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FÊTE OU FAUTE DE LA JEUNESSE ? BILAN D’UN DISCOURS SANS BILAN par Arnaud DJEMO

Le 10 Février comme il est de tradition, selon l’ordre de  son tiercé gagnant en terme de discours, le président de la République, a fait entrer son second cheval de base après celui du 31 décembre dernier. C’est donc son premier discours de l’année, il ouvre cette parade verbale, cette joute oratoire par la jeunesse à laquelle il a longtemps vendu le vent. Et comme toujours, ces paroles n’étaient que du vent.
Pour commencer, il a présenté un bilan dont les chiffres ont été très vite contestés non seulement par la réalité d’une existence sans repères et toujours plus clochardisée pour la jeunesse, qui sortant de grandes ou de petites écoles, se bouscule toujours plus nombreuse aux portes du chômage qu’à celles de l’emploi. Mais à cela, notre cher président avait une explication. D’une part, il notera « l’iniquité des termes de l’échange et les différentes crises économiques et financières successives ». Et, d’autre part « l’orientation tardive de notre système éducatif vers la professionnalisation ». Faut-il ici questionner les causes  ainsi présentées de cette précarité existentielle dans laquelle baigne la jeunesse camerounaise depuis 33 ans ? Non. On ne le fera pas parce que ça sonne faux. Tant c’est honteux, infâme, insultant.

Le régime dont la fougue de sa jeunesse portait les flammes non pas d’un parti voulant s’éterniser au pouvoir, mais d’un programme social, politique, économique labélisé « Libéralisme communautaire », et dont les bases étaient fondées sur « la rigueur et la moralisation » reconnaît lui-même, qu’il naviguait à vue, qu’il n’avait pas mesuré l’enjeu de sa tâche, que sa boussole perdait le nord.
Sinon avec qui, pour qui et par quels moyens comptait-il réaliser le Cameroun qu’il voulait diriger ? Pourquoi et pour qui voulait-il diriger, si tant il est vrai qu’il a toujours claironné que la jeunesse était le fer de lance de la nation ?  Cette «  professionnalisation tardive » signifie-t-elle que c’est maintenant seulement que le Renouveau s’instaure alors qu’il est vieux de trois décennies ? Laissons les spécialistes en communication et en statistiques de ce régime nous en dire plus, et revenons-en à l’essentiel de ce discours.
Pour qualifier la jeunesse camerounaise, deux adjectifs ont été employés par M. Paul Biya : « impatiente » et « ardente ». Et c’est d’ailleurs là-dessus que porte l’essentiel de son discours.
Car en dehors de ces deux mots, c’est un discours creux, vide. Il  a utilisé ces mots comme tremplin, pour mobiliser la jeunesse, pour l’inciter à rester unie dans le combat qui engage le pays contre des terroristes. Il les a utilisé pour ne pas que comme en Février 2008, elle se laisse entraîner par ceux qu’il avait qualifié à l’époque d’« apprentis-sorciers ». Cette fois-ci, c’est contre  des « oiseaux de mauvais augure »,  des « marchands d’illusion », qu’il met cette jeunesse désœuvrée, prête à se faire enrôler même pour un copeck, en garde. En leur vendant le rêve d’un monde enchanté, d’un Cameroun devenu subitement par le discours un futur « Eldorado », il a invité les jeunes à se méfier des réseaux sociaux. Retour à l’analphabétisme, alors qu’il y a pas longtemps était analphabète celui ne savait pas se servir de cet outil aujourd’hui dénigré. Mais la vérité c’est que le président avec ce qui se passe au Nord et à son Extrême, mesure les dangers de la pauvreté, du chômage, de la misère.
Sinon que penser de cette jeunesse qualifiée d’ « impatiente » si l’on ne prend que ceux qui sont nés avec le régime, ils ont plus qu’une trentaine d’années. A quel âge a-t-on le droit d’espérer, de travailler au Cameroun ? A quel âge cette jeunesse doit-elle donc finalement prendre sa vie en charge, sortir des « kabas » des mères vieillissantes et espérant être prises en charges par ces jeunes ? A 33 ans on est donc « impatient » en demandant un travail ? Si oui on comprend pourquoi cette gérontocratie règne depuis des lustres. Mais le président devrait se rappeler au moins l’âge auquel il est entré au gouvernement. Etait-il donc un génie ? Un don de la Providence qui savait que sans lui, le Cameroun ne sortirait pas tardivement de l’ornière ?
La jeunesse est « ardente ». Oui les jeunes camerounais sont ardents. Mais leur « ardeur » c’est d’avoir pu à défaut d’un travail digne, mérité, se livrer à toutes sortes de petits métiers. Chacun a su orienter son diplôme dans autre chose pour se nourrir. Mais les jeunes camerounais ne sont pas ardents au sens où ils sont prêts à pactiser avec le diable, à se liguer contre leur pays, pour espérer. Ils savent où  se situent  le bien  et le mal. Ce qui n’est pas le cas de certains de cette gérontocratie gouvernante qui n’hésite pas à s’en mettre plein les poches, et à nous en mettre plein la vue, et à qui on attribue à tort ou à raison des ambitions de pouvoir, et qui pour cette raison, sont capables de se payer des rebelles centrafricains, maliens voire même de remettre sur la sellette Bob Denard.
Il ressort donc de ce discours qu’à défaut de nous situer dans le temps actuel, comme dans le passé aussi ça n’a pas été le cas, c’est encore et toujours au futur incertain que se conjugue le verbe « travailler » pour la jeunesse camerounaise.
Faut-il s’en plaindre ? Faut-il pour cela vendre son âme au diable, quitte à se mêler à n’importe quoi qui peut détruire ce pays, que malgré tout nous chérissons, et que  la politique du Renouveau  a réussi à ternir tant dans le temps que dans l’espace, dans son fond comme dans sa forme ? Notre patriotisme ne peut être convoqué, celui du Renouveau par contre oui. Nous restons et demeurons ce que nous sommes, des êtres patients mais pas dupes.
Arnaud DJEMO
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