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Tagne Foko Michel : ROI DES BANDJOUN AU SENAT : IMPOSTURE SELON HONORÉ TALOM TÉTIO

Suite à ma réflexion, ou plutôt à mon invitation au débat quant à la position partisane politicienne du roi des Bandjoun à l’occasion des Sénatoriales, j’ai été traité de tous les noms d’oiseaux par certains. Une volée de bois vert d’une rare violence m’a été servie sans ménagement. Accusé de déstabiliser le royaume par certains, traité d’ennemi par d’autres. D’autres réactions ont abondé dans mon sens, également portées vers un questionnement du rôle de notre roi, gardien de nos traditions, et partant, du rôle des chefs traditionnels en général. Il y a plus de 20 ans, Evariste Fopoussi Fotso, notable à la cour de Bandjoun et homme politique bien connu de notre pays, posait la problématique des chefferies traditionnelles en «démocratie» : « Faut-il brûler les chefferies traditionnelles ? », s’interrogeait-il alors. 
Aux uns et aux autres, je réitère mon propos : le chef ou le roi ne doit pas être partisan ; il ne peut choisir un parti politique au détriment d’un autre ; il ne peut entrer en compétition avec ses populations. S’il le fait, il est déchu. 
Je n’ai aucun état d’âme à aborder la question de la position morale du chef traditionnel et, dans le cas d’espèce de celui de Bandjoun dont je suis originaire. Fils d’un monarchiste entier et définitif – j’insiste là-dessus – , qui du reste ne vit plus et est parti sans jamais faillir à son engagement total en faveur de l’institution traditionnelle, il ne m’est pas possible d’imaginer un roi autrement qu’un roi. Même si la terminologie «républicaine» le ramène au rang de «chef», fût-il supérieur. Je n’ai l’intention de faire plaisir à personne, ni, comme certains le prétendent, de «salir le chef». Le «chef», comme ils disent, est davantage une institution qu’un individu. C’est en montant au trône qu’on est transfiguré. Avant, il est qu’un prince lambda parmi d’autres. Certains m’ont accusé de vouloir déstabiliser la chefferie, d’autres de donner des leçons, etc. Je ne m’en formalise pas, puisque je ne suis rien quant aux enjeux futurs. Le débat d’aujourd’hui est vital pour la survie des structures traditionnelles. Le colonisateur, et aujourd’hui le néo-colon, ne ménageront aucun moyen pour anéantir nos seules possessions que sont notre culture et notre langue. Ce sont nos derniers bastions que nous devons défendre bec et ongles parce qu’après, il ne restera rien. Ils ont réussi à la perfection leurs missions dans le centre par exemple où ils ont imposé des vareuses aux chefs traditionnels, les réduisant à des comparses que personne n’écoute. Pourtant Dieu sait si Charles Atangana, par exemple, a pesé sur la vie du Cameroun, de son statut de chef traditionnel ! La mission sera impitoyable au Nord, à l’Ouest ou au Nord-ouest où il subsiste un fond de résistance au néo-colon.
Le chef est au trône parce qu’il est moralement supérieur. C’est d’ailleurs pour cela qu’on dit d’un chef qu’il est «monté» au trône, tandis que le président lui, est élu ou accède à la magistrature suprême. Tandis que le chef ne descend du trône qu’une fois l’arme passée à gauche, le président peut être destitué ou battu aux élections. Bien sûr, on me reprendra là-dessus en disant que j’ai demandé la destitution de Djomo Kamga Honoré. Je l’ai demandé, mais dans son contexte, mon propos revenait à demander aux sages de ramener le chef Bandjoun à la raison. Aucun Bandjoun, même non initié, ne peut l’exiger. Certains m’opposent qu’il ne saurait exister de chef ou roi en démocratie. Je réponds à cette affirmation idiote et aliénée que la quasi-totalité des pays qui nous parlent de démocratie sont des royaumes. De plus, je ne vois pas de démocratie chez nous. Le régime en place, rusé et avisé, fait le minimum pour se pérenniser en saupoudrant des zestes de «démocratie» pour attendrir les «démocrates » qui du reste s’en foutent pas mal, tant que leurs intérêts sont préservés. Ce n’est pas parce que la France a décapité son roi qu’elle va nous entraîner dans n’importe quoi.
Il n’est pas clairement établi que la démocratie à l’occidentale est le meilleur moyen d’assurer le bien-être des peuples. Les Chinois ou les Nord-Coréens pourraient nous en dire un mot. Et puis même, notre organisation sociétale n’a rien à envier aux Occidentaux en matière de démocratie. Depuis six siècles, la France vit artificiellement, comptant sur des moyens qu’elle n’a pas. Elle n’est «grande puissance» que parce qu’elle a jadis agité l’épouvantail de la protection de l’Occident contre la menace soviétique ou marxisante. Ainsi autoproclamée gendarme du marxisme en Afrique, elle a pu entrer dans la cour des grands, sauf qu’elle est assise sur un siège en éponge.
Cette parenthèse fermée, si Honoré Djomo Kamga est susceptible d’être mangé à toutes les sauces aujourd’hui, c’est qu’il a trouvé la corde qui va servir à le pendre. A Bandjoun, on dirait qu’il a procuré la liane pour le ligoter. Il voulait battre campagne pour les sénatoriales contre ses fils militants du Sdf de Bandjoun. Sauvé par le gong par un stratagème du Rdpc son désormais parti, qui avait noué une alliance venimeuse secrète avec le Sdf, il ne subira pas le soufflet des joutes militantes d’un parti d’opposition aux abois qui n’aurait lésiné sur aucun moyen pour glaner des sièges, y compris en traînant dans la boue un chef qui s’est invité dans l’arène pataugeuse de la campagne. 
Son frère et prédécesseur au trône avait commis la même bêtise, se faisant même souffleter par un adversaire politique Bandjoun excédé ! Le tout Bandjoun était groggy et aphone. Le roi était tombé de son trône. Plus bas que terre. Sans aucune possibilité d’être relevé. Cette situation avait duré quelques années avant que le destin ne le rappelle. Entre temps, il n’était plus que l’ombre d’un roi. A cette époque, quand vous parliez du roi, les gens se contentaient de piaffer. Faute mieux. 
Provisoirement sauvé de l’humiliation, Honoré Djomo Kamga s’est vu rattraper aussitôt par sa nomination par le président de la République et président du Rdpc. D’abord, les choses sont si mal faites que son acte de nomination jette un doute sur son identité. Puisqu’on a nommé Djomo Kamga Victor en lieu et place de Djomo Kamga Honoré. Accordé donc avec faute donc ! Le voilà fait sénateur ! En tant que «auxiliaire» de l’administration, il était déjà malgré lui un alibi au régime rigide de Yaoundé. A présent, il est un acteur efficace du dévoiement des intérêts du peuple camerounais dans le sens où il s’associe clairement et activement à la mascarade démocratique qui se joue dans notre pays. Même si je dois reconnaître que cet engagement a très peu à voir avec un quelconque militantisme, mais plutôt à la boulimie financière qui gagne chaque jour un peu plus les Camerounais. Il s’est laissé charmer par les ors du Sénat et les avantages individuels qui l’y attendent. 
Un vrai roi, aurait négocié pour faire admettre l’un de ses fils (biologiques ou du royaume) dans les sphères de l’Etat afin de se concentrer à l’administration d’un royaume aussi difficile que Bandjoun. Son père, Joseph Kamga, si puissant qu’il était, avait toujours su user de sagesse avec le pouvoir politique, sans faire montre de l’égocentrisme cupide royal actuel.
Descendu de son trône, il est allé s’assoir sur un «banc en bambou» de la haute chambre, au milieu des «mpfokè». Avec probablement pour voisin de banc un autre sénateur Bandjoun du Sdf, sans doute notable Bandjoun, mais qui n’hésitera pas à lui servir du «cher collègue, il s’agit des intérêts supérieurs de la nation et non ceux de ton parti» quand, au cours de l’examen d’une loi par exemple, Honoré Djomo Kamga obéissant naturellement aux consignes de son parti si déterminé à nous plonger dans une nuit noire interminable, fera un vote de destruction.
Honoré Djomo Kamga a pourtant plus d’un chas à fouetter à Bandjoun. A la dernière élection par exemple, le Cameroun a enregistré un mort. Cet unique mort là était une femme Bandjoun. On n’a pas vu le chef Bandjoun lever le petit doigt pour fustiger la violence qui avait fait perdre la vie à un de ses ressortissants. On ne l’a pas vu. Il a regardé ailleurs comme un passant. Au nom de quoi un fils ou une fille Bandjoun devait-il payer de sa vie une dispute électorale ? Son père n’aurait pas passé cet acte sous silence. Certes, il ne s’opposait pas au régime, au contraire, mais il savait préserver les siens de celui-ci dont il connaissait bien le cynisme. 
Le chef actuel a à organiser de fond en comble la communauté Bandjoun du Cameroun comme de la diaspora qui attend beaucoup de lui. Au Cameroun, il a fort à faire à Douala et Yaoundé notamment, ses deux plus importantes communautés, où ses deux paires de représentants ont tout le mal à travailler ensemble, se regardant en chien faïence, à cause du culte qu’il voue personnellement à l’argent-dieu lequel travestit toute tentative de construction. Il y a le Msem Todjom dont il peine à en faire un événement, une vraie destination culturelle et touristique ainsi que l’avait réussi son initiateur et prédécesseur Joseph Gnie Kamga dès la première édition. Sur ce coup là, on vit alors un vrai monarque, pénétré de sa culture et passionné d’elle, un danseur émérite dont personne ne pouvait décliner l’invitation. Il faisait corps avec le Msem. Et Bandjoun rayonnant était fier de sa culture. Depuis quelques années, une poignée de bricoleurs s’activent autour du Msem pour se faire les poches et réactiver leur business, focalisant l’attention uniquement sur un buffet fade et insipide de mets occidentaux, curieusement très couru par la crème de l’élite ! Une razzia ridicule, car théoriquement, ces gens qui s’accaparent l’espace de restauration sont censés être à l’abri et côtoient les sommités du royaume et du pays régulièrement.
Le comble étant que ce faisant, ils excluent systématiquement les notables locaux, véritables gardiens de notre temple, obligés de se rabattre sur leur quotidien un jour de bombance à la chefferie. Mes souvenirs des retours de mon père de la chefferie, même les jours ordinaires, ne me ramènent aucune trace d’une telle disette. Je ne parlerai pas de la décrépitude de la culture Bandjoun à Bandjoun même où plus rien en se passe, pas même le simple Belô qui distrayait les jeunes, et encore les différentes prestations de danses qui jadis animaient les funérailles et autres festivités. Ni même de son mépris et manque d’implication personnelle pour la promotion du Ghomalà. Il ne me souvient aucune de ses recommandations aux parents des communautés des villes de suivre massivement le courant actuel de promotion de notre langue dont certains pionniers en font une affaire personnelle. En 2012, la communauté de Douala a institué le Kôàdjo, sous son impulsion certes, mais on voit ce que ses contradictions et ses choix intéressés sont en train d’en faire. C’était pourtant un véritable tremplin duquel devrait partir toutes nos communautés au pays et à travers le monde. Des hommes de culture tels que le Pr Mba Gabriel de l’Université de Yaoundé I ou le linguiste et spécialiste du Ghomalà Médard Nono s’étaient pleinement impliqués à l’événement conduite par les représentants du roi. Alors que le roi, pour une fois dans son rôle, avait envoyé des dignitaires du royaume s’en enquérir, on est tout de même étonné de la suite réservée à l’initiative. 
On y passerait la nuit à égrener les défis du roi. Malheureusement, on a l’impression qu’il est sur les traces de son président de parti Paul Biya, se contentant de compter les années passées à la tête du royaume afin de brandir sa longévité au trône comme son seul trophée de guerre. C’est triste à dire, mais depuis la disparition de Joseph Kamga en 1975, on attend toujours de voir arriver un roi digne du peuple Bandjoun au trône. Justin Fotué Kamga qui aurait fait ce roi à la fois «moderne et traditionnel» a été fauché en plein vol par un méchant destin dont certains n’ont pas hésité de qualifier de téléguidé. 
Cela peut paraître excessif, mais à mes détracteurs, j’affirme que le roi est un homme d’Etat. Oui messieurs ! Même en République. Ce n’est pas le président Paul Biya, dans sa posture de néo-colon mandaté pour détruire les royaumes qui me démentira. Comment expliquer autrement qu’il ait fait le tour des chefferies/royaumes du pays pour mendier son initiation, tout président de la République qu’il est ! Ce n’est pas à un initié de moult ordres occidentaux comme lui que je dois expliquer qu’en matière d’initiation, on ne se prosterne que devant son supérieur ou maître ? Même s’il les met aux ordres par un dispositif légal néocolonial inique, il n’en demeure pas moins qu’il reconnaît implicitement leur supériorité, puisqu’il arbore très fièrement son titre de «Nom Gui», le roi des rois. Sauf que pour son malheur, aucun chef/roi ne peut initier et, a posteriori donner un quelconque pouvoir à un non initié. Dans toutes les cultures du Cameroun, on ne peut admettre personne à un grade s’il ne le mérite. A plus forte raison si cette personne est extérieure à ladite culture. Les Duala ont fait notable le père Jésuite Eric de Rosny quand celui-ci avait franchi toutes les étapes initiatiques prévues par leur tradition.
A Bandjoun, dans les années 70, le père Roger Shouab n’a pas connu la même fortune. Fait Souop, notable à la cour en toute complaisance (cynisme ?), il y a laissé sa vie.
Il ne fait aucun mystère que Paul Biya n’a reçu aucune initiation et moins encore aucun pouvoir des chefs traditionnels. Les jurés de la tradition ne la trahissent pas, ne la bradent pas, au risque d’en payer le prix fort. 
Tout ce laïus pour faire ressortir la puissance et la force des pouvoirs ancestraux transmis de générations en générations. Nous nous devons tous d’en être de dignes héritiers. En contribuant, chacun à son niveau, d’en maintenir le flambeau. C’est le sens de mon propos. 
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