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Dr. Alain Nkoyock : LA TRANSPARENCE DANS LA PASSATION DES MARCHÉS PUBLICS : COMMENT INFORMATISER LES MARCHÉS PUBLICS AU CAMEROUN ?

Les marchés publics ont une importance économique considérable au Cameroun et représentent une part significative du PIB national. À cet égard, les principes de transparence et de concurrence équitable et efficace gardent toute leur pertinence. Toutefois, d’après la CONAC, le taux de corruption dans les marchés publics au Cameroun est de 75%.
Compte tenu de l’importance des fonds publics qui transitent par les marchés publics, la corruption dans ce secteur est de nature à affecter la qualité des infrastructures par le renchérissement des coûts et de priver l’Etat de ressources qui auraient pu servir à financer d’autres secteurs d’activités. Pour cette raison, la passation des marchés n’a pas échappé au processus de réformes tendant à s’adapter pour mieux faire face aux pratiques déviantes y compris corruptrices. Au Cameroun, la passation des marchés publics est actuellement régie par le décret n°2004/275 du 24 septembre 2004 portant code des marchés publics.
De 1989 à 2011, près de 20 modifications substantielles des règlements des marchés publics ont eu lieu, suivies, en 2001 du décret n°2001/048 du 23 février 2001 portant création, organisation et fonctionnement de l'Agence de Régulation des Marchés Publics (ARMP) et en 2004 du décret n°2004/275 du 24 septembre 2004 portant Code des marchés publics… et finalement, le décret N°2011/408 du 09 décembre 2011 portant création du Ministère des Marchés Publics placé sous l’autorité de Ministres Délégués à la Présidence de la République ! La création de l’ARMP en 2001, puis la publication du Code des Marchés Publics en 2004 avaient pour objectif majeur la contribution à l’implémentation progressive et formelle des mécanismes de suivi, de contrôle et de prévention de la corruption dans les marchés publics.
Les différentes dispositions règlementaires susmentionnées traduisent en soi la persistance des pratiques corruptrices que ces réformes successives avaient pour objectif d’endiguer. Les pratiques les plus répandues portent sur le recours abusif aux procédures dérogatoires. D’exception, le gré à gré est devenu la règle dans la passation des marchés. L’urgence qui pouvait légalement justifier le recours à la procédure a été souvent invoquée par certaines administrations pour des travaux qui pourtant ont été planifiés de longue date.
Les agences à l’égard desquelles l’applicabilité du code des marchés était incertaine ont recouru à des procédures dérogatoires en particulier au gré à gré bien que bénéficiant de fonds publics. Certains marchés ont été attribués avant même le lancement des appels d’offres. Dans ces cas, l’appel d’offre n’a pour objectif que de régulariser la situation.
Dans d’autres cas, bien que des fonds publics aient été engagés, le marché n’est pas exécuté. Le système de la taupe est une pratique courante dans la passation des marchés publics. Certains soumissionnaires disposent ainsi au sein des commissions d’attribution des marchés de complices qui les informent des soumissions des concurrents.
Des cas de concussion sont également relevés, certaines administrations réclamant aux soumissionnaires des sommes d’argent non prévues par le code des marchés publics dont la destination reste inconnue. A cela, il convient d’ajouter le fait que certains marchés sont préfinancés en flagrante violation du code des marchés qui exige l’existence préalable de crédits suffisants.
Les pratiques déviantes dans la passation des marchés s’expliquent d’abord par les défaillances du code lui-même. Il en est ainsi des procédures dérogatoires, par exemple l’autorisation des marchés de gré à gré, pour des montants assez élevés.
La persistance des pratiques déviantes tient également à l’impunité généralisée. Certains agents corrompus de l’administration avouent même leur forfait à des soumissionnaires évincés, convaincus qu’ils sont, que l’utilisation des voies de recours ne serait pas concluante. Il faut dire que certains soumissionnaires n’ont pas confiance aux organes de contrôle.
La création de l’ARMP en 2001, puis la publication du Code des Marchés Publics en 2004 avaient pour objectif majeur la contribution à l’implémentation progressive et formelle des mécanismes de suivi, de contrôle et de prévention de la corruption dans les marchés publics.
Mais, la corruption, y compris dans les marchés publics, est l’une des grosses pesanteurs sur le développement des affaires au Cameroun, C’est d’ailleurs la principale conclusion du récent forum économique franco-camerounais tenu à Paris le 31 janvier 2013 lors de la visite du Président Biya en France. Lors de ces échanges, le Président a promis la poursuite des réformes vers le chemin de la gouvernance et l’accélération de la lutte contre la corruption qui plombe l’économie nationale.
Les règlements élaborés ou en cours d’élaboration par le gouvernement camerounais sont complétés par toute une série d'ajouts d'ordre législatif et institutionnel pour tenir compte de l’évolution du problème de la corruption dans la commande publique tout en adoptant les standards internationaux comme, par exemple, le processus de l’informatisation des marchés publics.
L’offre des Nations Unies en matière d’informatisation des marchés publics
La problématique de l’informatisation des marchés publics a pris une dimension considérable ces dernières années tant au plan national qu'international. Ces efforts sont aujourd’hui couronnés par l’offre informatique aux Etats membres dénommée goPRS (disponible à l’adresse Internet http://goprs.unodc.org)
En effet, l’Office des Nations Unies en charge de la drogue et des crimes (ONUDC) basé à Vienne (Autriche), en collaboration avec d’autres organisations internationales, propose aux Etats membres plusieurs solutions informatiques (connues sous la dénomination anglo-saxonne goPRS) pour la gestion efficace des marchés publics. L’utilisation de ces systèmes informatisés goPRS a une incidence significative sur l'efficience de l'usage des fonds publics et, plus généralement, sur la confiance du public dans le gouvernement et la bonne gestion des affaires publiques. L'obtention d'une bonne efficacité économique, l’obtention et la gestion de l’information et de l’intelligence relatives aux cas de corruption, la maitrise de la traçabilité des fonds alloués aux projets structurants nationaux, l'accès du public à l'information relative aux marchés publics, et des chances équitables pour les fournisseurs de concourir pour les marchés publics, sont autant d’avantages concrets d’une utilisation rationnelle des systèmes goPRS par un pays comme le Cameroun.
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