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Charles Ewandjè Epée ou le difficile retour aux sources après 55 ans en Europe ! par Adeline TCHOUAKAK

Un homme frustré. C’est l’image que reflète le musicien camerounais de renommée internationale, Charles Ewandjè Epée. 76 ans bien sonnés, il a tenu à prendre même péniblement, les marches qui mènent à votre journal vendredi 4 avril 2014. 

L’objet de cette visite lui tient à cœur : «je suis ici pour essayer de revivre» à travers «mes œuvres et des spectacles». Une façon pour ce septuagénaire d’assoupir sa soif de reconnaissance chez lui. Un pays qu’il a quitté en 1959 pour la France, alors qu’il n’avait que 21 ans. Pendant des années, il s’est formé à la guitare et au solfège. En 1976, il sort son premier 45 tours et en 1979, le deuxième sous le nom de «Makala ma mbassi». Pétri de talent, il est retenu comme professeur de guitare et de Solfège au Théâtre Populaire des Flandres (TPF) et à la Faculté de Lettres de l’Université de Lille en France. En 1992, il est le premier Africain à obtenir le Prix de composition et création au «Carrefour mondial de la guitare» à Fort de France en Martinique. Devant un jury composé du président Léo Bruwer (Cuba), Egberto Gismonti (Brésil), Ishiro Suzuki (Japon), Jésus Ortega (Cuba) et Abel Carlevaro (Uruguay). Commence alors pour lui une longue et douloureuse marche vers ses sources. «Quand je gagne ce concours, des Allemands sont tellement contents qu’ils me demandent ce qu’ils peuvent m’offrir. Je demande une école de musique pour mon pays. Comme j’étais installé en France, il fallait que l’ambassade du Cameroun en France donne son aval pour que le processus se mette en place. Malheureusement, je n’ai reçu aucune réponse et les Allemands las d’attendre pendant 3 ans, se sont découragés alors que le projet était prêt», se souvient-il avec tristesse. L’artiste enregistre un premier échec sur le chemin du retour à la maison. 



Conservatoires européens 

Il ne se décourage pas. Il se console en collaborant avec des gens de sa génération comme Francis Bebey, Charles Lembè et des jeunes comme Sam Mbende (dont il a arrangé des albums), Sissy Dipoko et Kaïssa Doumbè Moulongo, ses choristes, Grâce Decca qui a repris ses titres etc. En 1992, il sort son troisième disque, «Longue lasu». Les chansons de ce disque, dit-il, ont été longtemps utilisées par le poste nationale, la Crtv. En retour, il n’a rien reçu. Aucun sou du droit d’auteur au Cameroun. Ce n’était pas le plus important, soutient-il, «je voulais juste exister chez moi. Participer à de grands projets comme, «les Fleurs musicales», le regroupement des artistes camerounais de par le monde par le président Ahmadou Ahidjo pour le vingtième anniversaire de l’indépendance, le cinquantenaire et bien d’autres organisés dans ce pays». Quelques fois, il a lui-même entrepris des démarches pour se faire inviter. Mais en vain. «A chaque fois que j’assistais à un évènement, c’était une initiative personnelle», confie l’artiste. Après l’enregistrement de l’hymne de ralliement Duala «Tet’ekombo» en 2004, Charles Ewandjè Epée se met à la transcription de ses œuvres sur partitions. Elles sont actuellement détenues par l’entreprise française spécialisée dans les musiques classiques et du monde, Harmonia Mundi. 

Elles sont également enseignées dans des conservatoires européens. Père de 8 enfants (deux sont des sportives de haut niveau, dont l’athlète 17 fois championne de France et une recordwoman du 100 mètres haies et une autre, professeur de piano a Londres) et de 20 petits-enfants, l’artiste vient de mettre sur le marché un nouvel album «Aria § Munia» qu’il présentera au Cameroun, les 13 et 14 juin 2014 à Douala au cours de deux spectacles. Au fait de l’actualité à la Socam, le guitariste dit ne plus craindre le piratage. Car, depuis 32 ans, «je n’ai rien touché du droit d’auteur». Pour cela, il conseille aux personnes en charge du droit d’auteur au Cameroun «d’aller laver la moisissure qui gangrène la musique au Cameroun en faisant des stages professionnells à la Sacem». Un effort qui devrait être complété selon lui par des jeunes, qui «doivent avoir le courage de s’assumer en tant qu’artistes». Même fatigué du fait de son âge, les yeux de ce grand-père brillent comme ceux d’un enfant qui rêve encore. Le rêve qu’il entretient depuis sa jeunesse. Celui de se produire enfin sur la terre qui l’a vu naitre, après de nombreuses années sur les scènes internationales. Il attend ce mois de juin avec impatience et espère de tout cœur ne plus recevoir un autre poignard dans le dos.
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