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Si donc, le Cameroun est en guerre… par Emmanuel MIMBÈ

Il n’ya aucun doute, le Cameroun fait l’objet d’attaques répétées, de pilonnages nourris et de prises d’otages fréquents, principalement à l’Extrême-Nord du pays. Même si la riposte, semble-t-il, est à la mesure des attaques, l’observateur intéressé, ne peut s’empêcher de se questionner sur un certain nombre d’actes qui semblent ne pas avoir été pris, et des faits qui n’arrivent étonnamment pas.

D’abord les actes

La guerre ouverte est une situation conflictuelle entre des entités opposées quelqu’en soit le motif. Lorsqu’elle touche un Etat constitué, celui-ci déclare la guerre à l’ennemi. Ce qu’a bien fait le Président camerounais dans un pays étranger ( ?) au Cameroun. Mais, l’article 9 de la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996, a posé les jalons de ce que devrait faire ce dernier en cas de crise majeure menaçant la République. En effet, aux termes de l’alinéa 1er de cet article, le Président de la République peut, lorsque les circonstances l’exigent, proclamer par décret, l’état d’urgence qui lui confère des pouvoirs spéciaux dans les conditions fixées par la loi. L’alinéa 2 du même article n’en démord pas car, dispose-t-il :


-           le Président de la République peut, en cas de péril grave menaçant l’intégrité du territoire, la vie, l’indépendance ou les institutions de la République, proclamer, par décret, l’état d’exception et prendre toutes mesures qu’il juge nécessaires. Il en informe la nation par voie de message. Si donc le Cameroun est en guerre… comme cela est perceptible sur le terrain, et tel que le discours politique le proclame, pourquoi ne le fait-il pas ? Devrait-on comprendre qu’il n’existe à ce jour « aucun » péril grave menaçant l’intégrité du territoire, la vie, l’indépendance ou les institutions de la République ? Ou que le Cameroun, qui demande de plus en plus l’intervention de la communauté internationale, notamment des pays du bassin du Tchad, reste capable de faire face, tout seul, à ces attaques qui s’intensifient telles une véritable peau de chagrin à ses frontières? Le verbe ‘’pouvoir ‘’ conjugué à la 3ème personne du singulier «  peut »), visé supra, est-il vraiment dans le cas d’espèce, un pouvoir discrétionnaire ou une compétence liée ?

Ces questionnements sont d’autant plus pressants qu’un état d’urgence fut déclaré dans la province du Nord-Ouest en 1992, pour un cas apparemment beaucoup moins menaçant, suite à la proclamation des résultats de l’élection présidentielle, qui vît l’auto-proclamation de la victoire du charismatique chairman du SDF d’alors...Par ailleurs, il y a quelques années, en 2001, fort du phénomène du grand banditisme à Douala, le Président n’avait pas hésité à mettre en place le « commandement opérationnel » pour endiguer cette désastreuse situation.

En attendant que les spécialistes se saisissent de ces questionnements, il est tout aussi curieux de constater quelques faits.

Les faits qui étonnent

Depuis le déclenchement de la guerre aux portes du Cameroun, et en dépit des dizaines de morts enregistrés au front, aucun responsable institutionnel de premier rang n’est allé remonter les troupes, y compris en visite surprise. Cette semaine, l’on a tout de même enregistré la visite du Secrétaire d’Etat à la Défense chargé de la Gendarmerie. En espérant qu’il est y allé pour préparer le terrain, l’opinion reste attentif aux gestes du Chef de l’Etat à ce propos.

 Par ailleurs, le Président n’a toujours pas expliqué aux camerounais de quoi il s’agit afin que toutes les forces vives de la nation se mobilisent (comme cela a souvent été le cas en d’autres circonstances, notamment à l’occasion du report des élections en 2007 ou du coup de coeur de 1990) pour faire face à cette guerre. Ce flou entretenu est d’autant plus patent que le discours du Président est fluctuant à plus d’un égard : En France, lors du sommet de Paris sur la sécurité au Nigéria, le 17 mai 2014, il avait parlé du groupe terroriste BOKO HARAM. Il l’avait encore déclaré peu avant son voyage pour le Sommet Etats-Unis/Afrique, le 02 août 2014. Mais, dans sa dernière adresse à la nation, il a parlé des «  soit disant djihadistes ». Serait-ce la preuve qu’il ne croirait plus lui-même à l’identité des fauteurs de guerre ?

Au surplus, l’on reste toujours perplexe à l’idée de savoir qu’en dépit des annonces et autres rappels à la réduction du train de vie de l’Etat, le gouvernement n’a pas drastiquement été réduit, que des hommes de poigne et de mission n’aient pas été nommés pour faire face la guerre. Enfin, il est à se demander comment est-ce possible qu’en état de guerre, l’administration civile continue à diriger une circonscription administrative aussi étendue que l’Extrême-Nord du Cameroun ? Mieux, comment déclarer à haute et intelligible voix que le Cameroun n’attendait pas cette guerre lorsqu’on sait qu’il a une armée et que le dicton « qui veut préparer la paix, prépare la guerre » est bien connu des responsables de l’armée du Cameroun ?

Voilà autant de questionnements qui donnent le tournis à l’observateur. Aussi, si donc le Cameroun est en guerre…pourquoi ne donc pas prendre les mesures adéquates suffisantes? Voici une bouteille jetée à la mère avec la mention «  attrape qui pourra ! »


Emmanuel MIMBÈ. 
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