire. 

Bien que sur le plan juridique, l'affaire ait été rapidement bouclée avec la signature des actes notariés de cession d'actions, plusieurs hauts responsables vont s'opposer à cette braderie dont l'actuel Directeur général de la SODECOTON, Iya Mohamed et le regretté Justin Ndioro alors Ministre de l'Economie et des Finances. Dès mars 1995, l'annulation de la cession des actions de l'Etat est prononcée par le Gouvernement parce que «réalisée de gré à gré à un prix inférieur à la valeur minimale d'une action qui est de 10 000 FCFA et en dehors du cadre légal et réglementaire des privatisations au Cameroun», selon un communiqué du Ministre Justin Ndioro. L'affaire fait alors les choux gras de la chronique judiciaire car fort de son «bon droit», Baba Socoba, habitué de longs et couteux procès, contre-attaque devant les tribunaux. Pendant que les avocats des parties s'étripaient devant les prétoires, «Baba Socoba» lui, tout bonnement, envoyait son rejeton aux Etats-Unis se mettre à l'école du coton. 

Face à l'impasse judiciaire, le salut de la SODECOTON viendra de l'entrée dans la danse des dirigeants de l'ex Compagnie Française pour le Développement de la Fibre Textile (CFDT) alors actionnaire à hauteur de 30% de la SODECOTON. Ils ont d'abord brandi leur droit de préemption sur les actions de l'Etat avant «d'actionner» l'ex-Président de la République française, Valery Giscard d'Estaing. Celui-ci séjourne de temps à autre dans la Région du Nord pour des parties de chasse et connaît bien la SODECOTON car c'est elle qui entretient les pistes pour rendre son séjour agréable. Lors d'une de ses visites, il se fait «briefer» sur le sujet, avant d'en souffler mot au Chef de l'Etat, Paul Biya, lors d'une audience à Yaoundé en janvier 2001. 

C'est après cet entretien que le rêve de Baba Amadou Danpullo de mettre la main sur la SODECOTON s'envole. Quelques temps plus tard, Marafa Hamidou Yaya, alors Secrétaire général de la Présidence de la République, indiquera laconiquement aux protagonistes convoqués à la Présidence de la République que le Chef de l'Etat a tranché dans l'affaire de la vente des actions de l'Etat à la SMIC. Paul Biya, selon Marafa Hamidou Yaya, accordait 11% des parts de l'Etat détenues par l'ex-ONCPB à la SMIC plus les deux milliards FCFA de dividendes que la SODECOTON devait verser à la SNI, CSPH et la liquidation de l'ex-ONCPB. 

C'est finalement en août 2001 que le Ministre de l'Economie et des Finances a entériné avec le Président du Conseil d'administration de la SMIC, Baba Danpullo, cet accord arrangé au sommet, loin des regards indiscrets. 

Avec 1,5 milliards FCFA, voilà comment Baba Amadou Danpullo avec la connivence du sommet de l'Etat a mis la main sur 11% des parts de l'Etat dans la SODECOTON, plus un bonus de deux milliards FCFA. Depuis, l'homme d'affaires siège au Conseil d'administration de la SODECOTON, dont il rêve d'en prendre les rênes. Aujourd'hui ou demain. Pour ceux qui connaissent ses méthodes managériales, cette seule perspective pourrait faire baisser les cours sur le marché mondial, tant la survie de la SODECOTON ne tiendrait alors qu'à un fil.
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